À la fin du 19ème siècle la ville de Montréal est devenue la métropole du Dominion du Canada. C’était une cité commerciale et industrielle et l’architecture de la ville s’est rapidement transformée, les maisons anciennes du centre ont été remplacées par des immeubles et de nouveaux quartiers ont été lotis pour loger la main d’oeuvre à la périphérie. Les archives ont conservé de nombreuses photos et gravures documentant cette transformation.
Montréal avant l’industrialisation
Avant la photographie les journaux et les guides touristiques étaient illustrés avec des gravures qui pouvaient être imprimées mécaniquement. La photographie a été inventée en 1839 mais ce n’est qu’à la fin du XIXème siècle que les éditeurs ont pu imprimer des photos pour les livres et les journaux à grands tirages.
Dans la chronique Hochelaga depicta: Montréal en 1839 j’avais documenté des illustrations montrant les principaux bâtiments de la ville de Montreal et quelques paysages. C’était encore une petite ville de province, une ville de commerçants et d’artisans.

Le 8 juillet 1852 un immense incendie avait détruit une grande partie des quartiers populaires de la ville qui commençait à s’étendre au nord et à l’est du Vieux-Montréal. Le faubourg St-Laurent et le faubourg Québec avaient été en grande partie rasés par les flammes. Le journal La Minerve avait publié une carte des secteurs détruits.
Les archives du Musée McCord Stewart ont conservé ces illustrations publiées dans le Illustrated London News le 7 août 1852.
Les ruines près de l’église de l’évêque au coin des rues St-Denis et Ste-Catherine témoignent de la désolation. Des tentes avaient été installées pour abriter les réfugiés.
Entre 1844 et 1854 un chenal avait été creusé dans le lac St-Pierre du fleuve St-Laurent qui permettait aux gros bateaux de remonter le fleuve jusqu’à Montréal avec leurs cargaisons et la ville avait supplanté Québec comme porte d’entrée du Canada; la petite ville de province s’est transformée et est devenue la métropole du Dominion du Canada.
Les premières photographies de la ville et de ses rues datent de la fin des années 1850, on en trouve quelques exemples dans les collections du musée McCord Stewart. Le centre-ville était alors le Vieux-Montréal et les bâtiments y étaient de plus en plus construits en pierre; la main d’oeuvre de cette industrialisation vivait dans les quartiers périphériques dans des maisons plus précaires en bois.
C’est à la fin du siècle que l’aspect de la ville a radicalement changé et que Montréal est devenue une métropole; de très nombreux bâtiments de prestige y ont été construits en quelques années et cette chronique cherche à documenter ce changement.
The St Lawrence Hall Montreal city guide : 1885
En 1885 la ville de Montréal était dominée par la bourgeoisie anglophone. Le guide de la cité de Montréal de 128 pages publié par The Canada Bank Note Company est donc rédigé en anglais. Il a été fait pour les clients d’un hôtel de luxe construit en 1851, The St. Lawrence Hall.
Cette photo des archives du Musée McCord Stewart montre l’hôtel St-Lawrence Hall situé sur la rue St-Jacques vers 1870.
Le guide touristique raconte l’histoire de la ville et décrit sa géographie et ses monuments. L’île de Montréal est la région la plus fertile de la Province de Québec et est spécialement reconnue pour ses fruits, la Pomme Grise, reine des russets et l’incomparable Fameuse poussant avec une perfection qu’on ne peut obtenir nulle part ailleurs. Le terroir agricole de Montréal était encore important pour son économie.
Depuis 1839 les procédés de gravure pour les journaux s’étaient améliorés et le guide montre des paysages de la ville de Montréal très spectaculaires. Celui-ci pris des tours de la basilique Notre-Dame montre la Banque de Montréal et le Bureau des Postes sur la rue St-Jacques en premier plan et le Mont-Royal dans le fond. La rue St-Jacques était alors la rue la plus prestigieuse du Canada où les compagnies de commerce devaient avoir leur siège social.
