Barthélémy Joliette a été notaire, député, conseiller législatif, membre du conseil spécial après la dissolution de l’assemblée en 1837, maire de la municipalité du comté de Berthier… Son rôle de fondateur de la ville de Joliette a été abondamment documenté mais moins sa carrière de politicien. Pour les patriotes de 1837 l’Honorable Joliette était un vire-capot à la solde du gouverneur; il a été très critiqué dans les journaux de son temps.
Barthélémy Joliette notaire à L’Assomption
Barthélémy Joliette est né en 1789 il était le fils d’Antoine Joliette notaire qui avait épousé Marie Catherine Faribault, fille du notaire Barthélémy Faribault chez qui il avait débuté comme clerc de notaire. Le 29 décembre 1786 Cécile Papin veuve de François Joliette marchand voyageur avait cédé tous ses biens à son fils Antoine Joliette et son épouse Marie Catherine Faribault chez le notaire Faribault. En 1785 Antoine Joliette signait les actes notariés du notaire comme témoin puis il a ouvert son étude de notaire en 1788.
Lire: Barthélémy Faribault notaire des seigneuries à Berthier
Antoine Joliette n’a été notaire que de 1788 à 1791, il est mort jeune alors que Barthélémy n’avait que 2 ans. Sa veuve Marie Catherine Faribault s’est remarié en 1799 avec François Pétrimoulx. Venant d’une famille de notaires Barthélémy Joliette est devenu notaire.
Engagement de Barthélémy Joliette comme clerc de notaire chez son oncle le notaire Joseph Edouard Faribault de l’Assomption pour cinq ans et son entretien. Le 1er juillet 1804 François Pétrimoulx son beau-père a engagé Barthélémy âgé de quinze ans et demie pour faire son apprentissage en qualité de clerc de notaire chez le frère de sa mère.
Soulignons au passage l’importance de l’apprentissage chez le notaire Faribault: notaire fort important à L’Assomption, ce dernier contrôle une bonne proportion des moulins de la région, aussi bien à bois qu’à blé, qu’il possède ou loue. De plus, de 1812 à 1822, Faribault agit comme administrateur de la seigneurie de Lavaltrie. Dès lors, on conçoit facilement que Barthélémy Joliette se soit familiarisé avec le commerce du bois et l’administration de la seigneurie.
Jean-Claude Robert – Un seigneur entrepreneur, Barthélémy Joliette
Barthélémy Joliette a obtenu sa commission de notaire en 1810 et on retrouve sa signature pour la première fois dans un contrat de vente du 3 octobre 1810 à côté de celle de Joseph Edouard Faribault.
Barthélémy Joliette a reçu sa commission de notaire public du gouverneur Craig le 3 octobre 1810.

Le 8 octobre 1810 il a rédigé son premier acte comme notaire établi à son compte pour Madeleine Pétrimoulx qui devait être une parente. Devenu notaire il avait une situation lui permettant de fonder une famille. En 1812 il a acheté une maison à L’Assomption et le 18 septembre 1813 il a épousé Charlotte Tarrieux Taillant de Lanaudière fille de la seigneuresse de Lavaltrie. Son oncle Joseph Edouard Faribault était agent de la seigneurie depuis 1812 et les époux ont eu l’occasion de faire connaissance.
En 2024-2025 la bibliothèque de Joliette expose le bureau de notaire de Barthélémy Joliette et son portrait.
Comme notable du bourg de l’Assomption B. Joliette avait obtenu une commission d’officier dans la milice locale avant même de devenir notaire. La guerre avec les États-Unis a été déclarée en juin 1812, il a participé aux campagnes de 1812 et 1813 et obtenu de l’avancement.
Le 20 décembre 1808, on lui avait accordé dans les troupes de la milice de la division Lavaltrie les grades d’enseigne et d’aide-major. Le 14 février 1812, sir G. Prévost le nomma capitaine, et major le 22 février 1814, après qu’il se fut distingué dans les campagnes de 1812 et de 1813.
Barthélémy Joliette
Le 13 octobre 1814 Barthélémy Joliette major et adjudant en paye de la division des milices de Lavaltrie demeurant au bourg de l’Assomption a constitué pour son procureur George Barthélémy Faribault avocat à Québec pour percevoir de John Stewart député Payer Maître-Général des milices du Bas-Canada la somme annuelle de 30 livres comme adjudant en paye de la division de la milice de Lavaltrie.
Pour le centenaire de la fondation du village d’Industrie une biographie de Barthélémy Joliette a été publiée.
Barthélémy Joliette député du Comté de Leinster
La carrière politique de Barthélémy Joliette aurait été importante pour l’histoire du Québec même si il n’avait pas été le fondateur de la ville de Joliette; elle a commencé à la fin de l’année 1814 immédiatement après la guerre.
Joliette s’intéresse très tôt à la politique. Dès 1814, il se présente comme député. Battu, il conteste avec succès l’élection de son rival; l’année suivante, le même scénario se répète, mais cette fois, Joliette ne parvient pas à obtenir l’annulation de l’élection. Finalement élu en 1820, il n’y siégera pas, la Chambre ayant été dissoute six jours après sa convocation. Il ne tentera pas de retourner à la politique active avant 1830.
Jean-Claude Robert – Un seigneur entrepreneur, Barthélémy Joliette
Barthélémy Joliette s’est présenté une première fois dans le comté de Leinster en 1815 et il a contesté sa défaite contre Jacques Lacombe; il semble que c’était la première fois que le résultat d’une élection était contestée au Bas-Canada.
Un comité présidé par Louis-René Chaussegros de Léry entendit les témoins au presbytère de L’Assomption et déclara en mars 1815 que Lacombe était inapte à siéger et qu’il devrait remettre à Barthélemy Joliette la somme de £181 pour les dépenses encourues. (Pierre Desjardins)
Une nouvelle élection a eu lieu le 8 juin 1815, Michel Prevost s’est présenté contre B. Joliette à la place de Jacques Lacombe et B. Joliette a obtenu une majorité de 36 voix: 226 contre 190 pour Prevost.
Le texte du journal de la chambre d’assemblée (p.113) n’est pas clair; il semble que B. Joliette aurait voulu se désister en faveur de Michel Prevost mais qu’il n’en avait pas le pouvoir.
Député et notable du bourg de L’Assomption
Élu député Barthélémy Joliette a continué son travail de notaire pour gagner sa vie; son greffe contient des actes jusqu’en 1848 mais à partir des années 1820 il en a fait beaucoup moins car il était occupé ailleurs. Dans cet avis de 1815 les lettres N. P. signifient Notaire Public.
