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Vers burlesques de René-Louis Chartier de Lotbinière

Le premier poème publié en Nouvelle-France aurait été écrit par René-Louis Chartier de Lotbinière en 1666. Il est intitulé Vers burlesques et raconte sous forme de parodie la première expédition punitive menée contre les iroquois en plein hiver par le régiment de Carignan-Salières tout juste arrivé en Nouvelle-France à l’été 1665. C’est en lisant Mythes et réalités dans l’histoire du Québec de l’historien Marcel Trudel que je l’ai découvert.

En 1665 le roi Louis XIV a envoyé en Nouvelle-France des troupes pour combattre les iroquois qui empêchaient le développement de sa colonie en la harcelant par des attaques meurtrières continues. Le régiment de Carignan-Salières de 1.200 soldats est arrivé entre juin et septembre et le gouverneur Rémy de Courcelle impatient de donner une bonne leçon aux iroquois a organisé une campagne punitive en plein hiver, une expédition de 1.000 kilomètres aller-retour.

Au lieu donc de prendre ses quartiers d’hiver et d’attendre la venue du printemps, on opta pour une campagne qui se ferait à compter de janvier. Les responsables en haut lieu risquaient gros. Arrivés au cours de l’été, aucun d’eux n’avaient encore fait l’expérience de l’hiver canadien, ni Prouville de Tracy (…), ni le gouverneur Rémy de Courcelle, ni l’intendant Talon, ni le colonel Chastelar de Salière qui commandait le régiment. Ni non plus les soldats qui arrivaient eux aussi d’Europe. Tous ces nouveaux venus ignoraient comment se vivait un hiver en Canada.

Marcel Trudel

À leur arrivée au Canada les troupes avaient commencé à construire des forts le long de la rivière Richelieu nommée rivière des Iroquois à cette époque: le fort de Richelieu refait par Mr. Saurel à l’embouchure de la rivière sur le fleuve St-Laurent, le fort de Chambly et le fort Ste-Thérèse. Les villages des iroquois agniers se trouvaient sur la rivière Mohawk affluent de l’Hudson au nord-ouest du fort Orange (Albany) où une colonie hollandaise avait été fondée.

Chartier avait composé un poème burlesque (genre très à la mode en France) racontant en 510 vers (500 octosyllabes et 10 alexandrins) le « Voyage de Monsieur de Courcelles » en Iroquoisie. Voilà bien le plus ancien poème écrit par un Canadien, ou par un Français instruit en Nouvelle-France, dont l’histoire fasse mention. C’est du reste le principal mérite de cette pièce curieuse: elle est longue, plutôt ennuyeuse, guère poétique, à vrai dire, mais non sans valeur documentaire.

René-Louis Chartier de Lotbinière

L’article consacré à Chartier de Lotbinière dans le dictionnaire biographique du Canada précise que le poème est long et ennuyeux mais je ne suis pas d’accord: il est long mais très distrayant. C’est une anti-épopée, le récit d’un fiasco militaire.

Dès le début du poème l’auteur se moque du général à la tête de ses troupes monté sur des raquettes en guise de cheval, des chevaux faits de ficelles, forcé de porter son harnois sur le dos: de quoi se pâmer de rire. Les québécois ont toujours aimé se moquer des français fraîchement arrivés de France devant affronter l’hiver canadien vêtus de leurs jabots de dentelle.

Régiment de Carignan-Salière – Reconstitution historique

Sur le voyage de Monsieur de Courcelles gouverneur et Lieutenant Général pour le Roy en la Nouvelle France en l’année 1666 (BANQ)

La victoire avait bien parlé
De la démarche et défilé
Que vous avez fait Grand Courcelles
Sur des chevaux faits de ficelles
Mais en voyant votre harnois
Et votre pain plus sec que noix
Elle n'aurait pu nous décrire
Sans nous faire pasmer de rire
Vos faits en parlant tout de bon
Utiles à notre Bourbon
Ce grand prince sans raillerie
Qui marche avec artillerie
Quand il cherche son ennemi
N'en aurait que rire à demy
Ce fut la veille d'un dimanche 
Qu'en vous foullant un peu la hanche
Vostre dos chargé d'un bissacq
Pour mettre l'Iroquois à sacq
Fit voir à la gendarmerie
Que ce n'estoit point rêverie
Donc le neuvième de Janvier
Comme autour ou comme espervier
Sans considérer vostre charge
Vous volastes à ce carnage

Dans la marge une note précise que les chevaux de ficelles sont des raquettes. La troupe formée de 300 hommes et d’une centaine d’habitants est partie à pied de Québec et a marché sur le fleuve jusqu’à Trois-Rivières dans le froid. Chaque homme et leur général portaient un havresac de 25 à 30 livres et des chiens tiraient des traînes avec le ravitaillement.

