Christian Roy dans son Histoire de Repentigny (1995) a raconté l’histoire des 3 moulins à vent de la ville de Repentigny mais les moulins de Lachenaie, Legardeur et Charlemagne sont moins bien documentés. Comme il était impossible de construire des moulins à eau sur le fleuve Saint-Laurent et la rivière de l’Assomption ce sont des moulins à vent puis à vapeur qui ont permis le développement de ces territoires.
Le moulin seigneurial de Repentigny
La construction d’un moulin banal pour moudre la farine faisait partie des devoirs des seigneurs féodaux.
Dès 1673, le fondateur de Repentigny s’était conformé à cette coutume féodale en faisant construire dans son domaine un moulin à farine mû par le vent et nous savons que Nicolas Auvray fut son premier meunier. Nous savons aussi que ce moulin existait encore en 1677. Mais par la suite, chose étonnante, on ne mentionne nulle part son existence ni, d’ailleurs, l’existence d’aucun autre moulin à vent dans toute l’étendue de la seigneurie de Repentigny.
Christian Roy – Page 29
Pierre Legardeur de Repentigny est décédé en 1648 et en 1670 son fils Jean-Baptiste a vendu une grande partie de la seigneurie à Charles Aubert de Lachenaie. Il avait conservé la pointe située entre le St-Laurent et la rivière l’Assomption où il a fait construire un moulin en 1671 mais les guerres iroquoises n’étaient pas terminées et le moulin a été abandonné.
Les travaux débutent à l’hiver 1671, mais étant donné que l’ouvrage est construit en bois et situé très près du fleuve, les éléments ont tôt fait de nuire au moulin. D’ailleurs, il n’apparaît plus dans l’inventaire réalisé en 1681.
Patrimoine de Repentigny
Le territoire de Repentigny s’ouvre à l’ère seigneuriale dès 1647 lorsqu’il est concédé à Pierre Legardeur de Repentigny qui décède avant d’en prendre possession. En 1670, son fils, Jean-Baptiste, vint s’y établir et fit bâtir son manoir ainsi qu’un moulin à vent près du pont Le Gardeur. Il concéda les premières terres et vendit à Charles Aubert de La Chesnaye – important homme d’affaires de la Nouvelle-France, la plus grande partie de la Seigneurie, soit tout le territoire situé au nord de la rivière de l’Assomption, qui devint la Seigneurie de Lachenaie. Celle- ci sera à nouveau réunie au patrimoine des Legardeur en 1715 par le petit-fils et homonyme de Pierre Legardeur, sur l’initiative de son épouse Agathe de St-Père, une des premières femmes d’affaires de la Nouvelle-France.
Patrimoine de Repentigny
Le moulin à vent de Repentigny est dessiné sur une carte servant d’image de fond à cet article.

En 1722 Pierre Legardeur de Repentigny et Pierre Margane de Lavaltrie ont contesté le bornage de leurs seigneuries fait par les seigneurs de St-Sulpice. Dans la requête déposée par Pierre Legardeur il demande à l’Intendant de faire enlever un moulin construit illégalement sur un ruisseau à la limite de sa seigneurie et de celle de St-Sulpice:
Le moulin seigneurial de Lachenaie
Dans Histoire de St-Paul L’Ermite – Legardeur Christian Roy et Onil Therrien ont écrit que Charles Aubert sieur de Lachenaie a fait construire un moulin à vent vers 1673 à Lachenaie, soit la même année que celui de Repentigny. En 1681 le meunier était Mathurin La Vallée. En 1695 René Goulet locataire de la seigneurie a fait réparer le rouet du moulin à farine.
En 1715 le seigneur Pierre Legardeur de Repentigny petit-fils du premier seigneur était devenu seigneur de Lachenaie. La plus ancienne carte montrant le moulin à vent de Lachenaie date de la Conquête en 1761.

En 1670, la plus grande part de la seigneurie de Repentigny est achetée par Charles Aubert de La Chesnaye et renommée en son nom. Celui-ci établit le domaine seigneurial sur un emplacement de terre adjacent à la la rivière des Mille Îles et qui forme aujourd’hui la partie sud des lots originaires 66, 67, 68, 69 et 71. Le manoir seigneurial, un moulin à vent destiné à moudre de la farine (possiblement situé à l’emplacement du lot 67, en bordure immédiate de la rivière) ainsi que divers bâtiments sont érigés entre 1673 et 1676…
La Chesnaye s’en départit [de la seigneurie] en 1700. Pierre Legardeur de Repentigny acquiert le domaine quinze ans plus tard et fait reconstruire le moulin en maçonnerie de pierre. À ce moment, la plupart des bâtiments du domaine seigneurial sont en ruines; ils sont vraisemblablement abandonnés. En 1724, on retrouve sur le site le moulin, une maison et une grange. Les activités meunières se poursuivent jusqu’à la fin du 18e siècle et le site est depuis exploité en tant que terre agricole.
Site historique et archéologique du domaine seigneurial de Lachenaie
Les recherches et les transcriptions d’actes notariés faites par Jules Guérard permettent de documenter en détail l’histoire du moulin construit dans la seigneurie de Lachenaie qui n’était pas très éloigné de la future ville de Repentigny. Il y avait aussi un moulin à vent à St-Sulpice pour desservir les premiers habitants de Repentigny.
Le 15 mai 1710 – Marché de livraison de pierres pour la construction d’un moulin dans la seigneurie de Lachenaie entre Jacques Barbel notaire royal et Jacques Chevalier. (Notaire Michel Lepailleur de Laferté)
…charroyer pour ledi sieur Barbel au dit nom toutte la pierre generallement quelconques qu il conviendra pour la construction d une tour de moulin que ledi sieur Barbel fait batir sur la seigneurie de Lachesnaye a haute eau au pied du moulin de la ditte seigneurie dans laquelle pierre est comprise les pierre de parements pour les portes fenestres et cheminé de laditte tour, et pour laquelle pierre charroyer ledit Chevallier la fournira et d’hommes pour luy ayder et de batteaux ou canots et prendre laditte pierre dans toutte estendue de laditte seigneurie sans cependant qu il soit obligé d’aller plus loin que l isle Bourdon, appartenante a monsieur de Repentigny…
Le 24 juillet 1715 – Marché de construction d’un moulin dans la seigneurie de Lachenaie entre Pierre Legardeur de Repentigny, seigneur de Lachenaie et Léonard Paillé dit Paillard, maître charpentier. (Notaire Michel Lepailleur de Laferté, no-2083)
…ledi sieur Paillé a promis et s oblige de démonter les meules et lits du moulin de ladite seigneurie de Lachenaye bien et deuement soit ladite meule d’une piece ou autreman et ledi lit par morceaux les remettre placer et remonter dans la tour de pierre neufve qui a este nouvellement construite proche l ancienne de bois…
Le 26 novembre 1715 – Bail à ferme du moulin de la seigneurie de Lachenaie; par Pierre Legardeur de Repentigny, écuyer, capitaine d’une compagnie des troupes du détachement de la Marine et seigneur de Lachenaie et Agathe Saint-Père, son épouse, à Pierre Bertrand, maître farinier, de la ville de Villemarie. (Notaire Michel Lepailleur de Laferté, no-2181)
Le 14 octobre 1716 – Bail à ferme entre André Bouteillier, maître farinier et le sieur de Repentigny, seigneur de Lachenaie. (Notaire Michel LePailleur de Laferté, no-2450)
…mondit sieur de Repentigny a bailler a ferme et promet faire jouir pendant trois années entier et consecutives, au dit Bouteiller ce acceptant le moulin a vent banal de Lachenaye avec la tour de pierre faisant de bled farine garny de ses meules volants tournants et travaillants et ustanciles propres audi moulin…
Ces actes notariés n’ont pas été numérisés par la BANQ; le suivant est une obligation du 25 juin 1733 de Jacques Robin, meunier à Pierre Legardeur de Repentigny qui montre à quoi ils ressemblaient et le difficile travail de transcription fait par J. Guérard.