Un lecteur que je remercie m’a signalé cette anecdote que j’ajoute à la chronique:
En effet, dans un numéro de 1964 du journal Le Portage de L’Assomption, on pouvait lire qu’on vient de découvrir à Montréal les pièces d’un procès intenté à Barthélemy Joliette pour séduction d’une mineure à L’Assomption. Il s’agit de Marie-Ursule Mousseau qui a fait baptiser à L’Assomption un fils, Jean-Baptiste, le 12 février 1816, né de père et mère inconnus. La jeune fille de 19 ans, née à Repentigny en 1797 ayant habité St-Jacques de Montcalm était alors servante chez Barthélemy Joliette, lui-même marié depuis le 27 septembre 1813 à la seigneuresse de Lavaltrie. On comprend pourquoi le fondateur de Joliette ne fut pas heureux aux élections du comté de Leinster qui suivirent après cette histoire sensationnelle. L’enfant Jean-Baptiste mourut à l’âge de 6 mois et 19 jours à L’Assomption, le 1 er septembre 1816.
Barthélemy Joliette – Un itinéraire politique loyal par Pierre Desjardins
Avec son oncle J. E. Faribault il faisait partie des notables du bourg de l’Assomption; dans cet avis au public de 1817 ils annonçaient qu’ils feraient une demande au Parlement pour obtenir le privilège de construire un pont à péage sur la rivière de l’Assomption.
En mars 1820 B. Joliette remerciait les électeurs du comté de Leinster de l’avoir choisi comme leur représentant au Parlement Provincial.
Pourtant le journal de la chambre d’assemblée (p. 27) indique que pour l’élection de juin 1820 Barthélémy Joliette était officier rapporteur et que les députés élus ont été Jacques Lacombe et Michel Prévost.

Le 13 juillet 1820 Charles Barthélémy âgé de 6 ans est décédé à l’Assomption. Les époux Joliette n’ont pas eu d’autre enfant et on peut imaginer leur chagrin.
Les syndics de la paroisse St-Pierre du Portage (L’Assomption) en 1819 étaient Amable Archambault, Barthélémy Joliette, François Paschal Martel, Joseph Courtois, Jean Baptiste Laporte, Frédérick Amireau, Frédérick Forest, Jean Peltier, François Proulx fils, Edouard Amireau et François Gervais Archambault. Dans cet avis aux entrepreneurs pour la réédification du portail et des tours de l’église en 1822 ils demandaient de s’adresser à Barthélémy Joliette.
Le 29 octobre 1822 un comité du Comté de Leinster a été constitué pour s’opposer à des changements proposés à la constitution promulguée en 1791 par le roi George III. Charles de St-Ours, Joseph Ed. Faribault, Laurent Le Roux, Barthélémy Joliette, Charles P. Loedel, etc. formaient le comité en chef du Comté de Leinster.
Le 28 décembre 1822 tous les notables de l’Assomption ont conclu un marché avec Jean-Baptiste Desmaraitz pour la reconstruction du pont de l’Assomption emporté par les eaux en 1821. On remarque les noms des seigneurs de Lavaltrie, Pierre de Lanaudière, Barthélémy Joliette et Charles Peter Loedel parmi les nombreux contributeurs qui ont offert des terrains et des matériaux.
La construction de la nouvelle église de l’Assomption a été compliquée, il a fallu refaire certains travaux mal conçus. Les travaux ont commencé en 1819 et en 1823 les syndics dont B. Joliette poursuivaient George Fullum bourgeois et François Xavier Poitras armurier de Montréal.
Le 24 mars 1824 Joseph Edouard Faribault agissant comme juge de paix du bourg de L’Assomption recquiers les propriétaires du village de L’Assomption de s’assembler en la demeure de Louis Gonzague Nolin… pour procéder à la nomination de syndics pour la police pour se conformer à un acte passé par le Parlement. Les propriétaires ont unanimement élu syndics Laurent Leroux, Barthélémy Joliette, Amable Archambault, Benjamin Beaupré et Ls. Jos. Chs. Cazeneuve.
Barthélémy Joliette co-seigneur de Lavaltrie
Depuis 1812 le notaire Joseph-Edouard Faribault gérait la seigneurie de Lavaltrie. Charles Gaspard Tarieux Taillant de Lanaudière a rédigé son testament le 26 mai 1812 avant de décéder le 7 juin. Le 30 juin 1812 Louise Lacorne de Chapt veuve de Pierre Paul DeLavaltrie et sa fille Marie-Antoinette Marganne veuve de Charles DeLanaudière ont alors donné procuration au notaire de L’Assomption Joseph-Edouard Faribault pour gérer et administrer leurs biens.
La seigneuresse de Lavaltrie Suzanne (Marie?) Antoinette Marganne de Lavaltrie mère de Charlotte Joliette est décédée en 1822. Son fils Pierre-Paul de Lanaudière a hérité de la moitié de la seigneurie et ses deux filles d’un quart chacune. Barthélémy Joliette est devenu co-seigneur avec son beau-frère Peter-Charles Loedel époux de Marie-Antoinette.
À partir de 1822 les héritiers de la seigneurie de Lavaltrie ont administré leurs terres et fondé le village d’Industrie autour d’un ensemble de moulins très modernes construits sur la rivière de l’Assomption. Le commerce du bois a été leur principale occupation et j’ai déjà longuement documenté cette histoire dans une autre chronique.
Lire: Les moulins de l’Industrie au temps de Barthélémy Joliette
Dans les journaux de l’époque on trouve plusieurs poursuites intentées par les seigneurs contre des censitaires qui n’avaient pas payé leurs rentes seigneuriales depuis des années; ils ont fait de nombreuses transactions pour s’approprier les terres où ils ont établi leurs moulins pour pouvoir y bâtir un nouveau village.
En 1822, la situation financière de la seigneurie montre des arrérages qui nous apparaissent considérables: 370 censitaires doivent la somme de 79,801 livres tournois ou livres et ventes… Il [Joliette] gère si bien ses affaires qu’en novembre 1825, il peut déposer un bilan positif de son administration depuis mai 1822: 128,467 livres tournois de dépenses (comprenant le coût des moulins) contre une recette brute de 140,836 livres tournois. A ce bilan s’ajoute également une somme de 37,563 livres tournois représentant le bois de pin vendu à un marchand de Québec en 1825.
Jean-Claude Robert
Les moulins du village d’Industrie ont été construits en 1823 et au printemps 1824 les seigneurs ont annoncé leurs services dans les journaux: un moulin à farine, un moulin à barley, un moulin à scies, un moulin à cloux, un moulin à cardes neuf et un foulon. C’était un établissement industriel complet pour la fondation d’une ville centre dans un pays à coloniser.
Il n’y avait pas encore de maisons autour des moulins, Barthélémy Joliette a fait bâtir un bureau seigneurial. Le 11 novembre 1824 il a conclu un marché avec François Panneton pour la maçonnerie d’un bâtiment dans le village d’Industrie paroisse de St-Paul, le devis mentionne un four pour cuire 50 pains. Le 7 décembre un autre marché a été conclu avec François Papin pour la menuiserie. Ce devis montre bien qu’il s’agissait d’un magasin et d’un bureau pour la gestion de la seigneurie, le magasin devait être pareil à celui d’Amable Archambault marchand à L’Assomption.
