Le curé Antoine Manseau a été un des bâtisseurs de la ville de Joliette, la plus belle rue de la ville porte son nom. Pour connaître sa vie on peut lire son histoire dans le dictionnaire biographique du Canada ou dans les livres sur l’histoire de Joliette. J’ai fait une recherche dans les archives pour documenter sa vie avec les journaux de cette époque.
MANSEAU, ANTOINE, prêtre, missionnaire, grand vicaire, né le 12 juillet 1787 à Baie-du-Febvre (Baieville, Québec), fils d’Antoine Manseau, cultivateur, et de Marie Côté, décédé à Montréal le 7 avril 1866.
Dictionnaire biographique
Antoine Manseau prêtre
Antoine Manseau est né sur une ferme et il a pu apprendre à lire et à écrire avec son curé. Il a étudié le notariat et a appris l’anglais. En 1806 il a repris ses études au collège classique de Nicolet puis il est entré au grand séminaire de Québec en 1811 et a été nommé secrétaire de Mgr Plessis évêque de Montréal.
Mgr. Plessis, alors Evêque de cette ville, eut bientôt découvert le mérite et la capacité du jeune clerc. Il lui donna de suite sa confiance, en l’appelant, après quelques semaines du Grand Séminaire, au Secrétariat, à la place de Mr. Flavien Turgeon, devenu plus tard Archevêque de Québec, qui venait de s’agréger au Séminaire de cette ville. Il remplit donc l’office de secrétaire, à la grande satisfaction de ce digne Evêque et de son Clergé, jusqu’au commencement de Janvier 1814.
Voici les époques de ses ordinations: il reçut les ordres moindres le 21 Décembre 1811 ; le sous-diaconat le 13 Mars 1813 ; le diaconat, le 31 Octobre de la même année ; et la prêtrise, le 2 Janvier 1814. Il avait alors vingt-six ans et demi.
Le jour même de sa prêtrise, il fut nommé Vicaire de Mr. Griand, curé de Ste. Anne de la grande Anse.
Joseph Bonin (page 173)

Après son ordination en 1814 il a été envoyé par Mgr Plessis à Chéticamp et Tracadie en Acadie puis en 1817 il a été nommé curé des Cèdres près de Montréal. En 1823 il a été nommé pour 2 ans missionnaire dans le Haut-Canada. Il avait voyagé et connaissait son pays.
En 1823, il fut nommé Grand-Vicaire et Visiteur de toutes les missions du Haut-Canada, pendant l’absence de Mgr. Alex. MoDonell, qui était allé en Europe pour affaires importantes, malgré toutes les objections qu’il pût faire pour ne pas être chargé d’une responsabilité qui lui paraissait accablante. Comme bientôt après, l’ Evêque de Québec le pressait de partir, il l’informa qu’il ressentait au bras un mal qui semblait préluder à la paralysie et que pour cette raison, il retarderait son départ. L’Evêque lui répliqua: « Nous n’avons pas le temps d’être malade ; partez sans délai. » Nous partirons donc, répondit-il, puisque nous n’avons pas le temps d’être malade
J. Bonin (page 182)
Curé des Cèdres, de Contrecoeur puis de Longueuil
Dans L’argent du curé de campagne Serge Gagnon donne quelques informations sur le curé Manseau à la paroisse des Cèdres (Saint-Joseph de Soulanges).


On commence à voir son nom apparaître dans les journaux en 1827 lorsqu’il a participé à une lettre ouverte pour défendre la religion catholique contre le député John Simpson.

À la suite de cette lettre il a été nommé curé à Contrecoeur où il restera jusqu’en 1834.


Le 1er octobre 1834 il a été nommé curé de Longueuil mais le dictionnaire biographique n’en parle pas. Il a pourtant eu une influence notable sur cette paroisse selon la documentation trouvée. Dans l’Histoire de Longueuil un chapitre lui est consacré:

En 1835 Messire Manseau, curé de Longueuil, est venu désigner l’emplacement de la nouvelle église de la paroisse.

Le 2 mai 1836 le curé Manseau a été victime d’un accident. Quelqu’un a fait sauter une mine qui a projeté une pluie de pierres.

Les 2 et 3 mai 1836 les articles de la Minerve et du Vindicator étaient bordés de noir en signe de deuil. Le gouvernement venait de tuer par un décret l’effort entrepris par les canadiens pour se construire un système scolaire. Les écoles étaient fermées et 40.000 enfants privés d’éducation. Un peuple ignorant est plus facile à exploiter. C’est une des raisons des révoltes qui vont suivre en 1837 et 1838.

En novembre 1838 le curé Manseau de Longueuil a signé 2 certificats de bonne conduite à des citoyens en difficulté avec la justice, des patriotes sans aucun doute:
Messire Manseau, Vicaire-Général
En 1840 le curé Manseau a été nommé à l’évêché de Montréal auprès de Mgr Bourget qu’il a remplacé pendant son premier voyage en France.

En 1841 il a été nommé chanoine titulaire de la cathédrale de Montréal. Il portera dorénavant le titre de Vicaire Général. Mais dans sa biographie on lit que la vie à l’évêché l’ennuie au point qu’il est obligé de prendre un long repos (1842–1843). Claude Martel dans son Histoire de Joliette écrit qu’il aurait été malade et se serait rétabli.