Le 23 novembre 1733 – Bail à loyer et ferme d’un moulin à vent dans le domaine de la seigneurie de Lachenaie; par Pierre Legardeur de Repentigny, écuyer, seigneur de Lachenaie et capitaine d’une compagnie des troupes de la Marine, de Montréal, à François Simon dit Delorme, habitant, de Terrebonne. (Notaire Charles-René Gaudron de Chevremont, no-90)
Le 12 décembre 1737 – Bail à loyer d’un moulin à vent situé sur la seigneurie de Lachenaie; par Charles Héry, fondé de procuration d’Agathe Saint-Père, veuve de Pierre Legardeur de Repentigny, écuyer, capitaine d’infanterie et seigneur de Lachenaie, à Jean Guillaume dit Derabine, maître farinier. (Notaire François Lepailleur de Laferté)
Le 15 février 1740 – Convention entre Marguerite Legardeur de Repentigny, de Quebec, et Marie-Catherine Legardeur de Repentigny, de Montreal, se faisant fort pour Agathe St-Père, veuve de Pierre Legardeur; et Jean Guillaume dit Desrabinne, farinier, de Lachenaie. (Notaire François Simonnet, no-22)
Le 17 juin 1750 – Bail à loyer d’un moulin et d’une terre situés à Lachenaie; par Pierre Legardeur de Repentigny, lieutenant des troupes, de la ville de Montréal, rue Saint-Paul, à François Gosselin, de Lachenaie. (Notaire Jean-Henri Bouron, no-59)
Le 19 juin 1750 – Vente de parts dans un moulin situé à Lachenaie; par Marguerite Legardeur de Repentigny, veuve de Jean-Baptiste de Saint-Ours-Deschaillons, écuyer, lieutenant du Roi des ville et gouvernement de Québec et chevalier de l’Ordre royal et militaire de Saint-Louis, et Marie-Catherine Legardeur de Repentigny, de la ville de Montréal, rue Saint-Paul, faisant tant pour elle que pour Louis Legardeur de Repentigny, chevalier et enseigne d’infanterie, Daniel Legardeur de Repentigny, officier d’infanterie, de la ville de Leoganne, île et côte Saint-Domingue, et pour François Legardeur de Repentigny, officier des vaisseaux de sa Majesté, à Pierre Legardeur de Repentigny, lieutenant des troupes , de la ville de Montréal, rue Saint-Paul. (Notaire Jean-Henri Bouron, no-62)
Le 12 mai 1753 – Bail à loyer d’un moulin situé à Lachenaie; par Pierre Legardeur de Repentigny, capitaine d’infanterie du détachement de la Marine, de la ville de Montréal, rue Saint-Paul, à Jean-Baptiste Gibeault, demeurant hors de la ville de Montréal, faubourg de Lachine. (Notaire Jean-Henri Bouron, no-130)
Jean-Baptiste Le Gardeur de Repentigny avait établi un domaine seigneurial avec un moulin à scie sur la rivière Mascouche vers 1700 que j’ai documenté dans une autre chronique.
Le 1er juillet 1755 – Marché de réparation d’un moulin à scie situé sur la rivière Mascouche entre Pierre Couturier, maître charpentier, de la Mascouche, et Pierre Legardeur de Repentigny, écuyer, capitaine d’infanterie et seigneur de Repentigny et Catherine de Noyan, son épouse. (Notaire Pierre Panet de Méru, no-48)
Le 13 octobre 1763 – Bail à ferme et loyer d’un moulin à vent situé à Lachenaie; par Louis Normandin dit Lamothe, major des milices, de Lachenaie, en vertu du pouvoir donné par Pierre Legardeur de Repentigny, écuyer et seigneur primitif de Lachenaie, à François Delisle, farinier. (Notaire Charles-François Coron, no-3971)
À la conquête les seigneurs Legardeur ont quitté le Canada, la seigneurie de Lachenaie a été vendue à Marie-Madeleine Chaussegros de Léry puis au colonel Gabriel Christie. On ne trouve plus d’information sur le moulin à vent de Lachenaie qui semble avoir été remplacé par celui de Mascouche..
Les droits de moûture du moulin banal réprésentaient une part importante des revenus de la seigneurie: 516 minots et demi de froment à 3 livres chaque pour un total de 1.549 livres et 10 chelins. Il y a un moulin à vent sur la devanture de la seigneurie dont le revenu n’est point porté au compte ci-dessus. L’annonce mentionne le moulin à scie de Mascouche mais pas d’autre moulin à farine, on se demande donc d’où provenaient ces minots de froment ?
En 1761 à la Conquête l’atlas Murray recense 122 familles dans la paroisse de Repentigny avec 149 hommes pouvant porter des armes. La famille de Repentigny possédait la seigneurie.

La paroisse de Lachenaie comptait 167 familes et 195 hommes capable de prendre les armes. Trois quarts de la seigneurie appartenait à Monsieur Legardeur de Repentigny et un quart à Monsieur de St-Ours de Chaillon. La paroisse comprenait aussi une petite seigneurie nommée Mascouche.

En 1785 lors de la vente par Gabriel Christie à Jacob Jordan de la seigneurie de Lachenaie le contrat précisait: 2.300 livres pour les moulins à eau, à scie, maison de pierre, maison de pièces sur pièces, autres maisons et bâtiments construits à Mascouche, moulin à vent et maison du meunier à la Chenaye…
Sur cette carte datée de 1793 le moulin à vent de Lachenaie a été dessiné face à la pointe de l’Île Jésus. Il n’y a pas d’autre moulin à Repentigny jusqu’à l’église.

Thomas Porteous avait acheté l’île Bourdon de Bonaventure Panet et Marguerite Dunière son épouse le 20 octobre 1804. Le 12 octobre 1811 Thomas Porteous marchand de Terre-bonne a fait bail pour 8 années et demi à Thomas Stebbins laboureur de l’Isle Bourdon située en la rivière des Prairies acquise de Bonaventure Panet avec une maison en bois de 2 étages, une grange… et une latrine. Le bailleur avait le droit d’utiliser les bacs et canots servant à la traverse de l’île de Mont-real à la chenaie et à Repentigny.