La production de madriers de pin blanc a commencé et au printemps 1825 Joliette et Loedel annonçaient avoir 50.000 pieces white pine sandard deals à vendre au bout de l’île (Repentigny) ou St-Sulpice.
Le 9 décembre 1825 Pierre-Paul deLanaudière, Barthélémy Joliette et Peter-Charles Loedel ont signé un accord pour retirer et recevoir les cens et rentes et lots et ventes de la dite seigneurie de Lavaltrie et rente foncière des dits lots du Township de Kildare en la maison du dit Barthélémy Joliette située au village d’Industrie… Le même jour Pierre-Paul DeLanaudière propriétaire de la moitié de la seigneurie de Lavaltrie a signé une obligation à Barthélémy Joliette pour une somme de 38.500 livres ancien cours pour valeur reçu à sa satisfaction. Pierre-Paul a donné en garantie ses propriétés. En attendant qu’il paye le capital ou les intérêts B. Joliette avait le droit de percevoir la moitié des revenus du moulin à farine lui appartenant et le tiers des revenus du moulin à scie, à cardes, à fouler, à cloux, à bardeaux et à barley dans le moulin d’Industrie.
Pierre-Paul De Lanaudière était fortement endetté envers son beau-frère B. Joliette et il s’est peu investi dans la gestion des moulins de l’Industrie. La gestion de la seigneurie par Barthélémy Joliette était rentable mais elle était perçue par ses administrés comme très rigoureuse.
Lorsqu’en 1825, les seigneurs feront appel à l’évêque pour qu’il recommande au curé de Saint-Paul d’ordonner à ses paroissiens de faire moudre leur blé au moulin banal, le curé de Saint-Paul répondra à son évêque: « Sa gestion de la seigneurie qui ne tendoit rien moins qu’à ruiner ses tenanciers fait bien voir que ce n’est pas la miséricorde ni la compassion qui l’a arrêté. Mais voyant qu’il ne pouvait rien du côté de la loi il a recours à l’autorité de l’Eglise. » Ainsi, la seigneurie de Lavaltrie devient rentable à compter de 1825.
Jean-Claude Robert
En 1874 Joseph Bonin a publié les Biographies de l’Honorable Barthélemi Joliette et de M. le grand vicaire A. Manseau. Il rapporte que B. Joliette aurait fait un voyage aux États-Unis à la suite de la construction des moulins de l’Industrie avec son épouse, Paul De Lanaudière et le Dr. Henri Loedel, le père de son beau-frère.
La succession de la seigneuresse de Lavaltrie comprenait aussi une partie de la seigneurie de St-Vallier que Joliette et Loedel ont vendue. Vente par Barthélemy Joliette et Peter-Charles Loedel à Antoine-Ovide Tarieu de Lanaudière, Agathe Tarieu de Lanaudière et Charles Tarieu de Lanaudière le 25 décembre 1826.
Barthélémy Joliette a été nommé juge de paix en 1826 et c’est à lui qu’on devait s’adresser pour régler les différends. Les journaux publiaient régulièrement les nominations des officiers de milice. Le major Barthélémy Joliette a été nommé lieutenant colonel le 1er mars 1827. Pierre Paul de Lanaudière était major et Charles Loedel capitaine aide-major.

Le 10 mai 1829 Barthélémy Joliette a présidé une assemblée des habitants de la paroisse de St-Paul La Valtrie convoquée en la maison presbytériale et les syndics ont prévu d’engager un maître et une maîtresse d’école selon l’acte pour encourager l’éducation élémentaire.
Le 25 mai 1829 Barthélémy Joliette lieutenant colonel commandant du 2ème bataillon du Comté de Warwick époux de Charlotte DeLanaudière et Peter Charles Loedel major du bataillon époux de Marie Antoinette ainsi que Pierre Paul Tarrieux Taillant DeLanaudière propriétaires du fief et seigneurie de Lavaltrie en indivis ont prêté foi et hommage au gouverneur James Kempt représentant le Roi.

Les seigneurs de Lavaltrie ont aussi produit un aveu et dénombrement qui décrit précisément leur seigneurie. Il n’y avait que 4 habitations dans le village de Lavaltrie en 1829 et 13 à St-Paul. Dans le village d’Industrie il y en avait 27 sur la rue du Moulin d’Industrie, 2 sur la rue St-Charles, 7 sur la rue St-Pierre et 6 sur la rue St-Barthélémy; il restait encore 30 emplacements à concéder. La plupart des censitaires habitaient sur leurs lots en-dehors des villages. Les revenus du domaine seigneurial étaient de 6.000 livres tournois et ceux des moulins de 27.000 livres; il y avait aussi un moulin banal à Lavaltrie. Chaque censitaire payait aux seigneurs des cens, rentes et droits de mutation.
Les moulins du village d’Industrie attiraient l’attention des journalistes, c’étaient des bâtiments industriels ambitieux pour l’époque. Dans cet article le journaliste relevait la proximité du village de St-Paul où il y avait déjà une église ce qui allait certainement créer des tensions dans le futur.
Joliette et Loedel avaient entrepris de se faire construire chacun un manoir identique à côté de leurs moulins de l’Industrie. Le 25 décembre 1827 le manoir de Joliette presque terminé a entièrement brûlé. Il a été reconstruit l’année suivante et en 1829 les 2 manoirs étaient achevés. Cet article mentionne les travaux du canal des moulins taillé dans le galet qui ont coûté au moins 30.000 francs.
M. de Lanaudière n’a point de propriété dans les deux palais du village d’Industrie mais c’est un bruit qu’il est pour bâtir dans le même village une troisième maison semblable en tout à celles de ses deux beaux-frères; cette à cette raison qu’on attribue l’état de ruine dans lequel tombe le superbe Château de La Valtrie.
Lire: Les deux manoirs du village d’Industrie en 1826
L’extérieur a l’apparence d’une maison vraiment princière modelée, paraît-il, sur la résidence du comte Joseph Bonaparte à Philadelphie, États-Unis.
Ce plan du village d’Industrie en 1835 montre l’emplacement du moulin, des deux manoirs, les premières rues et maisons du village.
Barthélémy Joliette député du Comté de L’Assomption
En 1830 la milice du Comté de Warwick est devenue la milice du Comté de Berthier et le lieutenant colonel Barthélémy Joliette a été nommé au commandement du 2ème bataillon le 17 juin.
Le même jour Bmy. Joliette remerciait les électeurs du Comté de l’Assomption de l’avoir appelé unanimement à les représenter surtout qu’il n’avait nullement sollicité cet honneur.
Comme représentant des électeurs du Comté de l’Assomption Barthélémy Joliette a déposé de nombreuses requêtes à la chambre d’assemblée: pour l’établissement d’une cour de justice à L’Assomption, pour améliorer la navigation sur la rivière de l’Assomption, pour améliorer les chemins et bâtir des ponts, une maison d’école, un marché, etc.

L’Honorable Barthélémy Joliette au Conseil Législatif
En juin 1832 B. Joliette a dû abandonner son siège à la chambre d’assemblée après avoir été nommé au Conseil Législatif, une promotion très prestigieuse qui lui permettait de se faire appeler Honorable.