Avec d'assez mauvais garçons
Qui n'avoyent que leurs caleçons
Leurs capots bleus et leurs ceintures
Leurs fusils et leurs couvertures
Et qui traisnaient avidement
La charge de leur aliment
Mais qui croiroit la façon neuve
Dont vous courustes nostre fleuve
Et vous marchastes sur les eaux
Sans bacq, sans barque et sans bateaux
C'est là que vostre grand courage
Qui n'a besoing d'apprentissage
Se peut vanter avec raison
D'avoir combatu la saison
Vous y passates par les picques
Avec vos trouppes hiveriques
Poutant vous n'y perdistes rien
Et lon sen retira fort bien
Ils en ont encor leurs oreilles
Ce ne sont pas grandes merveilles
De voir ceux qui sont avec vous
Avoir eschappé les grands coups
D'un vent nordouest froid et contraire
Qui ne vous prit pas par derrière
Il aurait eu plus de raison
Et j'eusse aimé sa trahison
Mais sa fierté plus incommode
Faisant son attaque à sa mode
À vos gens donna de l'effroy
Aucuns crioient Il fait grand froid

La première étape était Sillery puis, en plusieurs jours dans le froid, couchant à la belle étoile, ils ont marché plus de 100 kilomètres jusqu’à Champlain chez le seigneur Etienne Pézard de Latousche et le lendemain jusqu’au Cap de la Madeleine.

D'autres disoient avec courage
Il fait sy froid que j'enrage
Quelques uns prenans à  deux mains
Ce que cachent tous les humains
Malgré leur généreuse envie
Pensèrent y perdre la vie
Ils en furent tous estonnez
L'un croyoit n'avoir plus de nez
L'autre sentant flestrir sa joue
Ne songeant pas à faire moue
Enfin presque tous estropiez
D'oreilles de mains ou de pieds
Malgré cette attaque gellée
Achevèrent leur enfillée
Et chacun trouva son abry
Plus gaillard et sain qu'un cabry
Ce ne fut pas près d'une souche
Mais en bon logis chez La Touche
Où vous pustes mettre à raison
La rigueur de cette saison
Ce gentilhomme eust bonne grace
À vous régaler de sa tasse
Et vous vous en trouvastes bien
Aussi est ce un bon entretien
Après une froide campagne
De faire moisson de Cocagne
Vous partistes le jour d'après
Au Cap vous eustes bon aprets
Et ce lieu joly de nature
Fut un cap de bonne adventure
Vos soldats y sont fortunez
Et sy refont un peu le nez

Le 15 janvier après 6 jours de marche ils sont arrivés à Trois-Rivières où la troupe a pu se reposer.

Delà rendus aux troys rivières
Ils font la nique aux cymetières
On ne pense plus au passé
Chacun sy trouve delassé
Le pot boult on emplit l'escuelle
Et cestoit la bonne nouvelle
Mais il faut reprendre le chemin
Dans vos souliers de parchemin
Ou sy vous voulez de bazanne
Sans cheval sans mulle et sans asne
Du havre sacq chacun chargé
Voila tout le monde arrangé
A la traisne chacun s'attelle
Et  l'on enfille la venelle
Apres avoir dict maint adieu...

La transcription du texte n’est pas facile et il est vrai que l’épopée est un peu longue. Ils ont traversé le fleuve glacé depuis Trois-Rivières jusqu’au fort de Sorel qui n’étant pas achevé n’a pas pu tous les abriter. Les Relations des Jésuites ont aussi raconté cette épopée, la traversée du fleuve avait été pénible.

Chacun faisait sagamité
Et mangeoit de la bouillie
Plus enfumée que momie
La nécessité faisant vertu
Vous n'en estiez point abbattu
Et fallait vous tenir a quattre
Pour ne pas vous laisser abattre
Tant vous aviez en passion
Le dessein de cette action...

La troupe a ensuite remonté le Richelieu; des renforts venus de Montréal sous les ordres de Charles Lemoyne l’ont rejoint au fort de Chambly, les capots bleus avec leurs armes. L’armée de 500 à 600 hommes a repris sa marche le 28 janvier et a parcouru encore 120 kilomètres sur la glace des lacs Champlain et Saint-Sacrement.