Item la juste moitié du produit en argent des dites traverses de bacs et canots payable au bout de chaque semaine écoulée… en observant que le dit preneur sera tenu et obligé de traverser tous les passagers qui s’y présenteront avec ponctualité et de se joindre autant d’hommes qu’il sera jugé nécessaire afin que le public ne soit pas retardé dans sa course.
Le 23 juin 1812 Thomas Porteous a demandé à Monsieur Legrand voyer de Lachenaie de modifier le tracé du chemin Royal de Lachenaie près de l’île Bourdon et d’y construire un pont. L’acte notarié précise les habitants qui doivent être assujetis à la construction de la route et du pont à Lachenaie et Repentigny. Le 20 juillet 1814 Thomas Porteous a nommé Thomas Stebbins son agent pour la traverse.
Des moulins à farine pas banaux
Or, voici que soudainement, entre 1816 et 1823, grâce à l’initiative privée, surgissent à Repentigny trois moulins flambants neufs! (Christian Roy)
Pendant le régime seigneurial le droit de moudre le grain était un privilège banal réservé au seigneur qui en tirait une partie de ses revenus. Dans toute la documentation qui suit personne ne semble avoir réfléchi à ce problème. Le 17 décembre 1828 le seigneur Charles de St-Ours dans la seigneurie voisine avait déposé un protest contre Louis Dufresne et son fils Joseph demeurant à St-Roch pour avoir fait construire dans un moulin à scie un moulin ou moulange pour faire la farine en contravention avec le droit de banalité lui appartenant; il a fait démolir le moulin.
Un plan de Repentigny a été tracé par l’arpenteur Laurent Dorval vers 1840; en agrandissant l’image on voit les emplacements d’au moins 4 moulins, ceux de Benj. Rivet, Ls. Charbonneau, Frs. Grenier et Ls. Morin. Ils sont tous situés dans le même secteur et les numéros des terres ne correspondent pas à ceux donnés par Christian Roy; les noms des propriétaires non plus.
Ces moulins à farine ont tous été construits avant l’abolition du régime seigneurial en 1854 et leurs propriétaires les ont construits avec l’approbation du seigneur de Repentigny; ou alors le seigneur ne s’occupait pas du tout de sa seigneurie et chacun agissait à son gré.
Le moulin à vent pour la farine de Joseph Noël
Le 26 août 1816 – Vente par Louis Provost, cultivateur à Repentigny, et Marguerite Chevalier, son épouse, d’un terrain situé sur sa terre, à Pierre Amiot, écuyer, capitaine de milice à Verchères. (Notaire Pierre-Gédéon Vallée, no-2485)
Le 26 août 1816, Pierre Amyot, capitaine de milice de Verchères, achète de Louis Provost de la terre 29 un emplacement d’un arpent carré pour y construire un moulin à farine. Provost s’engage à fournir la pierre aux maçons pour le 1er mai 1817, ce qui fut fait (Christian Roy). En fait l’acte notarié ne contient pas ces informations, il mentionne juste la vente d’un terrain selon la transcription de Jules Guérard.
Le 15 mars 1821 – Vente d’un terrain sur lequel est construit un moulin à vent par Pierre Amiot, capitaine de milice, demeurant à Verchères, à Joseph Noël, fils maître meunier, demeurant à Verchères. (Notaire Pierre-Gédéon Vallée, no-3212)
un arpent de terre de front environ sur un arpent de profondeur par un bout au nord-est et du coté du sud-ouest environ un demi arpent de profondeur enclavé dans la terre de Louis Provot scis et scituée en la seigneurie de Repentigny… sur lequel terrain sus vendus se trouvent erigé une maison de pièce sur pièce un moulin a vent fesant de bled farine et autres batiments veut en outre ledit vendeur aux dits acquereur tous les ustencils et bluteau qui sont actuellement au dit moulin…
26 mars 1828 – Action ex vendito pour un lopin de terre contenant une maison, un moulin à vent et autres bâtiments. BAnQ / TL19,S4,SS1 / No-1309
…sur lequel terrain sus vendu se trouve erigée une maison de piéce sur piece, un moulin à vent fesant de bled farine et autres batimens que par le même acte le dit demandeur auroit vendu au defenseur tous les ustenciles et le bluteau…
Le 8 juin 1830 Joseph Noël fils meunier de Repentigny a rédigé son testament léguant tous ses biens à Nicolas Thouin; le 12 juillet 1830 il a révoqué son testament. Le 13 juillet 1830 il a fait Cession à Narcisse Dupuis: Joseph Noël maître-farinier et propiétaire d’un moulin faisant le bled farine et tournant par le vent, demeurant paroisse de Repentigny a cédé 3 lopins de terre situés dans l’île Bouchard à Narcisse Dupuis.
Le 22 février 1831 nouvelle Cession par Joseph Noël à Narcisse Dupuis: Joseph Noël meunier de Repentigny a cédé à Narcisse Dupuis garçon majeur demeurant avec lui un emplacement où résident les parties enclavé dans la terre de Louis Provost sur lequel sont construits une maison, étable, hangard, laitrie et un moulin à vent avec des animaux de ferme, des meubles et des outils en échange d’une rente viagère annuelle en nature: 100 minots de blé, 200 livres de lard, 20 livres de fromage d’Angleterre, 8 veltes de bon rhum, 4 veltes de vin rouge, …une fille pour le servir, etc. N. Dupuis s’engageait aussi à payer une dette à Pierre Amiot de Verchères d’environ 1.000 à 1.500 livres.
Le 1er juillet 1831 Narcisse Dupuis et Joseph Noël tous les 2 fariniers ont résilié l’acte de cession du 22 février.
7 juin 1836 – Vente par Joseph Noël à Charles Rivet; la cession à Narcisse Dupuis avait été annulée et Joseph Noël maître-meunier a revendu à Charles Rivet cultivateur de Repentigny un lot de terre de 1 arpent par 1 arpent au nord-est et 1 arpent par ½ arpent au sud-ouest enclavé dans la terre de Louis Provost où se trouve construit un moulin à vent faisant du blé farine, une maison, une écurie et autres bâtisses pour la somme de 2.500 livres servant à régler des dettes: 620 livres pour arrérages de lods et rentes à la seigneurie de Repentigny et 1.858 livres à Pierre Amiot en vertu d’un mandat de saisie datée du 27 mai. Une somme de 21 livres et 10 sols revenait au vendeur.
Le moulin a ensuite appartenu à la famille Rivet puis le 1er juin 1871 Benjamin Rivet et femme l’ont vendu à Hilaire Provost: Benjamin Rivet boucher de Repentigny et sa femme Adelaïde Grenier ont vendu l’emplacement enclavé dans la terre 29 appartenant à Hilaire Provost cultivateur avec une maison, un moulin à vent et autres bâtisses pour 275 piastres.