L’hôtel de ville monumental de Montréal avait été construit entre 1872 et 1878 pour affirmer l’essor de la ville. Le Vieux-Montréal était le centre commercial de la ville avec le marché Bonsecours et le port; à la rue Sherbrooke on était déjà presque à la campagne.
À partir du Champ de Mars où la garnison s’exerçait on voyait les bâtiments de l’hôtel de ville et du palais de justice et la rue Craig en contre-bas.
La rue Ste-Catherine devenait la rue commerçante qu’elle est aujourd’hui. On voit ici le carré Phillips et la cathédrale protestante Christ Church.
Le port de Montréal était le lieu le plus animé de la ville. Le marché Bonsecours avait été construit en 1844-1847 sur un terrain vendu par John Molson fils à la Corporation de la Ville.
Toutes ces grandes gravures étaient insérées dans un long texte décrivant les attraits touristiques de la ville. Une des plus délicieuses autant que des plus excitantes expériences est la descente des rapides de Lachine. Un train quitte la gare Bonaventure chaque matin à 7 heures pour Lachine, (9 milles) où un solide bateau à vapeur attend les passagers pour l’embarquement et le retour vers la ville en fendant les rapides et en passant sous le pont Victoria…
Le guide contient aussi beaucoup de publicités dont certaines sont illustrées de belles gravures des grands magasins de Montréal situés sur les rues Saint-Jacques, Notre-Dame et Craig.
Peu de compagnies canadiennes françaises ont publié leurs publicités dans ce guide, on remarque celle de Dupuis, Dupuis & Co. au 606 de la rue Ste-Catherine dans un secteur habité par les canadiens français, publicité rédigée en anglais: mourning goods.

La douane du port de Montréal était localisée dans un bâtiment triangulaire à l’emplacement du Musée Pointe-à-Callière actuel.
Le guide ne mentionne pas les industries en train de transformer la ville avec la construction de nombreuses usines employant la main d’oeuvre venant s’installer dans les quartiers périphériques de la ville.
Montréal entre 1885 et 1894
Le St-Lawrence Hall et d’autres ont continué à publier des guides illustrés de gravures mais la photographie est devenue plus fréquente et dans les archives de la BANQ on trouve de plus en plus de photos de Montréal à la fin du siècle. Les archives de la Ville de Montréal ont dans leur collection une vue à vol d’oiseau de la ville en 1888 qui a été numérisée en très haute définition et qu’on peut donc agrandir pour en distinguer tous les détails. La fumée des nombreuses cheminées d’usines témoignait de l’intense activité industrielle de la ville.

Lire: L’urbanisation de l’est de Montréal de 1803 à 1888
Les publications montraient les bâtiments gouvernementaux; ils montraient aussi la transformation de la ville où les anciennes maisons traditionnelles étaient remplacées par des résidences modernes luxueuses pour les grands bourgeois.
Pour la population francophone de la ville la transformation se voyait surtout dans les édifices religieux monumentaux qui ont été construits dans la ville à cette époque. La vie et les habitations de la population très nombreuse qui venait des campagnes s’installer en ville pour y travailler sont rarement mentionnées dans ces publications.
Montreal Illustrated en 1894
En 1894 la ville de Montréal était toujours dominée par la bourgeoisie anglophone du Canada et le Montreal Illustrated, un annuaire commercial de 338 pages, est rédigé en anglais avec seulement quelques pages en français à la fin.
Montreal illustrated 1894: its growth, resources, commerce, manufacturing interests, financial institutions, educational advantages and prospects; also sketches of the leading business concerns which contribute to the city’s progress and prosperity; a brief history of the city from foundation to the present time.
Montreal illustrated
Le guide fait le résumé de l’histoire de la ville depuis sa fondation en 1642, sa fonction de place de commerce des fourrures avec les pays d’en-haut et sa vocation religieuse. Le 7 septembre 1760 les troupes britanniques ont pris possession de la ville et apporté avec elles une nouvelle ère, le drapeau britannique a été hissé.