La même année son beau-frère Pierre-Paul DeLanaudière est décédé et B. Joliette a été nommé par sa veuve Véronique Gordon tuteur de ses enfants mineurs Charles Barthélémy âgé de 12 ans et Susanne Antoinette Almine 6 ans.
Bmy. Joliette a mis en location les propriétés du défunt seigneur, le manoir, la moitié du domaine de Lavaltrie et une île sur le fleuve St-Laurent.
Barthélémy Joliette semble avoir conservé sa maison de l’Assomption même si il s’était fait bâtir un palais au village d’Industrie. Le 8 juillet 1833 il a conclu un marché avec Joseph Guyon dit Lemoine maître-menuisier pour démolir sa maison de la rue St-Étienne à L’Assomption et reconstruire une nouvelle maison de 45 pieds par 27 pour 1.200 livres. Aimée Faribault dans un livre sur le patrimoine de l’Assomption intitulé Vieilles maisons, vieilles gens a écrit que la maison de la rue St-Étienne où B. Joliette avait installé son étude de notaire avait été achetée en 1824. Sa veuve l’a vendue à la famille Faribault après sa mort en 1850. Dans une autre maison située à côté et disparue en 1858, habitait la mère de B. Joliette, Marie-Catherine Faribault, qui à la mort de son mari Antoine Joliette s’était remariée avec monsieur Pétrimoulx, frère de deux prêtres récollets. Médard Pétrimoulx était le curé de L’Assomption. Madame Correz, la soeur de Barthélémy Joliette habitait avec sa mère.
À partir de sa nomination au Conseil Législatif Joliette a obtenu plusieurs commissions et il a débuté une brillante carrière à Québec à une époque où les tensions se sont faites de plus en plus vives entre le gouverneur et les députés du Bas-Canada. Les canadiens du parti patriote l’ont alors accusé d’être devenu Tory au service du gouverneur alors qu’il était plutôt libéral dans la chambre d’assemblée.
À l’exception de MM. Joliette et Quirouet tous les conseillers législatifs Canadiens et libéraux se sont abstenus de se rendre à l’appel nominal du conseil samedi dernier. Ils ont craint de se polluer sans doute en reparaissant dans une enceinte où l’on a passé des résolutions violentes et injurieuses contre leur pays et ses représentants.
Les 92 résolutions, adoptées le 21 février 1834 par les députés du Bas-Canada, sont la culmination de décennies de revendications menée par le Parti canadien puis par le Parti patriote. Rédigé en quelques nuits, essentiellement par Louis-Joseph Papineau, chef du Parti patriote et par Augustin-Nobert Morin, ce manifeste redéfinit la nature du débat démocratique au Bas-Canada et force chaque député à prendre position. Ses auteurs espèrent essentiellement obtenir les mêmes droits démocratiques que les citoyens anglais et cherchent à obtenir l’appui de députés britanniques à Londres pour leurs demandes. Leur refus par Londres et l’adoption des résolutions Russell déclenchent une suite d’événements qui mèneront aux Rébellions de 1837 et 1838.
92 résolutions
Le 17 mars 1834 La Minerve rapportait que les hon. MM. Joliette et Quirouet ont entré au journal leur protet contre ces Résolutions.
Barthélémy Joliette était devenu un vire-capot dénoncé par les journaux patriotes. Lorsque Mrs. Quirouette et Joliette étaient dans la chambre d’Assemblée ils votaient avec la majorité de ce corps; maintenant qu’ils sont dans le conseil ils votent avec la majorité de ce même corps qui est diamétralement opposé à la chambre d’Assemblée.
La crise constitutionnelle s’est poursuivie et amplifiée jusqu’à la première rébellion de 1837.
MM. Cuthbert, Grant, Bell, McGill, Viger, Sewell, Mofatt et Joliette appuyaient son Excellence.
James Cuthbert seigneur de Berthier siégeait aussi au Conseil législatif et il s’accordait avec B. Joliette. Le journal La Minerve rapportait le 23 janvier 1837 que pour les élections à Berthier ils se préparaient à faire élire un candidat de leur choix: on a été jusqu’à menacer les canadiens de faire venir des townships voisins les quelques orangistes qui s’y trouvent afin de gagner l’élection par la force.
La crue de printemps 1837 a été plus forte que d’ordinaire et 16.000 billots de bois de pin qui étaient retenus au boom des moulins de B. Joliette ont été emportés; les moulins auraient aussi été emportés si les chaînes ne s’étaient rompues.
Barthélémy Joliette pendant la crise de 1837-1838
Le Dictionnaire Biographique du Canada donne le compte-rendu le plus complet de l’activité de Barthélémy Joliette pendant les rébellions de 1837-1838 et par la suite mais il ne fait aucune mention des critiques dont il a fait l’objet comme vire-capot à la solde du gouverneur.
La carrière politique de Joliette est sans éclat. Conseiller législatif depuis 1832, il fait partie, à la suite de la suspension de la constitution en février 1838, du Conseil spécial. Au moment de la rébellion de 1837, il demeure fermement loyaliste en refusant d’appuyer le parti de Louis-Joseph Papineau et en s’opposant activement à toute tentative d’agitation dans sa région. En décembre 1837, il préside une assemblée de magistrats et d’officiers de milice de la région qui réaffirment leur loyauté au gouvernement. Plus tard, il agit directement, en qualité de juge de paix, et signe au moins un mandat d’arrêt, en janvier 1838. Il semble que Joliette ait été absent du Conseil spécial au moment du vote sur l’union du Haut et du Bas-Canada en 1839. Après la proclamation de l’Union, il retourne au Conseil législatif le 9 juin 1841. La même année, il appuie un amendement qui exprime des doutes sur la légitimité de l’Union. Il semble faire son travail de façon sérieuse, en pilotant des pétitions ou en préparant avec soin des adresses pour l’ensemble du conseil.
Barthélémy Joliette
Le 18 juin lors d’ une assemblée tenue à Berthier en présence de Joseph Papineau de nombres résolutions avaient été adoptées.

Le gouverneur Gosford réagit par sa proclamation du 15 juin interdisant les assemblées patriotes et ordonnant aux officiers de milice de s’y opposer. Les patriotes de Berthier n’en tinrent pas moins, en présence de Papineau, leur grande assemblée le 18 juin, plusieurs officiers de milice y participant activement. Pris de panique, James Cuthbert écrivit à Barthélemy Joliette le 27 juin pour lui proposer de «réhabiliter la réputation du comté d’une manière triomphante, par une franche et loyale adresse à sa Majesté». La réponse de Joliette témoigne d’un meilleur sens politique, disant que «j’ai retardé ma réponse afin de m’enquérir de l’opinion d’un grand nombre des plus honnêtes citoyens de ce comté sur le projet d’une adresse loyale à sa Majesté et après beaucoup d’informations, je me suis convaincu que dans l’état actuel de l’opinion publique…, je crois qu’il serait plus prudent dans les circonstances actuelles de différer l’adresses [sic].»