Du moulin de Joseph Noël il ne reste plus qu’un tas de pierres et c’est bien dommage! (Christian Roy)
Le moulin à vent Grenier pour la farine
Le moulin Grenier existe toujours, on en a donc des photos montrant l’aspect de ces 3 moulins à vent construits au bord du fleuve St-Laurent au début du XIXe siècle. Son histoire est étroitement reliée à cele du moulin de Joseph Noël.
François Grenier fils d’Étienne s’est marié à Repentigny le 20 février 1797 à Thérèse Provost… Il était donc le beau-frère de Louis Provost de la terre 29. C’est lui qui, en 1820, fit construire pour son fils François Grenier le moulin à vent que l’on retrouve encore sur le lot 31, entre la rue Notre-Dame et le fleuve. (Christian Roy)
L’auteur rapporte ensuite un acte notarié que je n’ai pas retrouvé dans le greffe numérisé par la BANQ du notaire Louis Raymond:
Devant Raymond le 2 août 1822, François Grenier marié à Thérèse Provost donne à son fils François marié à Adélaïde Piché: … un compot de terre où se trouve un moulin à vent qui sera la propriété du donataire… terrain qui se trouvera depuis le sud du chemin du Roy actuel, à gagner le fleuve St-Laurent, lequel terrain aura pour largeur ce qui se trouvera à prendre de la ligne entre lesdits donateurs et Louis Provost (terre 29)…
Vers 1820, François Grenier (père) demande à François Fontaine de construire ce moulin. Quelques années plus tard, il l’aurait offert à son fils, également nommé François Grenier, afin qu’il puisse s’établir et se marier. Le fils de ce dernier, meunier à son tour, l’exploite jusqu’à sa mort, survenue en 1882. En 1931, Barnabé Lebeau acquiert le moulin et le restaure en 1935-1936. Profitant de la vague de tourisme que connaît le Québec d’avant-guerre, il en fait une attraction touristique. En 1961, il réalise d’autres travaux sur le moulin et lotit la terre à des fins résidentielles. Par la suite, il est vendu et utilisé comme boutique d’artisanat… La forme massive de sa tour cylindrique en maçonnerie en pierre, son toit conique, ses trois niveaux, ses deux portes diamétralement opposées au rez-de-chaussée et les vestiges de sa queue (une longue tige oblique utilisée pour faire pivoter le toit afin d’orienter les ailes en direction du vent) forment des composantes exemplaires de ce type d’appareil. Même s’il ne possède plus ses ailes, l’arbre (le madrier horizontal supportant autrefois les ailes) situé au centre du pignon placé à la base du toit ainsi que son mécanisme intérieur témoignent de son fonctionnement.
Répertoire du patrimoine culturel du Québec
Le moulin Grenier se situait entre le moulin Jetté et le moulin Galarneau. Il est érigé sur l’ancien lot numéro 31 traversé par le Chemin du Roy. Le 17 juillet 1820, François Grenier père vend une petite partie de son terrain à son fils du même nom, associé avec Joseph Noël fils, un meunier de Verchères. François Fontaine est chargé des travaux de construction d’un moulin qui coûte 3 000 francs – ancien cours. Dès le mois d’octobre 1820, Noël cède tout à son associé et dans les mois qui suivent, François Grenier père redevient propriétaire des lieux. Or, le 2 avril 1822, le père lègue ses terrains à son fils. Il semble que le père ait fait construire le moulin pour l’offrir à son fils et favoriser ainsi son établissement pour qu’il puisse se marier. Le moulin reste longtemps dans la famille Grenier puisqu’en 1849, François Grenier fils cède ses terrains à son fils qui porte également le nom de François Grenier. À sa mort, en 1882, ce dernier laisse derrière lui sa femme, Julie Payette, ainsi que plusieurs enfants d’âge mineur, et les lots de la famille sont vendus aux enchères. Michel O’Brien se porte acquéreur, mais 4 jours plus tard, Julie Payette, veuve de François Grenier le troisième, rachète l’ensemble. Octavien Grenier est l’héritier suivant en 1899. C’est le dernier Grenier à être propriétaire du moulin. Le moulin aurait cessé ses activités de meunerie avec les Pelletier. Barnabé Lebeau l’a ensuite restauré dans les années 1935-1936, y installant une boutique pour la vente de produits d’artisanat. Le moulin devient une attraction touristique. Les terres sont ensuite loties en 1961, favorisant l’émergence d’un développement résidentiel à proximité du moulin.
Association des moulins du Québec
Les moulins à farine et à scie Jetté
Le moulin Jetté était différent des 2 autres puisqu’on y trouvait un moulin à farine et un moulin à scie.
5 novembre 1827 – Bail par Antoine Jetté père et fils à John McGeer
John McGeer fermier de Repentigny a pris à bail pour 9 ans une terre de 3 arpents par 27 bâtie de maison, grange, étable, un moulin à vent, laitrie et autres bâtisses avec réserve de la moitié de la maison… le moulin à vent et un moulin à scie et des terrains entourant les 2 moulins.
21 novembre 1827 – Vente et cession par Antoine Jetté fils à Antoine Jetté père
Antoine Jetté fils a vendu à son père aussi cultivateur de Repentigny tous droits qui peuvent lui appartenir dans un moulin faisant le bled farine garni de ses tournants et virants et allant par le vent… Comme fondé le dit vendeur dans les dits moulin et emplacement pour un quart comme héritier de feu Angélique Chartier sa mère… Sauf et excepté le moulin à scie ou à bois qui demeurera pour le total au dit vendeur comme l’ayant construit et fait construire à ses frais…
13 juillet 1830 – Vente d’un moulin à scie par Antoine Jetté à David Boudreau
Antoine Jetté cultivateur de Repentigny a vendu tout ce qui compose un moulin à scie qui est actuellement construit sur la terre du vendeur… garni de ses tournants et virants, voiles et scie… pour par le dit acquéreur enlever et démolir le susdit moulin à scie dans les huit jours. Vendu pour 168 livres.
11 septembre 1830 – Lease by Antoine Jetté to Stuart Maitlam
Antoine Jetté yeoman de Repentigny a loué à Stuart Maitlam meunier de St-Esprit et John McGire fermier de Repentigny a certain wind flower mill pour la somme de 18 livres pour les 2 premières années puis 35 livres par année; signé Macklem et McGire.

7 janvier 1832 – Vente par Stuart Macklem à Déziré Prevost
Stuart Macklem farinier a vendu à Déziré Prevost cultivateur de Repentigny ses droits et prétentions dans un moulin à vent qu’il aurait loué conjointement avec John McGire à Antoine Jetté par un bail du 11 septembre 1830; vendu pour 66 livres, signé Désirez Provost.
On peut supposer que Déziré Provost faisait partie de la même famille Provost des moulins Noël et Grenier. On trouve d’autres informations sur l’histoire de ce moulin sur internet mais elles ne font pas mention du moulin à scie et ne correspondent pas tout à fait aux actes notariés que j’ai documentés.
