En regardant une carte de Montréal et ses environs on voit tout de suite que le Parc Régional de la Forêt Ouareau est un des espaces sauvages les plus proches au nord de la ville. Pourtant on le traite comme un vulgaire dépotoir forestier sans autre valeur que commerciale.
La nature sauvage
Recouvrant un peu plus de 150 km² entre Chertsey, Notre-Dame-de-la-Merci et St-Côme le parc régional de la Forêt Ouareau créé en 2003 propose un vaste territoire pour les amateurs de plein air.
Voici comment il est présenté sur leur site internet :
Le parc est doté d’un massif montagneux incorporant un réseau de sentiers multifonctionnels (marche, vélo, ski de fond et raquette) de 120 km. De nombreux refuges et des sites de camping rustique permettent d’allonger le séjour des randonneurs. Traversée par une magnifique rivière, la Forêt Ouareau met en lumière les nombreux lacs sauvages et une paroi d’escalade reconnue et gérée par la Fédération québécoise de la montagne et de l’escalade. Voilà une offre complète qui saura combler l’amateur de grand air !
Pourtant le gouvernement québécois qui gère ce territoire considère ce territoire comme un territoire forestier comme les autres qui doit produire son quota de bois. Il y a une subtilité dans la loi qui différencie les parcs de conservation des autres. La Forêt Ouareau est un parc régional qui n’est pas protégé, il est donc géré comme n’importe quel autre terrain forestier.
La coupe sélective
J’ai retrouvé un article de 2009 de promeneurs constatant les dégâts occasionnés par la coupe sélective :
La scierie Jean-Riopel, de Chertsey, vient d’y faire une récolte de bois qui ne passe pas inaperçue, même si tout semble avoir été fait selon les normes et après consultation auprès des intervenants locaux. Ces coupes de bois dites «sélectives» n’ont rien des coupes à blanc sauvages, car elles consistent à prélever des arbres un à un et à en laisser d’autres debout juste à côté. Cependant, elles dénaturent quand même cette forêt à peu près vierge, une des rares situées à seulement 75 minutes de Montréal.
Si la forêt était encore à peu près vierge il y a quelques années la détérioration se fait très vite. De nouvelles coupes ont été annoncées en 2015 et le maire de Chertsey, Michel Surprenant, est parti en croisade pour les arrêter. Quand la machinerie entre sur un territoire il faut des routes, des ponts, les VTT et les motoneiges suivent, le territoire n’est plus vierge très longtemps.
Bien sûr l’industrie se fait rassurante et minimise son impact. Les citoyens ont été invités à visiter l’usine Riopel de Chertsey et on les a guidés sur le terrain en leur montrant à quel point l’industrie avait le souci de la nature !
Comment se fait-il que nous ne soyons même pas capables de protéger une si petite portion de notre immense territoire ? C’est l’illustration même du changement de mentalité que nous aurons à faire pour sauver la planète. En faisant une coupe de bois dans le parc c’est vrai qu’on va créer quelques emplois pour quelques semaines qui vont nourrir quelques familles. Mais, à mon avis même un homme d’affaires très rapace comprendrait immédiatement qu’il serait plus profitable de préserver la forêt au maximum pour attirer des touristes de Montréal qui pendant des années donneront du travail à toute la région. Plus la nature sera sauvage plus le Parc aura de succès et il faudra peut-être même limiter l’accès pour préserver cet aspect vierge.
Un profit immédiat qui hypothèque l’avenir est complètement stupide et immoral.
Les amis de la Forêt Ouareau
En 2016 quelques citoyens de Chertsey sous l’impulsion de leur maire et d’un groupe de bénévoles ont fondé une Association, les Amis de la Forêt Ouareau pour prouver aux décideurs que les citoyens de la région étaient opposés à ces coupes qui détruisent leur environnement. Des pétitions ont été envoyées et des démarches entreprises. Mais il faut se rendre à l’évidence que ce dossier ne passionne pas les chertsois, comme partout ailleurs dans la société tout le monde est pour la nature et l’écologie mais ça ne signifie pas grand chose tant que le problème ne nous touche pas directement et personnellement. Les citoyens mobilisés sont surtout ceux qui ont peur pour leur chalet et leur paysage.
L’amour de la nature devrait suffire à nous faire changer nos habitudes. Mais si il fallait se contenter d’arguments économiques il me semble assez évident que l’exploitation écologique à long terme de la forêt est plus avantageuse que la récolte de quelques arbres dans l’immédiat.
Trouver des soutiens
En regardant la carte des Laurentides on se rend compte que le Parc Régional de la Forêt Ouareau touche au territoire mohawk situé entre la route 125 et Sainte-Lucie-des-Laurentides. Les mohawks essaient eux aussi avec des partenaires régionaux de préserver une forêt menacée sur le mont Kaaikop au nord de leur territoire et ont entrepris plusieurs actions concrètes.
La préservation de territoires sauvages au nord de Montréal pour former une ceinture verte comme on en trouve maintenant dans certaines métropoles pourrait être une nouvelle façon de présenter le projet au gouvernement. Il est dans l’intérêt de la région de Montréal de préserver le maximum de terres « vierges » à sa proximité car ce sera une denrée de plus en plus rare mondialement et un grand attrait touristique.