Barthélemy Joliette – Un itinéraire politique loyal par Pierre Desjardins
Pourtant peu après le gouverneur en chef a démis plusieurs officiers de la milice de leur commission pour désobéissance aux ordres du lieutenant colonel B. Joliette les intimant de prêter le serment d’allégeance à la nouvelle reine Victoria.
Le 24 septembre une assemblée patriote a été tenue à Lavaltrie en l’honneur du vénérable capitaine Latour et de tous les autres officiers de milice démis par l’administration tyrannique actuelle. Les docteurs Nelson et Voyer ont fait des discours.
Le journaliste anglophone du Vindicator dénonçait lui aussi Barthélémy Joliette autrefois un libéral devenu un Tory, un irresponsable Life Legislative Councillor et qui en sa qualité de Deputy Lieutenant to Gosford a démis 4 officiers de la milice.
Le 23 novembre la bataille de St-Denis a vu la victoire des patriotes sur l’armée régulière mais la répression s’est rapidement organisée et le 14 décembre à St-Eustache la révolte était réprimée. Le 11 décembre le journal Le Populaire rapportait qu’à une assemblée tenue en la chambre d’audience du village d’Industrie présidée par Barthélémy Joliette il a été résolu d’engager tous les habitants de rester tranquilles et paisibles dans leurs maisons, que tous les officiers de milices prendront et souscriront au serment d’allégeance envers la reine Victoria ce qui a été fait.
Le 6 décembre Jérémi Laporte, Michel Dufour dit Latour, Abraham Lesiège dit Lafontaine, François Martineau et Jean-Baptiste Peltier se sont déplacés chez Barthélémy Joliette pour lui exprimer leur attachement au Gouvernement de sa Majesté et prêter le serment d’allégeance; Pierre Dufour dit Latour était prêt à le faire lui aussi. Ils ont ajouté que c’était par erreur et non par déloyauté qu’ils avaient refusé de lire la proclamation du 15 juin à leur compagnie, ce qui avait été cause de leur destitution.
Il restait quelques contestataires qui ont été réprimés: mandat d’arrestation contre Pierre-Denis Normand, maître d’école, de Saint-Paul-de-Lavaltrie, signé Barthélemy Joliette, juge de paix, le 10 janvier 1838. Mal lui en prit cependant, car le jour même, l’huissier Antoine Peltier et son recors Bénoni Perrault furent incapables d’arrêter Normand que les gens réunis à l’auberge de Charles
Gougé protégèrent, menaçant physiquement Peltier et Perrault. (Pierre Desjardins)
Barthélémy Joliette avait été choisi par le gouverneur Gosford pour faire prêter le serment d’allégeance à tous les habitants de son district.
Nomination au Conseil Spécial
La constitution a été suspendue, l’assemblée législative dissoute et des mesures d’urgence ont été prises par le gouverneur qui a nommé un Conseil Spécial pour administrer le Bas-Canada. Dans le district de Montréal James Cuthbert, Joseph Edouard Faribault et Barthélémy Joliette ont été nommés au Conseil.
Le 20 avril 1838 James Cuthbert a été nommé président du Conseil Spécial formé de 22 conseillers, 11 français et 11 anglais. Les premières séances du Conseil Spécial se déroulaient en anglais et le journal Le Populaire rapporte que le 27 avril l’hon. De Rocheblave secondé par l’hon. Joliette ont déposé une motion pour que tous les procédés du conseil soient entrés sur les journaux dans les langues anglaises et françaises.
Dès le 15 février 1839, le président du Conseil, James Cuthbert, déposait une lettre de Barthélemy Joliette informant la Chambre qu’il s’excusait de devoir s’absenter pour cause de maladie. Il n’assista à aucune des séances de cette quatrième session pas plus qu’à celles de la cinquième. Ce n’est donc vraisemblablement pas par calcul politique ou par opposition qu’il ne participa pas au débat sur l’Union.
Barthélemy Joliette – Un itinéraire politique loyal par Pierre Desjardins
Lors du vote de l’union du Haut et du Bas Canada on ne trouve aucune mention du rôle de B. Joliette dans les journaux qui semble avoir été absent de la vie politique jusqu’en 1841. Pour l’élection de 1840 les électeurs du comté de Berthier ont choisi dans une assemblée de proposer l’honorable B. Joliette mais il ne s’est pas présenté.
L’élection a eu lieu en mars 1841 et le seigneur de Daillebout William Berczy s’est présenté dans le comté de Berthier contre le parti réformiste. Les journaux ont rapporté l’émeute qui a alors eu lieu à Ste-Élisabeth. M. Berczy est arrivé avec 60 irlandais au bureau de vote, les canadiens ont riposté et l’armée a été appelée de Sorel en renfort. Il y aurait eu un mort. Armstrong 378 voix, Berczy 370, le vote a été serré mais Armstrong l’a emporté.
Barthélemy Joliette avait sans succès tenté de faire élire William Berczy dans Berthier. Huit des conseillers législatifs nommés le 9 juin étaient des tories, ou conservateurs. Joliette était du nombre. (Pierre Desjardins)
Barthélémy Joliette ne s’était pas présenté à l’élection de Berthier, il avait préféré conserver son poste au Conseil législatif de la province où il a été de nouveau nommé en juin 1841. Le gouvernement s’était déplacé à Kingston.
Warden du district municipal de Berthier
En 1842 une première organisation des municipalités locales a été promulguée par le gouverneur Sydenham et Barthélémy Joliette a été nommé warden du district municipal de Berthier.
Les articles de journaux étaient parfois publiés en très petits caractères et en agrandissant les fichiers numérisés ils sont un peu flous et difficiles à lire. Celui-ci concerne les lois sur l’éducation et le financement des écoles. Petit Jean reproche à Barthélémy Joliette, James Cuthbert et Peter McGill d’avoir voté au Conseil législatif contre le bill d’éducation adopté à l’unanimité par la chambre d’assemblée. Il reproche aussi à B. Joliette de favoriser Ste-Elisabeth comme chef-lieu de la municipalité au détriment de St-Paul et Berthier, de vouloir construire une église au village d’Industrie alors qu’il y a déjà une paroisse à St-Paul, etc.
Barthélémy Joliette warden du district municipal de Berthier avait choisi d’établir le bureau de la municipalité à Ste-Elisabeth et de dilapider les deniers publics pour l’aménager: un cri universel d’indignation s’est élevé de toutes les parties du district, les membres du conseil municipal déclarant que le Syndic avait abusé de leur confiance.
L’église du village d’Industrie
La Gazette de Québec du 2 juillet 1842 rapportait la bénédiction de la première pierre d’une nouvelle église en construction au village d’Industrie.
Le journaliste racontait l’histoire de l’ermite qui avait habité autrefois à l’emplacement de l’église, il était apparenté aux familles Longueuil et de la Valtrie et avait dit un éternel adieu au monde. C’était un prophète puisqu’il avait prédit que ce lieu deviendrait célèbre. M. de la Valtrie payait un sauvage pour lui porter des provisions. La légende du village d’Industrie et de son destin particulier était en cours de construction.