Cet historique de la ville de Montréal est illustré de nombreuses photographies des bâtiments et des rues de la ville. La place Jacques Cartier servait alors de place du marché, on voit en arrière l’hôtel de ville et la colonne Nelson.
La rue St-Jacques était la rue principale du Canada de cette époque, les compagnies de commerce y avaient leur siège social. La photo ci-dessus a été prise au coin de la Place d’Armes devant la basilique Notre-Dame; on voit les colonnes de la Bank of Montreal, les marquises de l’Imperial building et le Post Office plus loin. Les bâtiments peuvent facilement être situés à partir du plan de la ville de Montréal dessiné par Charles Goad: Atlas of the City of Montreal 1890.
La ville se modernisait et de nombreux édifices de prestige ont été construits en quelques années que le guide a illustrés.
Le bâtiment très moderne de la New York Life Insurance Company construit en 1887-1889 se trouvait aussi sur la place d’Armes.

En continuant la rue St-Jacques vers l’ouest on trouvait la Bank of British North America, la Molsons Bank et le Temple Building.
La maison des Douanes du port de Montreal se trouvait à l’emplacement du musée Pointe-à-Callière actuel et cette vue du port de Montréal a été prise depuis son toit ou une fenêtre. La rue de la Commune (Commissioners street) était surélevée par rapport aux quais où des trains venaient décharger les navires amarrés.
C’est toujours surprenant quand on fait des recherches de constater que les informations trouvées ne concordent pas. Selon le plan la maison des Douanes était un bâtiment triangulaire remplacé par le musée actuel, les informations données par la ville de Montréal la situent dans un bâtiment toujours présent situé sur le Custom Square du plan, aujourd’hui Place Royale.
L’aménagement du square Dorchester à l’emplacement d’un ancien cimetière avait été fait entre 1872 et 1880; il avait fallu déplacer de nombreuses sépultures et il en resterait encore beaucoup sous les jardins actuels. L’église St. Peter’s a été consacrée en 1894 sous le nom de cathédrale Saint-Jacques, c’était une réplique de la basilique Saint-Pierre de Rome. On aperçoit en arrière du bâtiment du Y.M.C.A. le clocher de l’église St-Paul située alors sur la rue Dorchester au coin sud-est de la rue Ste-Monique dont je n’ai pu trouver aucune information.
L’hôtel est construit entre 1875 et 1878, sous l’impulsion de six hommes d’affaires de Montréal, dont William Notman. À l’époque, la ville de Montréal est la plus grande ville de tout le Canada ainsi que la plaque tournante du commerce. Ainsi, les plans de l’hôtel sont conçus pour montrer l’importance croissante de la ville et permettre également d’accueillir les voyageurs en provenance de la gare Windsor.
Hôtel Windsor
L’hôtel Windsor était situé au coin des rues Dorchester et Peel un peu au nord de la gare du Canadian Pacific Railway (gare Windsor) construite entre 1887 et 1889 qui existe toujours.
L’édifice du Board of Trade de Montréal a été construit en 1892-1893 et il n’est pas dessiné sur le plan Goad. Il était situé dans le Vieux-Montréal dans le quadrilatère des rues St-Sacrement, St-Pierre, Lemoine et St-Nicolas. Il a été détruit en 1901 par un incendie et remplacé par l’édifice actuel. L’illustration est une gravure, un dessin d’architecte, et non pas une photographie.
Le St. James Club a ouvert en 1864 au coin des rues Dorchester et University; il a été démoli en 1961 pour la construction de la Place Ville-Marie. De nombreux personnages illustres se joignent au club, tels que le prince de Galles, le prince Arthur et les pères de la Confédération. En 1896, il compte 600 membres.
