Catégorie: Histoire
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Potasse, potasserie, pot

La potasse est faite avec les cendres de bois récupérées qui sont bouillies dans un chaudron. Le nom vient des mots allemands « pot » et « ashe ». Sa fabrication faisait partie du cycle économique de la colonisation: au recencement de 1861 il y avait 10 potasseries actives à Chertsey.

Depuis toujours les humains ont recyclé les cendres de bois pour produire de la potasse et fabriquer du savon ou de l’engrais. La demande a fortement augmenté au XVIIIème siècle quand on a commencé à l’utiliser comme agent basique dans des procédés chimiques: industries du verre, du textile, etc. Déjà en 1675 Jean Oudiette pour obtenir les droits de la Ferme du Domaine d’Occident du Roi s’engageait à maintenir la fabrication de potasse et à en faire passer 150 milliers (de bariques?) par an.

La potasse une industrie de la colonisation

« On découvrit qu’en Amérique du Nord, les cendres contenaient un plus grand pourcentage de potasse pure que dans les régions de la Baltique, d’où la demande constante et stable de ce produit » (Vie de pionnier : commerce de la potasse)

Fabrication de la potasse
Photos: Histoire forestière de l’Outaouais

Pour fabriquer la potasse il faut lessiver des cendres de bois francs avec de l’eau puis on fait chauffer l’eau de lessive comme de l’eau d’érable jusqu’à obtenir la potasse. En chauffant à haute température la potasse dans un four on obtient la perlasse, le produit final facile à transporter et donc à commercer.

La production de potasse était une activité marginale traditionnelle. Le défrichement des terres pour la culture produisait beaucoup de résidus forestiers que les colons pouvaient monnayer. À partir de 1767 le Canada commence à exporter une partie de sa production car la demande augmente. Le premier a avoir commercialisé la potasse au Canada semble être James Stewart qui annonçait dans la Gazette de Québec la manière de conserver les cendres qu’il s’apprêtait à acheter pour les transformer. Il proposait d’enseigner sa méthode à ceux qui voudraient faire ce commerce pourvu qu’ils résident à plus de 6 milles de Québec. Il achetait aussi la cendre de fougères qui semblait encore meilleure.

La Gazette de Québec 30 juillet 1767

James Stewart avait construit un emplacement pour fabriquer la potasse près du Cap au Diamant et il annonce comment préparer les cendres. Il projetait d’établir une autre manufacture à Montréal.

La Gazette de Québec 27 août 1767

Ce commerce a été tellement lucratif que dans certaines régions (Canton-de-l’Est et autour de Brownsburg en Outaouais par exemple) d’immenses forêts de bois francs ont été brûlées juste pour produire des cendres. En 1860 près de 10% des exportations canadiennes (1,2 millions de $) venaient de ce commerce.

Voir aussi La production de potasse au Lac Paquin à Val-David et De la cendre qui vaut son pesant d’or

En 1861 la découverte de gisements naturels de potasse en Allemagne a ruiné ce commerce qui n’était plus rentable.

Fabrication de la potasse

Dans la Gazette de Québec du 8 mars 1770 un long article de W. Lewis explique la fabrication de la potasse.

Samuel Hopkins d’une part, Angus McDonnell, Alexandre McDonnell, James McDonnell et Christopher Carter d’autre part ont inventé des méthodes pour améliorer la manufacture de potasse et perlasse et le gouverneur Dorchester a ordonné qu’ils aient l’exclusivité de ces méthodes dans la Province. Il s’agit sans doute des premiers brevets d’invention au Canada. Leurs méthodes sont décrites en annexe.

La gazette de Québec 23 juin 1791
La gazette de Québec, 7 juillet 1791

La concurrence était forte puisque la même année George Glenny a obtenu une patente de sa Majesté en Angleterre pour un procédé qui semble assez semblable. James Glenny était son agent au Québec.

La gazette de Québec, 3 novembre 1791

Le journal a publié le même jour un avis de Samuel Hopkins et une critique de son procédé.