En octobre 1842 l’église de St-Charles était bâtie, 110 pieds de long par 32 de haut et 30 de large. Le presbytère devait être terminé en mars et le seigneur bienfaiteur Barthélémy Joliette avait donné une ferme pour aider à la subsistance du curé avec une rente de 100 livres par an.
Le village d’Industrie contient 400 communiants. L’exploitation des bois, les moulins à carder, à fouler, etc, tout cela produit par le génie de M. Joliette doit faire surgir dans cette place une ville à l’avenir. Ce monsieur est comme le père nourricier de toute la population.
L’Honorable Joliette politicien contesté
Barthélémy Joliette n’était pas autant encensé par les habitants du district de Berthier. À une assemblée spontanée et volontaire des Conseillers Municipaux du district de Berthier tenue le 5 décembre 1842 à Ste-Elisabeth à laquelle assistèrent tous les conseillers excepté Barthélémy Joliette absent car il est notoirement connu qu’il ne représente pas les voeux et les désirs de ses constituants qui ont déjà désavoué ses actes, il a été résolu de s’opposer à la tyrannie de Barthélémy Joliette.
Barthélémy Joliette a répondu aux accusations portées contre lui dans le même journal.
Mrs. Bondy et Armstrong lui ont répondu en janvier 1843 dans La Minerve et la controverse s’est poursuivi. Les faits et gestes de B. Joliette étaient maintenant scrutés par les journalistes; en août 1843 ils lui reprochaient d’avoir fait croire qu’il avait financé les cloches de la nouvelle église du village d’Industrie alors qu’elles avaient été payées par B. Gaspard et Almézine DeLanaudière, enfants de Pierre-Paul décédé dont il était le tuteur légal et par son beau-frère P. C. Loedel.
L’Aurore des Canadas désignait MM. Caron et Joliette comme des ignorans canadiens que le gouverneur faisait asseoir à son côté à un dîner pour amadouer les canadiens et leur faire croire qu’ils avaient un gouvernement responsable: c’est par complaisance qu’on y tolère quelquefois l’usage de notre langue.
À Kingston en 1843 Barthélémy Joliette faisait du chantage pour tenter d’imposer son choix pour le chef-lieu judiciaire à Berthier, Ste-Elisabeth ou au village d’Industrie. Tout le monde à Kingston était indigné de cette conduite, et lorsqu’elle sera connue, il viendra de toutes parties du pays des échos qui ne seront rien moins qu’agréables pour les oreilles de cet honorable.
Quelques jours plus tard Barthélémy Joliette étant revenu à la raison les lois ont pu être votées ainsi que les subsides jusqu’en mars 1844.
Essor du village d’Industrie
En juillet 1844 L’Aurore des Canadas souligne les réalisations de l’Honorable Joliette, les moulins et le village d’Industrie, l’église, le marché et autres bâtisses à l’usage du public, le tout fait et conduit par le même Monsieur qui ne semble avoir d’autre plaisir au monde que celui de faire le bien public. On nous assure qu’il se propose de construire un collège et un couvent dans son village très prochainement.
Le village de l’Industrie était en plein essor et les journalistes en faisaient l’éloge dans de longs articles: 200 voitures au marché du samedi au village.
Les mérites de bienfaiteur de Barthélémy Joliette ont été reconnus par le pape Grégoire XVI qui lui a donné une très belle médaille en argent à son effigie pour le récompenser de la belle église qu’il a bâtie dans son village à ses frais et dépens.
En 1846 le collège Joliette a été construit dans la petite ville de St-Charles de l’Industrie et Mgr de Martyropolis en a fait l’ouverture. Le grand vicaire Manseau y surveillait l’enseignement dispensé par MM. Resther et Barrette en attendant qu’il soit confié aux élèves de St-Viateur.

L’augmentation de ce village, les progrès qui y ont lieu tous les jours vont rendre ce lieu un des plus célèbre du Canada; le moulin qui contient déjà huit moulanges va en recevoir quatre autres d’ici à l’hiver prochain. Dans quinze jours il y aura une fonderie en opération, c’est à cette fonderie qu’on va fondre les rouages d’un nouveau moulin et une cloche pour le collège…
Le chemin à rails du village d’Industrie
Le 1er février 1847 Barthélémy Joliette, Peter C. Loedel, Edward Scallon et Gaspard Delanaudière ont publié un avis public dans La Minerve pour annoncer qu’ils allaient présenter une application durant la prochaine session du Parlement Provincial pour obtenir un acte pour incorporer les signataires pour construire un chemin à rails dans les paroisses de Lavaltrie, St-Paul et St-Charles Borromée depuis le fleuve Saint-Laurent jusqu’à la rivière de l’Assomption en suivant la ligne qui sépare les seigneuries de Lavaltrie et de Lanoraye. Edward Scallon était un marchand de bois de plus en plus important dans le village d’Industrie, il a racheté la plupart des propriétés des seigneurs de Lavaltrie après le décès de B. Joliette en 1850.
Les rails devaient être construits en bois et la ligne devait longer la ligne de séparation des seigneuries de Lavaltrie et Lanoraie pour aboutir plus bas que le village de Lavaltrie à un endroit où le fleuve forme une anse propre à y construire des quais où pourront venir charger des vaisseaux d’un tonnage élevé.
Le tracé de la ligne a été modifié par la suite et le point d’arrivée sur le fleuve a été Lanoraie. Les habitants de Lavaltrie avaient pourtant offert gratuitement des portions de terres pour le passage de la ligne. L’Echo des Campagnes avait publié un long article pour présenter le projet en récapitulant les réalisations de B. Joliette dans le village d’Industrie,
L’article faisait encore l’éloge du village d’Industrie et de son fondateur Barthélémy Joliette en récapitulant toutes ses réalisations: les moulins, l’église, le collège, les 2 manoirs, une fabrique d’horloges, une tannerie, une fonderie, un marché, la diligence en été, etc.
La construction de rails en bois était beaucoup moins onéreuse que celle de rails en acier; elle était économique mais les rails devaient être remplacés plus souvent.
L’Hon. Ross Cuthbert seigneur de Dautray et Lanoraie a déposé une pétition le 5 juillet 1847 à la chambre d’assemblée pour la protection de ses droits au cas où la St. Lawrence and Industry Village Railroad traverserait les terres de sa seigneurie.
L’acte d’incorporation de la Compagnie du Chemin à Rails du St-Laurent et du village d’Industrie a été adopté le 28 juillet 1847. De nombreux autres investisseurs s’étaient joints aux seigneurs de Lavaltrie et Edward Scallon.
Le collège Joliette placé sous la direction des clercs de St-Viateur a annoncé le programme de son enseignement pour la rentrée 1847 dans de nombreux journaux.