L’historique de la ville donne le point de vue de la bourgeoisie anglophone de la métropole du Dominion sur l’histoire de sa ville. Par exemple The Orange riots ne sont pas des événements particulièrement notables pour les francophones d’aujourd’hui mais les luttes entre irlandais étaient importantes pour les anglophones. Il y avait de nombreux irlandais à Montréal à cette époque et le guide consacre un chapitre aux émeutes fomentées par les Orangemen en 1877 et 1878: murdered by an Irish Catholic Mob.
Le chapitre intitulé The smallpox riots raconte brièvement qu’en 1885 les French Canadians de Montréal se sont agités en soutien aux français des Territoires (le journal ne mentionne pas la pendaison de Louis Riel); il insiste plutôt sur les émeutes contre la vaccination obligatoire que les canadiens français ignorants n’acceptaient pas.
Lire: Les anti-vaccins de Montréal en 1885
Le guide présentait les bâtiments prestigieux de la ville, beaucoup ayant été récemment construits; mais il contient aussi de très nombreuses photographies et gravures montrant les commerces et les industries de la ville. L’Hôtel Balmoral était sur la rue Notre-Dame à l’ouest de la rue St-Henry sur le côté sud de la rue; le musée McCord Stewart a dans ses collections une série de photos de l’hôtel prises à cette époque par William Notman.
Le magasin Birks sur la rue Ste-Catherine venait d’être construit; il a été agrandi depuis et transformé en hôtel.
Les publicités du Montreal Illustrated
Après la présentation de la ville de Montréal, son histoire, ses attraits touristiques et ses bâtiments principaux, le guide contient de très nombreuses publicités qui sont souvent illustrées d’une photographie et d’un commentaire. L’épicerie de George Graham était située au 2448 de la rue Ste-Catherine au coin de la rue Drummond, il a documenté son histoire et celle de son commerce.
L’épicerie Thomson & Johnston était au 2450 rue Ste-Catherine sur l’autre coin de la rue Drummond et on peut aussi lire son historique.
Foisy Frères étaient marchands de pianos, orgues et machines à coudre au 70 rue St-Laurent. La compagnie Foisy avait aussi une manufacture située au 214 avenue Papineau illustrée par une grande gravure, vue à vol d’oiseau.
And. Brisset & Fils importateurs étaient des parisiens installés à Montréal depuis 8 ans. Ils importaient du savon et des chandelles de Marseille à l’huile d’olive, des conserves alimentaires de Appert, du chocolat de Trebucien de Paris, de l’eau minérale de Vichy et Contrexeville, du bordeaux, du cognac, etc.
Les photos et les commentaires permettent de documenter la vie commerciale de Montréal en 1894, de situer les rues commerçantes et de voir comment les entrepreneurs faisaient leur publicité à la fin du XIXème siècle.
M. Laing & Sons étaient épiciers au 839-841 rue Ste-Catherine Est et au 95-111 rue Parthenais dans un quartier francophone mais toutes leurs annonces sont en anglais.
Lessard & Harris plumbers, steam and gas fitters avaient installé la plomberie dans le nouveau bâtiment du Monument National(e) construit entre 1891 et 1894 sur la rue St-Laurent pour la société St-Jean-Baptiste. La gare du Grand Trunk Railway avait été construite en 1886 à l’emplacement de la gare Bonaventure actuelle.
Le Turkish Bath Hotel était au 144 rue Ste-Monique au coin de l’avenue McGill College, il avait ouvert en 1869.
Plusieurs industriels ont publié leur annonce mais les industriels francophones étaient moins nombreux que les anglophones. La manufacture de biscuits, confiseries et chocolats Viau & Frère située au 1284-1294 rue Notre-Dame, au coin de la rue Ste-Marie est une des exceptions. Sa publicité est rédigée en anglais et on y apprend que Mr. Viau possédait une ferme de 700 acres à Maisonneuve et Longue-Pointe où il élevait des vaches à lait. Les industriels aimaient montrer que leurs usines étaient actives en dessinant une épaisse fumée noire sortant de leurs cheminées.