Du lacq vous couvrites la plaine
Avec cinq cens braves guerriers
Qui seraient chargés de lauriers
Sy la neige un peu trop ingratte
Ne les eusse caché soubs sa natte...
Pour se munir les capots bleus
Savent chasser vaches et boeufs
Mais ce fut un pauvre orignac
Qui remplit premier le bissac
On en fit un peu de cuisine
Et quoy qu'on n'eust point de voisine
Pour accommoder proprement
Ce petit rafraichissement
On ne laissa pas à la mode
Qui vous estoit la plus commode
De trancher avec les couteaux
Les meilleurs et tendres morceaux
À la main chacun la jambette
Eut bientot broché sa brochette
Et faict un régal assez bon
Sur la flame et sur le charbon
Mais faute de poivre en l'office
La cendre y courroit pour épice...
Pour dessert vivant de fumée
Ou de substance de tabacq
Vous passates ainsy le lacq
Ou vous fistes quelque curée
De quelques bestes déchirée
Voicy le pays ennemy
Quaucun ne soit donc endormy
Et que lon marche en diligence
Pour faire embuche a cette engence
Car ce sont des loups affamez...

La troupe devait être guidée par des chasseurs algonquins mais ils ne se sont pas présentés au rendez-vous; le gouverneur Rémy de Courcelle a décidé de poursuivre la marche malgré tout. Mais au lieu de remonter la rivière des Agniers ou Mohawks vers l’ouest la troupe a continué tout droit plein sud jusqu’au peuplement des colons hollandais.

Cependant prenez garde  a vous
Vous vous aller egarer tous
Je voids deja que votre guide
Quoy que assez fier et non timide
Ne tire pas au droit chemin
Encor quil ayt boussolle en main
Consultez donc un peu l'oracle
Pour ne trouver aucun obstacle
On dict que vous avez trop fait
Qu'on entend chanter un cochet
Que lon appercoit quelque grange
Que mesme lon void la vidange
D'un peuple qui vit avec soing
Encore quelque mulot de foin
Et qu'il y a grande apparence
Que ce sont alliés de France
Les hollandais bien fort voisins
Mais non pas bien fort les cousins
De l'Iroquois vostre adversaire
Cet accident ne peut vous plaire...

Les français rencontrent des Mohawks qui s’étaient cabanés près des Hollandais. Puisqu’on a enfin des Mohawks sous la main, autant en profiter, sus à l’ennemi ! et quel triomphe, nous chante ce moqueur de poète; on en tue plus de deux, outre une vieille iroquoise. (M. Trudel)

Parlant de la première attaque
Et de ce qu'on fit de remarque
En riant on dit vérité
Je diray donc en liberté
Que nos gens forcant la cabanne
Moins forte qu'une tour de ganne
Des ennemis fiers et hydeux
Il en fut tué plus de deux
Et mesme qu'une vieille femme
Y vomit son sang et son ame
On pouvait lui faire pardon
Mais l'age en refusoit le don
Car la vieillesse decrepite
Craignait moins la mort que la mitte
A fin de ne nous tromper pas
Nos gens ne sen contentent pas
Et continuans leur ravage
Dans une autre ils firent carnage
Et raserent avec raison
Ceux de dedans et la maison
Dont une femme estant blessée
Ne pouvant marcher fut percée
Ces cabannes ou ces panniers
Vous donnerent des prisonniers
Et quelques femmes prisonnieres
Plus affreuses que des megeres
Apres cet accident fatal
De lennemy(?) fier et brutal
Vous apercutes le village
Ou le flamand fait son fromage
Chacun avait grand appetit
Et vous comme le plus petit
Vostre cuisine estoit bien triste
Le cerf n'avoit point la de piste
Le cheuvreil l'ours et l'orignac
Ne pouvant emplir le bissacq
Et vostre ennemy, sans reproche
Pour en chercher estoit trop proche
Enfin la bouteille et les pots
Ne troubloient point vostre repos
Et dans la meilleure chaudierre
Il n'y avoit ny bran ny bierre
Cependant sans vous estonner
Vous estes tout prest a tonner
L'Iroquois paraist au village
En marchandise ou pour pillage
Et n'estant pas trop bon voisin
Moitie figue moitie raisin
Estant maistre de la foire
Et ne s'oubliant(?) pas a boire
Ces coutaux(?) en leur element
Traittent lors avec le flamand
Pour faire guerre aux parullines
Et se munissent de farines
De couteaux et d'armes a feu
Qui leur vallut argent au jeu
Dont ayant avec eux partie
Ils vous payeront leur sortie

Selon un rapport des autorités anglaises du New York la troupe d’invasion française avait rencontré un parti iroquois de 200 guerriers qui lui avait tendu une embusquade, il y avait eu 11 morts et des blessés. Les mohawks qui n’avaient perdu que 3 hommes s’en étaient retourné avec les têtes de 4 français. Les autorités anglaises ont demandé des explications aux français et le gouverneur Courcelle a dû leur expliquer qu’il n’en avait qu’aux Mohawks et pas aux Hollandais.