La gazette de Québec, 3 novembre 1791
25 novembre 1795

En 1818 il y avait un inspecteur des cendres chargé de contrôler leur qualité au port de Québec.

The Quebec mercury, 26 mai 1818

Les potasseries de Chertsey

Au temps des premiers colons de Chertsey à partir de 1830 l’industrie était encore florissante et ils ont pu profiter d’un revenu d’appoint apprécié. Dans le recensement de 1861 une note manuscrite indique qu’il y avait 10 potasseries à Chertsey valant $50 chacune et rapportant $15 par année. Il s’agissait d’une activité marginale mais qui permettait à tous les habitants de vendre leurs cendres pour un petit profit.

1861 - 10 potasseries à Chertsey
1861 – 10 potasseries à Chertsey

En 1871 il ne reste plus qu’une potasserie recensée dans les établissements industriels de Chertsey. Son propriétaire est Louis Riopel, il a vendu 6 quarts (?) de potasse pour $186 mais il a acheté 600 minots de cendres aux habitants, leur redistribuant $146, un profit net de $40. L’activité était déjà beaucoup moins rentable ne faisant plus vivre qu’une famille au lieu de 10 en 1861.

1871 - La potasserie de Louis riopel
1871 – La potasserie de Louis riopel

Il n’y a plus de potasserie recensée après cette date.

Louis Riopel, potassier

Recensement 1851- Louis et Octave Riopel
Recensement 1851- Louis et Octave Riopel
Annuaire Lovell 1871 - Chertsey
Annuaire Lovell 1871 – Chertsey

Dans le livre «St-Théodore de Chertsey, une époque, un village» Simon Riopel raconte l’histoire de sa famille en commençant par le fondateur Octave Riopel qui parcourait Chertsey pour acheter les cendres et fabriquait la potasse. Selon le recensement de 1871 c’est plutôt Louis Riopel, son père, qui aurait fait ce commerce. Octave a sûrement participé à cette industrie familiale aussi mais il est recensé en 1851 comme shoemaker, cordonnier. Et il est toujours cordonnier dans l’annuaire Lovell de 1871.

Octave Riopel producteur de potasse
«St-Théodore de Chertsey, une époque, un village» Simon Riopel

Recycler les cendres de bois

Épandre ses cendres dans le jardin est un moyen simple et économique de le fertiliser, c’est presque un rituel. Les cendres de bois sont riches en éléments nutritifs majeurs, comme le phosphore, le potassium et le calcium. Après les avoir tamisées on épand 2 poignées de cendres au mètre carré, il ne faut pas en abuser. C’est bon pour le potager, le jardin, la pelouse, ce n’est pas bon pour les plantes exigeant un sol acide.

De la potasserie à la culture du pot

La potasse a permis à des colons de survivre dans des conditions difficiles en leur procurant un revenu marginal. Les pays de colonisation comme Chertsey sont encore en mode de survie et la culture du pot pourrait être une solution marginale (je potasse fort pour essayer de trouver des idées innovantes, j’ai déjà proposé d’exploiter les terres rares du lac Chantelle). Avec la légalisation du cannabis on assiste à la naissance d’une nouvelle industrie hi-tech au profit d’investisseurs boursiers, il y aurait d’autres solutions qui pourraient aider à la relance des régions défavorisées. Et puis ce serait plus convivial d’acheter son pot à son marché local en découvrant les saveurs des terroirs que dans les boutiques de la SQDC.

Ici - Radio-Canada: magasin de la SQDC
Photo: Ici – Radio-Canada, magasin de la SQDC

Pot – Hash

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Carte du Québec

2 réflexions au sujet de “Potasse, potasserie, pot”

  1. Intéressant d’apprendre les étapes de la fabrication de la potasse et aussi que certains Chertsois en vivaient.

    Par rapport à ton potassage d’idées innovantes pour en venir à suggérer l’idée de la culture du «pot» à Chertsey, quelqu’un l’a eu avant toi. Un projet de règlement à été déposé pour autoriser l’établissement d’une microculture de cannabis au coin de la 125 et du 4e rang E..

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