C’est une construction cylindrique massive, à toit conique, qui comprend trois étages, en raison de la verticalité de son mécanisme. Malgré les altérations subies depuis qu’il n’est plus utilisé (la queue a disparu et l’espace entre le chemin dormant, qui couronne le corps, et le chemin tournant, qui constitue la base de la calotte tournante, n’existe plus), le mécanisme interne d’origine est toujours en place. On y trouve notamment le rouet, le treuil, le fer, quelques pièces de la trémie et des parties du régulateur des meules ainsi que du monte-charge. La maçonnerie et la charpente sont bien conservées… [Il] est érigé par Antoine Jetté en 1823 et exploité par son fils de 1824 à 1827, date à laquelle il est rétrocédé. En 1851, le moulin produit quelque 2 200 minots de tous grains. Il demeure la propriété de cette famille jusqu’en 1896, alors qu’il est vendu au cultivateur Arthur Léveillé. Dans les années 1910-1915, il cesse ses opérations. Pendant tout ce temps, l’exploitation du moulin aura été le plus souvent donnée en location.
Répertoire du patrimoine culturel du Québec
Antoine Jetté fit donation en 1845 du lot 37 ou se trouve le moulin a son gendre Joseph Laporte. Ce dernier en fit donation a son fils Félix Laporte en 1888. En 1896 Félix vendit la terre a Arthur Léveillé. En 1904 ce dernier la vendra à Ildège Lamarche reconnu comme le dernier meunier de Repentigny. En 1913 Narcisse Lebeau deviendra propriétaire de l’emplacement et le cédera à son fils Philippe en 1937. Il est à noter que son frère Barnabé sera propriétaire du moulin Grenier à la même époque. Philippe Lebeau vendra en 1964 la partie du terrain ou se situe le moulin à Lucille Séguin. En 1973 Lucille Séguin partagera la propriété avec sa soeur Hortense. A cette époque, elles firent des travaux afin de protéger le moulin, ce qui permis de le garder en bon état. En 2008 Lucille Lavoie et Yvan Robert deviennent propriétaires du moulin et installent une boulangerie artisanale dans le bâtiment voisin. Le moulin sera vendu en 2020.
Association des moulins du Québec
Sur le plan officiel de la paroisse de Notre-Dame de l’Assomption de Repentigny datant de 1882 les moulins ne sont pas dessinés mais on voit les parcelles de terrain où ils étaient: le moulin Noël sur la terre 29, le moulin Grenier sur la terre 31 et le moulin Jeté sur la terre 37 (selon Christian Roy).
Le moulin à farine de la Presqu’île de Repentigny
Les 3 moulins à vent construits sur le bord du St-Laurent sont bien documentés mais celui qui a été construit sur le bord de la rivière l’Assomption sur les terres de la Presqu’Île de Repentigny ne l’est pas du tout dans aucun livre que j’ai pu consulter. Il a été construit vers 1838 par Stuart Maklem, millwright, c’est-à dire spécialiste de la construction des mécanismes de moulins et Joseph Neill. En 1830 Stuart Maklem avait loué le moulin Jetté.
22 mars 1837 – Engagement de François Ayet à Stuart Maklem
Dans un acte notarié rédigé en anglais Francis Ayet dit Malo de L’Assomption a engagé son fils Francis âgé de 15 ans à Stuart Maklem aussi de L’Assomption millwright pour qu’il lui enseigne le métier de constructeur de mécanismes de moulins.

Maklem, MacKlem, McKlin, MacKlean, McClean… les notaires avaient du mal à bien orthographier ce nom!
25 juillet 1837 – Protest par Séraphin Leblanc contre Stuart McKlin
Séraphin Leblanc meunier de St-Pierre de l’Assomption au moulin appartenant aux seigneurs de St-Sulpice sur la rivière l’Achigan a protesté contre Stuart Mac Klin ingénieur du village de l’Assomption pour des travaux effectués à son moulin à farine.
20 janvier 1838 – Bail par Médard Brousseau à Joseph Neill et Stuart McKlin
Médard Brousseau cultivateur de Repentigny a fait bail pour 9 ans à Joseph Neill fermier du Bas de L’Assomption et Stuart McKlin meunier demeurant au village de L’Assomption d’un lot de terre à prendre dans la terre du locateur située en la paroisse de Repentigny contenant 1 arpent sur 29 prenant devant au nord du chemin Royal, en profondeur aux terres de la Presqu’Isle, tenant d’un côté à Joseph Archambault, d’autre côté à Joseph Quintal père… Ce bail fait pour le prix et somme de cinquante livres ancien cours pour chaque année de louage payables à la St-Michel…
Louis Antoine Derome du village de L’Assomption a servi d’interprète aux acheteurs comprenant peu la langue française.
On ne peut pas situer précisément l’emplacement où a été construit ce moulin mais c’est dans le secteur des arsenaux à Legardeur au nord-ouest de la rivière de l’Assomption.
30 janvier 1839 – Sale by Stuart MacKlean unto Robert MacKlean
Stuart MacKlean millwright de la paroisse de Repentigny a vendu à Robert MacKlean meunier de Repentigny tous ses droits et prétentions sur le bail qu’il détenait avec Joseph Neill ainsi que ses droits sur un moulin qui y avait été construit selon un accord avec J. Neill daté du 7 février 1838; vendu pour 30 livres. Le lien de parenté des intervenants ne sera jamais précisé.
Les actes notariés suivants ne précisent jamais qu’il s’agit d’un moulin à vent mais cela semble implicite puisqu’ils ne font jamais mention de rivière ou de roue à eau non plus. La propriété de ce moulin va donner lieu à des poursuites et des contestations.
25 février 1840 – Protest at the request of John McCullagh against Joseph Neil
À la demande de John McCullagh meunier de Repentigny les notaires se sont rendus au domicile de Joseph Neil fermier à St-Léonard pour lui signifier que dans un accord passé le 27 janvier 1840 devant les témoins John Hennessey et David Lynes leur client John McCullagh avait la jouissance de la moitié d’un moulin érigé à Repentigny avec une partie d’une maison, un cheval, une étable et le foin pour le prix de 30 livres par an. Joseph Neil s’était aussi engagé à réparer le phare(?) du moulin et spécialement le kill(?). John McCullagh exige donc que dans un délai de 4 jours le moulin soit réparé et que des dommages soient payés sous peine de poursuites.
16 avril 1840 – Agreement between Stuart McLean and Robert McLean
Comme un désaccord est intervenu entre eux et que la cause a été déposée en cour de justice (King’s bench) ils ont décidé de nommer 2 arbitres pour examiner leur litige et le régler à l’amiable: Hector McMillan et John Hennessey fermiers de Repentigny. Et en cas de désaccord ils ont choisi Thomas Kerkland fermier de L’Assomption comme tiers arbitre.
18 avril 1840 – Award of Hector McMillan and others
Hector McMillan, Thomas Kerkland de L’Assomption et John Hennessey de Repentigny fermiers ont rendu leur jugement d’arbitrage et ont déterminé que Robert McLean devait payer 25 livres 6 shillings et un demi penny à Stuart McLean.