Cependant, il lui fallut se charger de l’administration du Diocèse, pendant le premier voyage que Monseigneur fit à Rome et qui dura depuis le mois de Mai jusqu’au mois de Septembre. Mais au retour de l’Evêque, il se déchargea ds l’administration dont il s’était acquitté avec succès, comme de tous ses autres devoirs, et il se retira, avec les titres de Vicaire-Général et de Chanoine honoraire, d’abord à Longueuil, chez son neveu M. L. M. Brassard qui lui avait succédé dans cette cure, et ensuite chez son intime ami, M. Primeau, curé de Varennes.
J. Bonin (pages 187-188)
Curé du village d’Industrie
Le nouveau village de L’Industrie préoccupait Mgr Bourget, il fallait un homme d’expérience pour tenir tête aux ambitions de B. Joliette qui se préoccupait plus de commerce que de religion. Il a choisi d’y envoyer son Grand Vicaire Général en 1843. La première documentation qu’on en trouve concerne le décès de la mère du curé Manseau qui vivait avec lui, à l’âge de 84 ans.

L’histoire du curé Manseau à Joliette a été documentée en détail par les historiens de la ville. Il a su tenir tête à B. Joliette qui était propriétaire de l’église et du collège qu’il avait faits construire. Ce n’était pas une situation confortable, la dîme ne rapportant presque rien il était entièrement dépendant financièrement de la bonne volonté de B. Joliette. Quelques mois avant sa mort en 1850 B. Joliette a finalement légué ces biens au diocèse de Montréal.

Malgré son titre de vicaire général, le curé Manseau vit au rythme d’un curé de campagne. En fait il vit de peu, en l’occurrence des légumes de son jardin, quand les pillards lui en laissent suffisamment. Le presbytère-sacristie est froid, mal isolé… On le décrit comme un homme humble, charitable, sacrifié, entretenant une grande dévotion envers la Sainte-Vierge.
Mélomane, il copie la musique pour les besoins de l’église. Il se met à enseigner le chant aux élèves du collège et forme une chorale.
Histoire de Joliette – Claude Martel

Voici quelques autre documents trouvés dans les journaux. En 1846 il signe une lettre d’appui au colonel Gugy.

Ouverture du collège en 1846; le curé Manseau surveille l’enseignement donné par 2 ecclésiastiques MM. Resther et Barrette.

Pétitions au gouvernement pour réprimer l’intempérance dans la paroisse de St-Charles-Borromée.

Même si il était curé de L’Industrie A. Manseau était toujours vicaire-général de Mgr Bourget et il l’accompagnait lors de certains déplacements.

En 1859 le curé Manseau avait déjà une rue à son nom dans le village d’Industrie, sans doute le boulevard Manseau d’aujourd’hui.
Manseau devient un développeur du village en divisant la terre de l’église en de nombreux lots qui forment aujourd’hui une bonne partie de la rue Notre-Dame et du boulevard Manseau. On lui doit également le second marché et la place Bourget.
Claude Martel – Histoire de Joliette

On retrouve le nom de messire Manseau dans de nombreux avis de mariages ou de décès ainsi que dans quelques pétitions au gouvernement. En 1863 il était abonné au Foyer Canadien avec quelques autres citoyens de L’Industrie.

La même année le clergé du diocèse de Montréal a formé une souscription pour offrir un beau portrait à Mgr de Montréal. Le curé Manseau vit dans la pauvreté d’après sa biographie mais il est bien obligé de participer à la souscription, il est toujours V.G. de Mgr Bourget, c’est-à-dire vicaire général.


Le curé Manseau a donné sa démission en mars 1864, il était âgé, malade et fatigué.
Retraite à l’hospice Saint-Joseph de Montréal
En 1865 l’humble curé de ce qui s’appellait alors Joliette était retraité à l’hospice St-Joseph de Montréal. Le 18 janvier il a assisté à une conférence de M. Nash sur la guerre civile américaine à l’Union Catholique de Montréal. Le Grand Vicaire Manseau de Joliette a chanté le salut d’usage à la fin de la séance.

Le 3 février il assistait à une séance littéraire. Le sujet traité était la force d’âme nécessaire aux hommes d’état.

En juillet il est revenu faire une dernière visite à ses anciens paroissiens de Joliette.

Antoine Manseau est décédé le 7 avril 1866. Ses funérailles ont eu lieu le 10 à l’Asile de la Providence, présidées par Mgr Bourget lui-même qui a fait son éloge funèbre. Il en a parlé non pas comme un évêque qui perd un de ses prêtres mais comme un ami qui perd un ami. La nouvelle de sa mort a été publiée dans de nombreux journaux.
La Gazette de Joliette a publié le 13 avril les circonstances du rapatriement de son corps à Joliette pour qu’il y soit enterré. On peut y lire une première partie de sa notice biographique.

Le curé Manseau avait laissé un très bon souvenir à ses paroissiens de Longueuil qui tiennent à lui rendre hommage. C’est ce qu’on lit dans un autre long article de la Minerve dont voici le début.

Le 20 avril la Gazette de Joliette a publié la suite de sa notice biographique.

Tous les livres sur l’histoire de Joliette racontent la vie du curé Manseau et ses anecdotes. Dans Gerbes de souvenirs on trouve celle-ci:
Et à notre époque, le boulevard Manseau croise la Place-Bourget
au cœur de Joliette
Il faudrait ajouter une rue Plessis puisqu’il a été proche de ces 2 évêques importants, Plessis à Québec puis Bourget à Montréal.