La Maison Antoine-Lacombe à St-Charles-Borromée a été construite en 1847. Cette maison de pierre a été sauvegardée par Serge Joyal un jeune étudiant de 20 ans qui l’a fait classer monument historique en 1968. En 2020 à 75 ans S. Joyal a pris sa retraite obligatoire de sénateur mais il se bat toujours pour la sauvegarde du patrimoine.
La maison Lacombe et le Musée de Lanaudière
Serge Joyal est né en 1945. Quand il a acheté la Maison Antoine-Lacombe en 1965 il avait tout juste vingt ans. Il ne restait pas beaucoup de maisons de pierre plus que centenaires dans la région de Joliette. Encore étudiant il avait trouvé sa vocation, la préservation du patrimoine.

M. Joyal a acheté la Maison Antoine-Lacombe dans le but de la sauvegarder. Il s’agissait d’un projet de protection du patrimoine. Il cherchait un bâtiment à protéger et il a trouvé cette maison qui était, selon ses dires, dans un très mauvais état au moment de son achat.
Maison Antoine-Lacombe
Il a rapidement su mobiliser les énergies pour lui trouver une nouvelle destinée: un centre d’exposition. Mais il a travaillé fort. Lors de l’inauguration en 1969 il précise que depuis 5 ans il a passé de nombreuses heures à la remettre en état.
Après avoir acheté la maison et commencé à la restaurer je crois que Serge Joyal s’est rendu compte qu’il n’y arriverait pas tout seul. Rénover une maison ancienne demande des moyens et des connaissances. Mgr Valois était président de la Société Historique de Joliette, il a apporté son concours à la fondation d’un musée régional avec d’autres personnalités.
Le 16 mars 1967 la fondation d’un musée à Joliette a été décidée. En octobre les premiers dons ont été faits au Musée De Lanaudière (dont le trône épiscopal de Mgr Archambault). Wilfrid Corbeil qui va fonder le Musée de Joliette en 1976 faisait partie du conseil d’administration. Pendant ce temps les travaux de restauration progressaient.

Le 29 mars 1968 la Maison Lacombe a été classée immeuble patrimonial par le ministère de la Culture du Québec à la suite des démarches entreprises par le conseil d’administration du Musée De Lanaudière. En juillet 1969 la Maison Lacombe a été inaugurée.




Me Serge Joyal qui venait d’être admis au Barreau a reçu ses invités et remercié ceux qui l’ont aidé: ses parents, M. Malo son oncle, la Société Historique, le père Corbeil, Mgr Valois et les autres. Le mauvais état du chemin de la Visitation a failli gâcher la fête.
Voici une des rares photos de S. Joyal à cette époque trouvée sur internet:
La protection d’un site patrimonial
En 1977 un projet commercial est venu menacer le site classé immeuble patrimonial en 1968: à 150 pieds de là, le conseil municipal se propose d’autoriser la construction d’un restaurant du genre Kentucky.
Selon la fiche de la Maison Antoine-Lacombe au Répertoire du Patrimoine Culturel du Québec une aire de protection a été délimitée et inscrite le 28 octobre 1977 juste avant la parution de cet article.
En 1978 la Maison Antoine Lacombe a été mise en vente. Le Musée de Joliette a ouvert ses portes en 1976 et 2 musées à Joliette c’était trop. Serge Joyal et Wilfrid Corbeil en étaient les principaux fondateurs. La Maison Lacombe restait protégée par son statut patrimonial.
Et puis Serge Joyal était député au parlement fédéral depuis 1974, il était occupé ailleurs.

Suite à la vente de la Maison par M. Joyal, la Maison Antoine-Lacombe est devenue une résidence privée. J’ai eu l’immense bonheur de m’entretenir avec l’une des familles ayant demeuré ici dans les années 1980. Cette personne m’a indiquée que vivre dans un immeuble patrimonial comporte de nombreux défis, surtout au niveau des rénovations qui doivent être approuvées par le Ministère. C’est pour cette raison qu’elle a pris la décision de revendre. Il est possible de croire que tous les propriétaires de la Maison suite à M. Joyal ont décidé de vendre pour des raisons similaires.
Maison Antoine-Lacombe
La Maison Antoine-Lacombe
Je n’ai pas trouvé d’information sur la vente de la maison. Voici ce qu’on lit dans l’historique du site de la Maison Antoine-Lacombe.
Après être passée dans les mains de quelques autres propriétaires, la Maison Antoine-Lacombe est achetée en 1989 par la ville de Saint-Charles-Borromée. Elle est dès lors gérée par une corporation indépendante à but non lucratif et devient le centre culturel de la ville.
Les grands frères et grandes soeurs de Lanaudière avaient emménagé en 1988 grâce à la générosité de la Municipalité de St-Charles-Borromée, ils ont dû redéménager semble-t-il.
La Maison Antoine-Lacombe est alors devenue un centre d’exposition. Depuis 1989 jusqu’à aujourd’hui on peut retrouver les annonces des expositions qui s’y sont tenues dans les journaux.
En 1997 la Maison Antoine-Lacombe a fêté son 150ème anniversaire de construction.
En 2022 Maison et jardins Antoine-Lacombe est un organisme pérenne et la maison fête son 175ème anniversaire.
Serge Joyal et la sauvegarde du patrimoine
Le 25 janvier 1976 lors de l’inauguration du Musée d’Art de Joliette Serge Joyal a prononcé un discours qu’il a fait publier dans La Presse.
Pour nous du Québec, il est plus important que pour tout autre homme d’Amérique de nous rattacher aux enseignements de ce que nous avons été. L’Art n’a pas d’autre but que de nous ouvrir sur la société ultérieure que nous pouvons créer, à notre mesure.
Ce n’est pas faire oeuvre d’élitiste que de travailler au Québec à la conservation et à la diffusion du Patrimoine. S’il est un secteur où la coopération et la collaboration devraient être exemplaires et dépolitisées, c’èst bien dans celui de la protection et de la mise en valeur du patrimoine.
Dépolitiser la protection du patrimoine en 1976 en pleine vague nationaliste n’a pas dû être facile. Serge Joyal fait une critique des lois fédérales qui ne sont plus adaptées en donnant l’exemple des expropriations à Mirabel et des travaux pour l’ouverture de la Voie Maritime.
Souvent les politiciens adaptent leur discours par opportunisme. À 75 ans Serge Joyal a pris sa retraite obligatoire de sénateur en 2020 mais son discours n’a pas changé, il continue le combat.
On peut peut-être lui reprocher d’avoir choisi le mauvais parti pour faire avancer ses idées mais pas sa ténacité. Il a dû s’opposer à son propre gouvernement ce qui est un aveu d’échec.
Vous aviez attaqué votre propre gouvernement en 1976 pour corriger la politique d’unilinguisme d’Air Canada:
Avec le professeur François Larocque, nous continuons notre action devant la Cour supérieure du Québec pour avoir enfin une constitution canadienne officiellement bilingue. On ne devrait pas avoir besoin de le faire. C’est une responsabilité politique ! Mais les tribunaux sont là quand le gouvernement ne l’assume pas.
S. Joyal dit adieu à la politique
Le problème reste toujours le même, on l’a vu récemment encore avec le dirigeant unilingue d’Air Canada.
Historique de la Maison Antoine-Lacombe
Antoine Lacombe a obtenu une première concession de Barthélémy Joliette en 1824. Dans la Gazette du Québec du 21 novembre 1885 on a la description de ses terres formant la moitié du lot 11 du 2ème rang du canton de Kildare.