Vous allez en venir aux mains
Avec ces monstres inhumains
Mais le flamand par courtoisie
Pousse de bonne fantaisie
Vous vient offrir du beurre frais
De la bierre et d'autres bons mets
Et du meilleur vin de sa tonne
De tout cela rien ne m'estonne
Estant comme j'ay dict courtois
Plus que son voisin l'Iroquois...
Les Iroquois estant en rage
D'avoir essuyé du carnage
Tiroient sur vous a coup perdu
Mais chacun veut estre pendu
S'il n'en attrappe cuisse ou aile
Estant monté sur leurs ficelles
Touttefois ayant peu de gens
A la monture intelligens
Et la neige estant assez forte
Vous en fistes sans herbe et motte
A l'abry d'un gros arbre creux
Un parapet assez fameux
Et commandastes d'aigue morte
Afin d'en soutenir la porte
Mais luy qui void vostre ennemy
Ne pouvant rien faire a demy
Son coeur prevenant sa pensée
Courre sur eux teste bessée
Cela ne pleust pas aux guerriers
Qui le suivant (???)
Il s'en apperceut bien luy mesme
Sans avoir le visage blesme
Car il s'estoit trop enfoncé
Et le soldat eust renoncé...

En marge on lit que le Sieur Daiguemorte ne suivit pas le commandement de Mr. de Courcelles et l’ennemi le voyant trop avancé tira sur lui et il fut tué avec quatre autres volontaires.

Il se trouva trente mutins
Qui servirent de proye aux luttins(?)
Et que de nos gens d'Aiguemorte
En l'autre vie ouvroit la porte
A quatre tombes avec luy
Dont vous eustes assez d'ennuy
Le flamand vous en fit le compte
Et sans soucy comme sans honte
Void ainsy perir ses voisins
Qu'il ne tenoit pas pour cousins
Le bastard flamand vous irritte
Et je veux faire sa visitte
Je croy que cet extravagant
Soubs le moule de vostre gand
Eust passé sy la modestie
N'eust accompagné sa survie(?)
Le hollandais apres combat
Qui ne luy servit que d'esbat
Du moins en faisoit il la mine
Vous vint offrir plus de chopine
Il eust avec vous entretien
Et s'y comportoit assez bien
Il vout fit assez bonne chere
Mais commenceant a vous deplaire
De la fuitte des ennemis
Vous fistes ce qu'il est permis
Et n'ayant point la de quoy frire
Vous n'aviez point sujet de rire

Après la déroute la retraite a été sonnée et les troupes ont pris le chemin du retour.

Les Agniers ayant faict retraite
Vous delogeastes sans trompette
Et pressastes tous vos harnois
Autant que basques du Bearnois
Doublant le pas avec la hache
Afin de trouver une cache
Ou vous esperez regaler
Ceux que le choc faisait parler
Sy nous eussions eu des raquettes
Disoient ils sans compter sornettes
Les Iroquois qui sont (???)
(???)
La nation seroit detruite
Et n'aurait peu gaigner la suitte
Avec de semblables discours
Vous couriez cherchant le secours
De cette cache fortunée
Mais elle estoit bien detournée

Des vivres avaient été cachés sous la neige dans une cache mais tout avait disparu. Il fallut donc jeûner jusqu’à ce qu’on fit rencontre d’Algonquins qui revenaient de leur chasse; ils fournirent aux soldats à suffisance de viande pour les empêcher de mourir, sinon assure le colonel du régiment on n’en sauvait pas un seul. C’est ainsi qu’avec bien des misères, les membres de l’expédition purent rejoindre les forts du Richelieu. (M. Trudel)