18 avril 1840 – John McCullagh vs. Joseph Neil
Leur différent a aussi été déposé à la Cour du Roi mais pour éviter des coûts inutiles ils ont aussi choisi de faire arbitrer leur litige par John Hennessey et Hector McMillan avec Thomas Kerkland comme tiers arbitre.
18 avril 1840 – Award of Hector McMillan and others
Les arbitres ont déterminé que John McCullagh devait payer 7 livres 10 shillings et 7 pence à Joseph Neil.
25 avril 1840 – Résilliation entre Stuart McLean et Robert McLean
Comme Robert McLean n’était pas capable de payer ses dettes il a convenu avec Stuart McLean d’annuler l’acte de vente du 30 janvier 1839; Robert abandonne tous ses droits et promet de livrer une charette, une traîne et deux chevaux à Stuart qui paiera tous les frais engagés auprès de l’avocat et de l’huissier.
8 juin 1840 – Résilliation entre Joseph Neil et John McCullagh
Pour éviter les frais de justice Joseph Neil s’est aussi mis d’accord avec John McCullagh pour reprendre sa moitié du moulin à l’amiable contre 2 chevaux, 2 cochons et 1 vache; les frais de justice devaient être payés chacun sa moitié.
2 décembre 1840 – Vente par Stuart McLean à Joseph Quintal
Stuart McLean meunier de L’Assomption a alors revendu à Joseph Quintal cultivateur de Repentigny la moitié d’un moulin à farine d’avoine avec ensemble la moitié de la grille ou chaufferie (kiln) construit en bois sur la terre d’un nommé Brousseau dans la paroisse de Repentigny. Il se réservait le droit d’enlever un crible se trouvant à l’étage du moulin, une étable et tous ses outils avec une charrette. L’acquéreur devra se conformer aux termes d’une entente signée sous seing privé avec Joseph Neil; vendu pour 60 livres.
22 juillet 1842 – Quittance générale et finale par Stuart McLean à Joseph Quintal père
Stuart McLean demeurant à Rawdon a donné quittance à J. Quintal pour le dernier paiement dû pour la vente du 2 décembre 1840.
Le contrat avec Médard Brousseau propriétaire de la terre où a été construit le moulin n’était pas très précis et une portion de terrain en profondeur a été ajoutée; un plan montre cet ajout mais il n’est pas clair.
Je n’ai pas pu documenter la suite de l’histoire de ce moulin à vent.
Le moulin à scie à vapeur Cushing
La documentation fournie par la ville de Repentigny raconte que c’est à cause de la fin du régime seigneurial en 1854 que ce moulin a été construit. C’est amusant puisque dans le chapitre précédent la documentation raconte l’histoire de moulins à farine construits avant l’abolition du régime seigneurial sans évoquer cet aspect du droit féodal qui concernait les moulins à farine plus que les moulins à scie.
Le moulin à vapeur Cushing a été construit en bordure du fleuve face à l’île de la Fabrique (Lebel) appartenant en usufruit au curé de Repentigny. Les moteurs à vapeur permettaient de ne plus être dépendant de la force du courant de la rivière qui variait selon les saisons. La rivière l’Assomption restait quand même un atout essentiel puisque les billots de bois flottaient depuis les forêts du nord jusqu’à la scierie.
21 septembre 1858 – Marché et convention entre Messire Jean-Baptiste Labelle et Sieur Theophilus Cushing
Messire Jean-Baptiste Labelle curé de Repentigny agissant avec le consentement de Mgr. Ignace Bourget a accordé à Theophilus Cushing demeurant à Frankfort Waldo county dans l’état de New-York et à la compagnie dont il était l’agent les privilèges suivant:
1° Celui de construire des jetées ou quais sur le côté nord-ouest d’une île dans le fleuve St-Laurent appartenant en usufruit au curé désservant la paroisse de Repentigny dont l’un des quais sera situé à peu près vis à vis les usines ou moulins de la compagnie et l’autre tout à fait à l’extrémité haute de l’île. Pour cet effet Messire Labelle loue à T. Cushing 2 petits terrains de 20 pieds sur 20 à partir de la grève de l’île telle qu’à la saison d’aujourd’hui.
2° Le privilège tant pour lui que pour les employés de la compagnie de passer à pieds sans causer de dommage sur le bord de l’île pour communiquer d’un quai à l’autre.
3° Le privilège de passer à pieds sur la grève de la terre que possède le curé en usufruit pour faire descendre le bois de la compagnie.
Ces privilèges sont accordés pour 10 ans pour un loyer annuel de 10 louis. La compagnie a l’obligation de laisser un passage sûr et commode au curé et aux gens de sa maison pour accéder à l’île en tout temps et surtout quand les billots pourront obstruer le passage. Au cas où le gonflement des eaux jette du bois à l’intérieur de l’île ou sur la terre du curé la compagnie devra indemniser le curé pour les dommages.
Les présentes n’auront leur effet qu’au cas que le dit Cushing achèterait dans le voisinage des lieux un terrain pour y bâtir des moulins… Charles Edward Scallon commerçant de bois de St-Charles-Borromée (Joliette) a servi d’interprète car T. Cushing ne comprend pas le français.
24 septembre 1858 – Vente par Michel O’Brien à Theophilus Cushing & Cie
Michel O’Brien cultivateur (et frère du notaire) a vendu à Theophilus Cushing et la compagnie dont il se dit être l’agent un terrain de 2 arpents 3 perches et 2 pieds de front entre le chemin de la Reine et le fleuve St-Laurent tenant d’un côté à la terre du curé et de l’autre à celle d’Amable Deschamps avec quelques réserves…
Il manque la fin de la numérisation de cet acte par la BANQ.
La compagnie a aussitôt commencé à exploiter le bois sur les rivières en amont puisque le 2 décembre 1858 Charles E. Scallon a conclu un achat de billots sur la rivière David dans le comté de Joliette pour Messieurs Cushing & Cie.
27 avril 1859 – Vente par Theophilus Cushing à Benjamin D. Peck
Theophilus Cushing marchand de bois demeurant à Frakfort état du Maine a vendu à Benjamin D. Peck trésorier de l’état du Maine demeurant à Portland le terrain acquis de Michel O’Brien avec une maison et 2 boutiques pour 1.200 piastres.
10 mai 1859 – Bail à loyer par messire Jean-Baptiste Labelle à Theophilus Cushing
Le curé Labelle a loué pour 10 ans à T. Cushing un petite partie de sa terre de 50 pieds de front sur le bord du fleuve en forme de triangle pour 8 piastres par année. Le terrain devait servir à creuser un anal qui devrait être comblé à la fin du bail. Louis Lyonais commerçant de Repentigny a servi d’interprète.
Le 24 septembre 1859 Michel O’Brien a signé une quittance à T. Cushing propriétaire de moulin demeurant maintenant à Repentigny qui lui avait payé entièrement ce qu’il lui devait.