Le 2 juin 1847 Antoine Lacombe cultivateur a conclu un marché avec le maître-maçon Amable Archambault pour la construction d’une maison en pierres de taille comme celles qu’il avait utilisées pour le collège de Joliette qu’il avait construit en 1845 pour la somme de 600 livres.
Antoine Lacombe père a eu beaucoup de problèmes monétaires et il a fini par déménager à St-Liboire, dans le comté de Bagot. Antoine Lacombe fils a habité la maison jusqu’en 1860.
Selon notre compréhension de nos sources, ce serait M. Lacombe père qui a fait construire la Maison. Il a donné deux de ses terres à ses enfants, soit l’une à Antoine Lacombe fils en 1852. Lors de la construction de la Maison, Antoine Lacombe fils était âgé de 20 ans. Il s’est marié l’année suivante, soit le 24 juillet 1848.
Maison Antoine-Lacombe
Joseph Bouchette a dessiné une carte de la région en 1821 juste avant la fondation du village d’Industrie en 1823. La famille Lacombe semble avoir acquis d’autes terres sur le chemin de la Visitation vers le lot 12 où se trouve la maison.
En 1860 Antoine Lacombe devait de l’argent à Edward Scallon et il lui a vendu la maison. Celui-ci était propriétaire des moulins situés sur l’île de L’Assomption en face du 2ème rang de Kildare et du pont qui la traversait. Il projetait la fondation d’un village nommé Entreprise, ce village s’appellera plutôt St-Charles-Borromée. E. Scallon a revendu la maison aussitôt à Alexis Masse.
La Maison Antoine-Lacombe est classée depuis 1968 et on trouve une fiche détaillée la concernant sur le site du Répertoire du Patrimoine du Québec et celui des Lieux Patrimoniaux Canadiens. Mais les 2 historiques qu’on y trouve sont les mêmes et ils sont en partie faux.
La Maison Antoine-Lacombe a été construite en 1847 et Edward Scallon n’y a jamais habité, il en a été propriétaire quelques mois seulement. Voici la suite de l’historique après 1860 publié par la Maison Antoine-Lacombe:
Par la suite, plusieurs propriétaires se succèdent. La maison sert surtout de résidence privée, mais aussi de poste de traite et de comptoir d’échange pour les fourrures. En 1924, Harry Schwartzman, un juif originaire de la Moldavie, achète la maison. Il y résidera avec sa famille pendant une quarantaine d’années. Le lieu deviendra un centre de villégiature où d’autres familles juives de Montréal venaient passer leurs étés.
Maison Antoine-Lacombe
En 1860 la traite des fourrures autour de Joliette devait être assez limitée et je crois que cette information mériterait d’être documentée.
On trouve plusieurs petites annonces publiées par H. Schwartzman pour trouver des employés. Dans L’Étoile du Nord du 15 août 1929 il annonce qu’il n’y a pas de meilleur endroit pour se baigner que chez Schwartzman à Péningue (maison de pierre).

Je me demandais ce que Péningue signifiait. Une étude pédologique du Comté de Joliette publiée en 1961 donne la réponse. C’est une sorte de sable fin à moyen que l’on trouve à partir de St-Félix en descendant vers Notre-Dame-de-Lourdes jusqu’à chez H. Schwartzman où il y a de belles plages pour se baigner.
Dans L’Étoile du Nord du 9 mai 1962 M. Schwartzman annonçait des lots à vendre et des camps d’été à louer. Il ne se limitait donc pas à la clientèle des familles juives de Montréal, il faisait aussi de la publicité dans les journaux locaux pour la clientèle locale.

Un article en anglais du Canadian Jewish News donne de nombreux détails sur l’histoire de la ferme Schwartzman:


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