À la séance du 9 septembre 1847 Barthélémy Joliette a été reçu membre honoraire de l’Institut Canadien de Montréal fondé en 1844; c’était avant qu’il ne soit interdit par les autorités ecclésiastiques.
En décembre 1847 le comité provisoire de la Compagnie du chemin à Rails du St-Laurent et du Village d’Industrie a annoncé qu’il avait ouvert 2 livres de souscriptions pour les investisseurs intéressés. Le comité était formé de Barthélémy Joliette, Peter Charles Loedel, Gaspard De Lanaudière et de Antoine Toussaint Voyer époux d’Angélique De Lanaudière, soit les seigneurs de Lavaltrie.
En janvier 1848 le père Lahaye directeur du Collège Joliette félicitait David M. Armstrong élu représentant du comté de Berthier et le remerciait pour l’intérêt qu’il portait au collège. Les journaux rapportaient régulièrement les pétitions déposées par les responsables du collège à la chambre d’assemblée pour l’octroi de subventions, l’appui d’un député pouvait être précieux.
Le chemin à rails a été construit en 1848 et 1849, des directeurs et des administrateurs ont été nommés. Barthélémy Joliette a été nommé président et directeur.
Le 28 avril 1848 vente par Edouard Scallon à Barthélémy Joliette de 35 actions de la compagnie pour 875 livres; ces actions faisaient partie d’un plus grand nombre d’actions que Scallon avait pris dans le fond de la compagnie le 24 décembre 1846 (des actions avaient donc été négociées avant l’annonce du projet dans les journaux). Il ne restera au dit Edouard Scallon que quinze actions dans le fond de la dite compagnie…
Le plan du tracé du chemin à rails a été déposé aux autorités législatives et les terrains ont été achetés pour faire passer la ligne.
Le 5 juin 1848 vente par Gaspard de Lanaudière à la Compagnie du Chemin à Rails du St-Laurent et du village d’Industrie du terrain destiné à la construction de la ligne et du terminus au village d’Industrie: un lopin de terre de 3 arpents et 40 perches en superficie à prendre sur la terre de G. de Lanaudière tenant en front à la rivière de L’Assomption, en profondeur à la ligne qui sépare les seigneuries de Lavaltrie et Lanoraye. Le 30 juin 1848 la vente des autres terrains pour la construction de la ligne a commencé. Le premier contrat enregistré chez J. O. Leblanc est celui de François Collin dit Laliberté cultivateur de St-Henry de Lanoraye, il y en a de nombreux autres.
Le journal La Minerve a publié de nombreux articles pour faire les louanges du système éducatif du Collège Joliette à L’Industrie, l’enseignement bilingue et technique semblait révolutionnaire.
À partir de décembre 1848 les seigneurs de Lavaltrie ont publié des annonces destinées aux capitalistes du Canada et des États-Unis d’Amérique pour qu’ils viennent investir leur argent au village d’Industrie relié au fleuve par un chemin à rails et où se trouvaient de nombreux pouvoirs d’eau.
Les clercs de St-Viateur qui avaient pris la direction du collège Joliette ont déposé des pétitions à la chambre d’assemblée pour être incorporés et pour obtenir une aide financière.
L’Honorable M. Joliette était toujours membre du gouvernement. En 1849 il s’occupait des bills du pont de l’Assomption et du notariat.
Le 28 août 1849 obligation de B. Joliette, P-C. Loedel et C. G. de Lanaudière envers la Compagnie du Chemin à Rails de Champlain et St-Laurent, les seigneurs de Lavaltrie avaient mis leurs moulins en garantie pour l’achat du matériel de cette autre compagnie dont une locomotive Dorchester, 12 wagons (chares) de 2ème classe et 1 de 1ère classe. Les seigneurs de Lavaltrie s’étaient durablement endettés pour la construction du chemin à rails.
Pierre Desjardins termine son étude sur Barthélémy Joliette en rapportant sa réconciliation avec Joseph Papineau de retour d’exil. Après les déchirements des années 1830 la vie continuait; au manoir de Ste-Mélanie aussi le seigneur William Berczy recevait les Viger et fréquentait ses neveux Lévesque qui avaient été patriotes en 1837-1838.
«Un de nos plus illustres patriotes de l’époque descendait à son manoir pour s’acquitter, de ce qu’il appelait, une réparation envers les devoirs de l’amitié… M. Joliette versait des larmes de bonheur en recevant dans ses bras ce vieil ami qui, après un long exil, rentrait dans la patrie qu’il avait conduite à l’abîme en voulant la sauver… Plus d’une fois, dans la suite, M. Papineau se donna la jouissance d’une visite aux aimables seigneurs du manoir de Joliette.»
Décès et succession de Barthélémy Joliette
Barthélémy Joliette siégeait au Parlement et il serait tombé malade lors de l’incendie du Parlement à Montréal le 25 avril 1849. Obligé de sortir rapidement par une fenêtre il aurait pris froid et ne s’en serait pas remis.
L’incendie de l’hôtel du Parlement à Montréal s’est produit le soir du 25 avril 1849 à Montréal, capitale de la colonie britannique du Canada-Uni depuis 1844. Inauguré le 24 juin 1845, l’édifice du marché Sainte-Anne qui loge le Parlement du Canada-Uni est incendié par des émeutiers anti-unioniste et des orangistes alors que les députés sont en session.
Incendie de l’hôtel du Parlement à Montréal
Se sentant proche de la fin Barthélémy Joliette s’est rendu avec son épouse Marie-Charlotte chez le notaire en février 1850 pour faire donation de l’église et du collège qui leur appartenaient personnellement à la Paroisse et aux Clercs de St-Viateur avec deux grandes terres à développer.
Ces deux beaux édifices ne coûtent pas moins que 170.000 francs y compris leurs ornements et les deux terres qui leur servent d’emplacement.
Le lendemain toute la famille seigneuriale se réunit pour applaudir, par un acte public et solennel, à la généreuse donation de M. et Mme. Joliette; et pour en donner une preuve non équivoque, M. G. de Lanaudière, M. et Mme. Loedel, M. et Mme. Voyer firent de bon coeur remise des droits d’indemnité qu’ils pouvaient exiger d’après la loi des mains-mortes.
Lire: Les donations des époux Joliette en 1850
Les 2 terres donnée par les époux Joliette se trouvaient en face de l’église et du collège. Elles vont ensuite être développées par le curé Manseau et les clercs de St-Viateur entre les rues Notre-Dame et Saint-Louis vers l’ouest pour devenir le centre de la ville de Joliette.
Le premier noyau d’agglomération se constitua autour du moulin. Le premier village ne dépassait pas la rue Notre-Dame. Barthélémy Joliette fit construire l’église et le collège aux limites du village (rue Saint-Charles). En plus de répondre à des services indispensables, il plantait un second pôle de peuplement, qui allait déplacer le centre du village et amener un important développement urbain. L’église, le presbytère et le Collège provoqueront un déplacement de la population vers le nord, sur la rue Saint-Charles (Chemin de Kildare).