Et le chemin estant finy
Vous ne trouvates que le nid
Un quidam plus viste qu'un barbe
Vous en fites moins d'un repas
Et ce jeu la ne vous pleut pas
Vostre marche en fut plus legere
De ceste façon mesnagere
Arrivant enfin dans les forts
Froment fit les meilleurs efforts
Pour remettre la gent lassée
Des froids et fatigue passée
Donc apres l'avoir visité
Chacun tirant de son costé
Le Montreal vit sa jeunesse
Au retour conter sa prouesse
Mais le soleil bastant a plat
La neige qui faisoit esclat
Les sieurs Dugal et Lotbinière
Penserent perdre leur visiere
Et comme aussy les sans bast(?)
Ne pouvant marcher qu'a (???)
Furent conduits aux troys rivieres
Ou garantis par leurs prieres
Et par des effets tous divins
De chercher place aux quinze vingts

Pour procurer un abri aux parisiens privés de la vue le roi Louis XIV fit bâtir, sous les murs du château du Louvre, un hospice disposant de 300 places ou QUINZE fois VINGT.

Ils trouverent hostellerie
Ou se fit bonne boucherie(?)
La jeunesse estant a bon port
Prenoit ses plaisirs au raport
De la fortune, et des souffrances
Qu'avoient souffert leurs pauvres panses
Et se vantant sans vanité
Ne disoit rien quy n'eust esté
Encor que l'on voye a vos mines
Que le retour vaut bien matines
Vous vous cachiez comme un momon
Mais les enfans dans leur sermon
Crians tout haut vostre venue
Elle nous fut bientot cognue
Et le Tedeum fut chanté
Comme vous l'aviez merité
Apres avoir vaincu l'Injure
Du temps et d'un monstre parjure

L’épopée se termine par 10 vers de 12 pieds, des alexandrins, qui sont la marque de l’épopée héroïque alors que les vers de 8 pieds étaient ceux de la parodie.

Apres ces beaux exploits et ces travaux guerriers
Grand Courcelle admirant l'objet de vos lauriers
En serieux je diroy que les peines d'Hercule
Que celles d'Alexandre et d'Auguste et de Julle
Ont eu beaucoup d'esclat mais leur ont moins cousté
Qu'apres tant d'accidens n'estant point rebutté
La victoire vous doibt ce quelle a de plus rare
Puisque vos actions en domptant ce barbare
Ont eu pour fondement au sortir de ce lieu
Le service du prince et la gloire de Dieu

René-Louis Chartier de Lotbinière auteur de ce poème est né en 1641 à Paris en France et il est arrivé en Nouvelle-France avec sa famille en 1651. En 1666 il s’était acclimaté et était considéré comme un habitant du pays.

Aux soldats récemment arrivés de France, se joignirent quelques habitants du pays. René-Louis Chartier fut de ceux-là. Hâtivement préparée et menée en hiver par des troupes qui n’avaient aucune expérience de la colonie, l’expédition se déroula au milieu de difficultés inouïes, dues au froid excessif et au manque de nourriture. En bon Canadien qu’il était devenu, René-Louis s’en fût fort bien tiré, n’eussent été une blessure légère reçue au combat et le fait qu’au retour, ébloui par l’éclat de la neige et des glaces, il perdit la vue pendant trois jours. La petite armée ne connut que déboires, et rentra sans avoir rien achevé de ses plans de conquête.

René-Louis Chartier de Lotbinière

Cette campagne contre l’Iroquois avait été un échec mais à l’automne 1666 toute l’armée de la colonie envahit et dévasta le pays des Mohawks.

La deuxième expédition est donc conduite dès septembre et est dirigée par le lieutenant-général Tracy. Les quelque 1 200 hommes (600 du régiment et 600 miliciens), ainsi qu’une centaine de guerriers wendats et algonquins, arrivent au lac Champlain à la fin du mois. Les Iroquois avaient toutefois quitté leurs quatre villages avant que Tracy les ait rejoints. On décide alors de piller et de brûler les maisons longues, les champs et les réserves de maïs. Le 17 octobre, les Français organisent une cérémonie au cours de laquelle ils prennent possession du territoire iroquois au nom du roi de France, Louis XIV.

Régiment de Carignan-Salières

Je ne suis pas paléographe et j’ai retranscrit ce texte ancien de mon mieux mais il y a sûrement quelques erreurs. Marcel Trudel dans Mythes et réalités dans l’histoire du Québec – La suite en avait retranscrit quelques vers en français moderne; j’ai trouvé qu’il était plus exotique de respecter à peu près l’orthographe ancienne. Je n’ai pas trouvé d’autre transcription de ce poème sur internet et j’ai estimé que c’était une lacune puisqu’il fait partie du patrimoine littéraire et historique du Québec.

Carte du Québec

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