10 octobre 1859 – Vente par Benjamin D. Peck à Abner R. Hallowell
Benjamin D. Peck a vendu à Abner R. Hallowell propriétaire de moulins de Bangor dans le Maine et son associé George R. Smith:
1° Un emplacement de 2 arpents trois perches et quelques pieds entre le chemin de la Reine et le fleuve St-Laurent avec un moulin à scie et ses accessoires maintenant construit sur le dit terrain et ses accessoires, les boumes et les billots qui sont maintenant arrêtés dans un petit chenal passant près du dit moulin avec une maison et autres dépendances.
2° Tous les billots qui ont été coupés depuis le mois de décembre dernier jusqu’au mois d’avril sur les terrains que le dit vendeur a achetés du sieur Edouard Scallon, lesquels billots sont maintenant dans la rivière l’Assomption et ses tributaires; enfin tous les billots que le dit vendeur a achetés du dit Scallon en juin dernier.
3° Un autre terrain de 4 arpents en superficie situé dans le township de Kildare tenant au chemin de la Reine, une petite colline au nord et au sieur Scallon au sud avec un moulin à scie construit en pierre et le pouvoir d’eau relatif au dit moulin et le droit de passer sur un chemin et autres privilèges (contrat du 10 juillet 1858).
La vente a été faite pour la somme de 40.000 dollars dont 30.000 ont été payés comptant. Charles Cushing teneur de livre demeurant à Repentigny a expliqué ce contrat rédigé en français aux intéressés.
Charles-Edward Scallon était le neveu de Edward Scallon le principal marchand de bois du village d’Industrie à cette époque. À partir du 5 octobre 1859 jusqu’à la fin décembre Charles Edward Scallon a signé plus d’une centaine d’engagements pour les chantiers de bois en tant qu’agent de Theophilus Cushing. Il avait fait construire un boom pour arrêter les billots à Ste-Béatrix et il a dû conclure un marché avec ses voisins. Il a aussi conclu des marchés avec des entrepreneurs pour couper et charroyer des billots dans le comté de Joliette, un autre sur les rivières Noire et David, un sur la rivière Boule dans le 10ème rang de Cathcart et un sur le 5ème rang de Cathcart. Il a finalement engagé Joseph Peltier de L’Industrie comme boulanger pour livrer le pain dans ses chantiers de la rivière L’Assomption.
Le 12 mai 1862 Edouard Scalon a conclu un accord avec MM. Leavitt, Smith et Weston de Bangor, Maine et Theophilus Cushing de Winterport, Maine, de la Ottawa Lumber Co. Cette compagnie de Repentigny avait acquis les limites de bois d’E. Scallon sur la rivière L’Assomption et ses tributaires, rivière Noire et Ducharme achetées par Benjamin Peck mais elle avait empiété sur les limites appartenant encore à E. Scallon. Après un procès un accord à l’amiable a été conclu. Le 27 mai Charles E. Scallon a conclu un accord avec Firmin Cornellier de Ste Mélanie en tant que représentant de la Ottawa Lumber Co pour un billot estampillé T. C. (Cushing) qui aurait été scié au moulin de William Berczy.
La carte de l’atlas Murray de 1761 montre bien le chenal qui existait autrefois devant l’île de la Fabrique (Lebel), la terre du curé et l’église de Repentigny; il a sans doute été comblé puisqu’il n’apparaît plus les autres cartes.
5 juin 1863 – Convention entre Mre Jean-Baptiste Labelle et Mr Théophilus Cushing
Cet acte modifie les actes du 21 septembre 1858 et du 10 mai 1859. Messire Labelle renonce au droit de passage qu’il s’était réservé pour aller dans son île et à un autre droit de passage pour sortir du petit chenal servant à gagner le fleuve en longeant la rive nord-ouest. En outre T. Cushing jouira pleinement de ce petit chenal et pourra le remplir de billots sans être tenu de laisser des passages sauf le passage ci-après mentionné: un chemin de voiture sûr et commode et une traverse sur le chenal pour aller sur l’île en bas des boumes au nord-est des usines. T. Cushing devra payer 80 piastres au lieu de 40 au curé. Charles Edouard Scallon a servi d’interprète.
En 2024 il n’y a plus de chenal et l’île Lebel n’est même plus une île!

Le 28 avril 1864 C. E. Scallon a conclu un marché de billots de bois avec James Payton de Rawdon. Le même jour 200 morceaux d’épinette rouge flottant sur la Ouareau entre Chertsey et Rawdon ont été vendus par Payton à T. C. Cushing, C. E. Scallon agissant comme leur représentant.
16 mai 1864 – Signification de transport aux Srs. Theophilus Cushing et Theophilus Hamilton Cushing
À la réquisition de Charles Edouard Scallon géolier de la prison du district de Joliette qui a reçu un transport de James Payton commerçant de St-Patrick de Rawdon le notaire O’Brien s’est transporté au domicile de Theophilus et Theophilus Hamilton Cushing commerçants de bois en société sous le nom de T. & T.H. Cushing à Joliette dénommés au dit transport pour leur en faire signification.
Le 11 juin 1864 Joseph Brouillet a conclu une transaction avec Theophilus Cushing en tant qu’exécuteur testamentaire d’Edward Scallon décédé. Celui-ci aurait empiété pendant l’hiver sur les limites de bois de 256 milles qu’il avait vendues à Benjamin Peck le 10 juillet 1858. Le 14 novembre 1863 le sheriff Bernard-Henri Leprohon avait adjugé ces limites de bois à Nathan B. Gibbs et Benjamin H. Burgess représentés par T. Cushing. Le litige concernait la coupe illégale de 9.000 billots par Scallon et un accord à l’amiable a été conclu entre la succession Scallon, Gibbs et Burgess et l’Ottawa Lumber Co pour la livraison de 6.000 billots au boom des moulins de la ville de Joliette dépendant de la succession d’E. Scallon.
Le 30 septembre Mgr Bourget autre exécuteur testamentaire d’E. Scallon avait nommé Pierre Edouard McConville comme son représentant pour régler le litige avec Cushing et ses associés. Le 3 janvier 1865 dans une procuration de T. Cushing à François B. Godin on lit que le moulin à scie en pierre du village d’Entreprise a été vendu par Scallon à Benjamin Peck en même temps que ses limites de bois le 10 juillet 1858.
2 juillet 1868 – Sommation et protêt à la réquisition de Antoine Lemieux pour T. & T.H. Cushing
Antoine Lemieux capitaine de vaisseau de Notre-Dame de Bonsecours de l’Islette comté de Montmagny à bord de la goëlette Marie Erzélie a demandé au notaire O’Brien de se transporter aux moulins de la compagnie pour faire charger son bateau mais Charles Cushing a refusé car l’agent qui aurait passé la commande n’était pas celui assigné par T. & T.H. Cushing and Co.
Les moulins étaient alors nommés St. Laurence Mills semble-t-il, le nom n’est pas évident.