Dans la suite, le lotissement de la terre de l’église et de la terre du Collège allait entraîner l’expansion du village vers le sud-ouest (chemin de Saint-Paul), tout en ménageant un magnifique espace rectangulaire (future place du Marché, Place Lavaltrie, puis Place Bourget), qui deviendra le coeur commercial de Joliette et à l’extrémité duquel s’édifiera bientôt le Palais de Justice en 1862.
Léo-Paul Hébert
Barthélémy Joliette a eu le temps de voir l’inauguration de son chemin à rails avant de mourir.
Barthélémy Joliette est décédé le 21 juin 1850. La presse a publié plusieurs éloges en son honneur. Le 26 juin le Conseil législatif dont il était membre lui a rendu hommage.
La presse anglophone a aussi souligné son décès en rappelant ses réalisations dans le village d’Industrie.
Le 27 juin à une assemblée générale des citoyens du village d’Industrie il a été décidé de prendre le deuil pendant un mois.

J’aurais pensé en faisant cette recherche trouver des éloges funèbres nombreux et longuement documentés dans la presse à l’occasion de son décès mais ils sont finalement peu nombreux. Dans le journal L’Avenir du 9 août 1850 un long article occupe la moitié de la première page, c’est le seul que j’ai trouvé.
C’est un hommage aux nombreuses réalisations de Barthélémy Joliette. Le journaliste a aussi fait un résumé de sa carrière politique. Commissaire pour la décision sommaire des petites causes dans sa paroisse en 1826, il fit partie de la municipalité du comté de Berthier en 1842 et 1844, il fut promu au grade de lieutenant-colonel du 2ème bataillon du comté de Berthier en 1846. [En réalité c’est en 1827 qu’il a été promu lieutenant-colonel]
Comme homme politique, M. Joliette n’a jamais été fort remarquable, si ce n’est par la défaveur ou du moins la froideur qu’il s’attira dès ses premiers pas dans le monde politique, en acceptant une place dans le conseil législatif du Bas-Canada, en 1822 [plutôt en 1832].
La suite est encore inexacte puisque c’est en 1815 que B. Joliette a contesté l’élection du comté de Leinster à Jacques Lacombe et non pas vers 1826 ou 1828.
Pas plus depuis qu’avant l’union, M. Joliette n’a jamais été homme de parti; toujours indépendant, prêt à accepter le bien et à rejeter le mal de quelque main qu’ils vinssent, il a toujours vécu dans une espèce d’isolement politique, à l’abri des haines et des faveurs des partis.
Un jeune homme qui fut personnellement l’objet de sa bienfaisance a composé ce poème au sujet de la mort de l’Honorable Barthélémy Joliette:
Un mois après son décès un portrait de Barthélémy Joliette a été publié à partir de daguerréotypes appartenant à Mme Joliette; M. M. Desnoyers les a mis en vente à prix modique et a publié des annonces dans de nombreux journaux pour les publiciser.
À son décès Barthélémy Joliette a laissé des dettes très imposantes à sa succession. Il administrait la seigneurie de Lavaltrie au nom des autres propriétaires sans leur rendre de comptes et il les avait beaucoup endettés pour la construction de son chemin à rails.
Le 21 août 1850 son testament a été déposé par sa veuve Charlotte Tarrieux Taillant DeLanaudière chez le notaire J. O. Leblanc; le testament est daté du 3 août 1814. Le 30 août 1852 les seigneurs de Lavaltrie ont signé un compromis pour régler la succession et faire cesser l’indivis d’une partie des biens seigneuriaux. Ils ont choisi comme arbitres George Weekes notaire de Montréal et William Berczy écuyer de la paroisse de Ste-Mélanie. Les quatre parts de la seigneurie appartenaient à Dame Charlotte Tarrieux Taillant DeLanaudière veuve de B. Joliette, Antoinette DeLanaudière épouse de Peter-Charles Loedel, Charles Barthélémy Gaspard DeLanaudière et Marie-Angélique DeLanaudière épouse d’Antoine Toussaint Voyer.
Le 18 juin 1851 Gaspard de Lanaudière a transporté à dame Charlotte de Lanaudière veuve Joliette sa tante toutes dettes tant en capitaux qu’en intérêts, fruits et revenus d’immeubles, arrérages de cens et rentes et autres droits seigneuriaux dûs par le feu Barthélémy Joliette jusqu’au jour de son décès et maintenant par sa succession lui appartenant. Il cède et transporte tous droits et actions qu’il peut avoir contre la succession résultant de la gestion et administration de Barthélémy Joliette qui était son tuteur quand il était mineur et qui n’en a jamais rendu compte. Madame Joliette devait en échange acquitter des dettes à Laurent Leroux, à la Compagnie à Rails de Champlain et du St-Laurent, à Edward Scallon, rembourser des billets à monsieur Arpin, à MM. Henderson, etc.
Le 18 mai 1853 Charles Gougé maître scieur et Alexis Desmarais père menuisier et charpentier du village d’Industrie avaient été désignés par Denis Emery Papineau pour expertiser et évaluer les propriétés en litige et ils ont remis leur rapport qui décrit toutes les propriétés de la succession.
Lire: La succession de Barthélémy Joliette
Pour le centenaire du village d’Industrie en 1923 de nombreux articles ont été publiés.
Texte toujours bien documenté et très intéressant. Mais vous égratigner la mémoire d’un monument de Joliette. Cependant il faut toujours mettre les choses en perspective et il y a souvent un côté plus sombre d’un grand personnage. On savait que Joliette n’était pas l’ami des Patriotes. J’aimerais que vous puissiez peut-être fouiller davantage la poursuite contre B. Joliette qui avait été accusé en 1816 d’avoir agressé et mis enceinte sa servante Marie-Ursule Mousseau alors que l’enfant Jean-Baptiste fut inscrit dans les registres de l’Assomption comme de père et de mère inconnus. Un article publié en 2011 dans les Mémoires de la SGC-F raconte cette histoire mais on ne sait pas comment cela s’est terminé mais le décès de l’enfant 6 mois plus tard a certainement facilité les choses. J’ai parlé de cet événement dans mon livre sur Les vieilles familles de Lavaltrie alors que presque tous les biographies de Joliette sont silencieux.
Je vous remercie de m’avoir signalé cet épisode de la vie de B. Joliette. Une recherche m’a permis de découvrir l’article Barthélemy Joliette – Un itinéraire politique loyal de Pierre Desjardins qui donne les mêmes détails et plusieurs autres éléments de la biographie de Joliette que j’ai ajoutés à cette chronique. Voici ce qu’il a écrit à propos de Marie-Ursule Mousseau:
En effet, dans un numéro de 1964 du journal Le Portage de L’Assomption, on pouvait lire qu’on vient de découvrir à Montréal les pièces d’un procès intenté à Barthélemy Joliette pour séduction d’une mineure à L’Assomption… Nous possédons au Portage une photocopie de tous les documents de ce procès qui ne connut guère de publicité à l’époque et on comprend pourquoi.
Je ne sais pas à qui il faudrait s’adresser pour consulter ces documents!