La vente des limites de bois possédées par E. Scallon a donné lieu à un très long procès à cause d’une erreur de 50 miles carrés. En 1881 la Cour Suprême du Canada étudiait encore le litige dans la cause Dupuy vs. Ducondu. E. Scallon avait épousé Mathilde Ducondu. Ce très long document donne la liste exacte des limites de bois vendues:
By the deed of 22nd October, 1866, compensation is made to Cushing, assignee of Peck, for the deficit of fifty miles of the 250 miles of limits Scallon had, by deed of 6th March, 1865, agreed to sell to plaintiff in these words: Et en vertu, de ce titre feu M. Scallons’était obligé de vendre deux cent cinquante six milles de limites pour couper du bois sur les terres de la Couronne situées sur la rivière de l’Assomption et ses tributaires la rivière Noire et la rivière Ducharme… se trouve un déficit do cinquante mille pour compléter la dite quantité de deux cent cinquante six milles cédés au dit M. Théophilus H. Cushing par l’acte de dèpot, cession et transport du seize mars mil huit cent soixante et cinq le dit Sieur McConville pour et au nom qu’il agit, voulant compléter le déficit qui se trouve a. par les présentes, cédé et transporté avec la garantie de tous troubles généralement quelconques au dit M. Théophilus M. Cushing…
Cette scierie [Cushing] fut incendiée vers 1890. Geo. V. Leverett, de Boston, la vendit à The Charlemagne and Lac Ouareau Lumber Co. Ltd, le 15 janvier 1891. Le terrain (et ce qu’il y avait dessus) fut vendu par cette Compagnie à Ulric Evans, de Repentigny, pour 750$ le 9 mai 1893. (Christian Roy)
Sur le plan officiel de la paroisse de Notre-Dame de l’Assomption de Repentigny de 1882 les usines Cushing ne sont pas dessinées et l’Île de la Fabrique était aussi nommée Île Lebel.

Le moulin à vapeur de Charlemagne (St-Paul L’Hermite)
L’histoire de St-Paul l’Ermite de Christian Roy et Onil Therrien donne un historique de ce moulin. Le 26 janvier 1867 Honoré Bénard dit Bonenfant a vendu un lopin de terre sur la rivière de l’Assomption et l’île Vaudry à William Henry Parker commerçant de bois à Montréal. Le 11 juillet 1868 celui-ci a tout revendu à The Hunterstown Lumber Company. Le 17 mai 1869 l’Assomption Lumber Company représentée par William Jones Pope a acheté le reste des terres de Bonenfant et le 23 octobre les propriétés de la compagnie Hunterstown pour y construire un moulin. En 1869 les actionnaires de la compagnie étaient Lewis A. Hall de Lambridge Mass., Otis Sheppard de Boston, Edwin Pope, James O. Pope, George W. Pope et William Jones Pope. Ce dernier est venu demeurer sur place pour faire construire le moulin dont le plan a été dressé en 1870.
Le journal Le Pays a publié le 1er août 1870 un avis annonçant la création d’une société pour s’occuper du commerce de bois en général sous le nom de Assomption Lumber Co. à St-Paul L’Hermite. Les administrateurs étaient des américains de Boston et Montréal, leur représentant Wm. J. Pope demeurant au Bout de l’Île.

En 1873 La Gazette de Joliette raportait que les frères Cushing et MM. Pope étaient associés sous la raison sociale Assomption Lumber Company qui exploitait aussi du bois venant de la rivière Outaouais jusqu’à Repentigny. Environ 800 hommes y étaient employés.

La Gazette officielle du Québec du 18 juillet 1885 rapportait que les propriétés appartenant à l’Assomption Lumber Co. avaient été mises en vente à la suite de la liquidation de la Banque d’Échange du Canada. Elles étaient situées à St-Paul l’Ermite, la ville de Charlemagne n’existant pas encore. La compagnie détenait 295 miles de limites de bois à sa liquidation.

En 1891 Mr. Alexander McLaurin de la compagnie Charlemagne and Lac Ouareau Lumber Co. a invité un journaliste du Dominion Illustrated à venir visiter les installations de la compagnie depuis Charlemagne jusqu’aux chantiers du nord sur la rivière Ouareau en passant par le village de Montcalm aujourd’hui disparu. Le journaliste a publié un long reportage avec de nombreuses illustrations que j’ai documenté dans une chronique.
La compagnie Charlemagne & Lac Ouareau Lumber Co a été fondée en 1886 par John Dillon, Donald William Ross, Alexander McLaurin et William Ross. Le mandat de la compagnie était d’exploiter le bois sur la rivière Ouareau en améliorant les installations pour faire flotter le bois jusqu’à Charlemagne où se trouvaient les installations principales.
Sur le site internet de la ville de Charlemagne on trouve un historique du moulin à scie de Charlemagne mais il n’est pas fait mention de la Charlemagne & Lac Ouareau Lumber Co.
À partir de 1867, la construction du moulin à scie de L’Assomption Lumber Company attire près de 200 travailleurs de l’industrie du bois. Ils habitent les logements de la compagnie ou achètent des places sur des terres voisines pour y construire leur résidence. Un village vient de naître, mais les services et infrastructures sont manquants en raison de son emplacement aux extrêmes limites de 3 municipalités: Lachenaie, Saint-Paul-l’Ermite et Repentigny.
Ville de Charlemagne

L’entreprise a été vendue le 20 janvier 1916 à la St-Maurice Paper Co. puis à la St-Maurice Valley Corp. en 1925 et à la Consolidated Paper Co. en 1932.
Les ponts et traverses de Repentigny
Le 9 juillet 1824 Joseph Galerneau et Jean Marie Archambault tous les 2 traversiers sur la rivière de l’Assomption à Repentigny ont convenu que comme leurs ponts étaient avoisinants ils partageraient les profits de moitié pendant 9 ans en conservant seulement le pont de Galerneau, l’autre devant être démoli.
Le 25 septembre 1833 Paschal Lachapelle de Montréal a vendu à une société formée par Paul Loyer aubergiste de St-Ours du Grand St-Esprit, Ambroise Vinet de St-Roch, (?) Beauchamps, Pierre Duprat, Pascal Roi et François Gariépy de St-Henri de Mascouche, Eustache Martel Vienne de St-Charles de Lachenaie, etc. un bateau à chevaux ou horse-boat qui leur a été livré le même jour avec tous ses agrès et mécanismes à Lachenaie.
L 27 février 1834 Joseph Deschamps cultivateur de Repentigny a vendu à Joseph Galerneau passager tout le bois d’un pont que le vendeur a tenu et érigé sur la rivière de l’Assomption vis à vis la demeure de l’acquéreur avec 2 bacs et leur grément et 2 côtes servant à la traverse de chaque côté de la rivière pour 2.000 livres.
Le 22 juillet 1845 après le décès de Joseph Galarneau traversier sur la rivière de l’Assomption à Repentigny l’inventaire de ses biens a été notarié; il avait acheté en 1834 un pont sur l’Assomption pour 2.000 livres; il semble avoir été voisin du terrain de Amable Deschamps près du fleuve. Le 1er avril 1847 sa veuve a vendu ses droits à Antoine Galarneau son beau-fils, 2 bacs et un canot ave les ustensiles et tout le bois d’un pont érigé chaque été sur la rivière de l’Assomption vis à vis le terrain de Joseph Deschamps.