Le guide contient 338 pages avec de très nombreuses publicités illustrées; elles sont toutes intéressantes mais je ne peux pas tout montrer. Certaines photos de bâtiments toujours existant méritent d’être documentées; ici le 196 de la rue McGill.
Ce bâtiment de la Montreal Coffee and Spice Steam Mills situé 55 rue Côté au coin de la rue Lagauchetière dans le quartier chinois est aujourd’hui occupé par le restaurant Nouilles Wing Ltée. Il était alors occupé par S.H. & A.S. Ewing.

Beaucoup d’autres bâtiments ont disparu ou ont été complètement transformés, il faudrait aller vérifier à chaque adresse.
Le magasin de Henry Morgan & Co. sur la rue Ste-Catherine a fonctionné jusqu’en 1972 quand il est devenu le magasin La Baie.
Il y a plusieurs centaines de publicités dans ce guide et je n’ai documenté que les plus belles photographies. Beaucoup n’ont pas d’illustration, d’autres sont illustrées de gravures qui sont très spectaculaires mais moins réalistes. Le magasin H. Shorey & Co. faisait 6 étages et il était situé au coin des rues Notre-Dame et St-Henry.
Alex. McArthur & Co. avait des moulins pour fabriquer le papier à Joliette. La compagnie avait aussi un bureau et un entrepôt au 650 rue Craig et une usine au coin des rues Logan et Harbor.
Dans les dernières pages du guide on trouve quelques publicités bilingues publiées par des commerçants francophones.
Les fours à chaux d’Olivier Limoges étaient construits au 477 chemin Papineau; il y en avait 4 chacun brûlant 40.000 livres de pure chaux par jour. La pierre à chaux venait des fameux lits de St-Michel à 9 milles de Montréal.
Le commerce de bois de T. Préfontaine & Co. était localisé sur le canal Lachine dans le quartier Ste-Cunégonde. La gravure donne un bel aperçu de leur usine de sciage qui devait fonctionner à la vapeur avec les 2 cheminées et leur fumée noire.
Finalement dans les toutes dernières pages on trouve des publicités rédigées uniquement en français. E. Dagenais avait un établissement de marchandises sèches au 1058-1060 rue Ontario entre les rues Plessis et Maisonneuve. A. L. Hurtibise & Cie marchands de foin, paille, grains, fleur, etc. avaient leur bureau au 42 carré Jacques-Cartier et leurs entrepôts sur la rue Mills à Pointe-St-Charles et sur la rue Maisonneuve dans Hochelaga. La maison Pelletier et Brosseau plombeurs, ferblantiers, couvreurs, etc. était au 106 rue St-Louis.
Ces annonces permettent de situer les rues commerçantes fréquentées par les francophones de la ville de Montréal: rues Ontario, St-Laurent, Ste-Catherine, Amherst, St-Denis, Papineau, marché Bonsecours, etc.
Robitaille & Cie importateur et commerçant d’épicerie au 212 rue St-Paul vis à vis le marché Bonsecours; P.O. Tremblay marchand de ferronneries au 2681 rue Notre-Dame; L.O. d’Argencourt épicier au 1506-1508 rue Ontario et 362 rue St-Denis; pharmacie du Dr. Léonard sans adresse; imprimerie A. Trudeau au 165 rue Amherst; Nap. Mathieu ferronneries au 2636 rue Notre-Dame; Morissette & Matard sculpteurs au 136 avenue Papineau; Filiatrault & Lesage marchandises sèches au 285 rue St-Laurent; C.H. Chivé natif de France pharmacie au 1399-1401 rue Notre-Dame; Rod. Carrière pharmacie 1341 rue Ste-Catherine; Guilmette & Ouimet chaussures 1122 rue Ontario; Gravel & Paré importateurs au 10 rue St-Laurent; O. Leblanc peintures, vitres et tapisseries en gros au 1118-1120 rue Ontario; J.B. Pilon & Fils pompes funèbres au 2517 rue Notre-Dame; O. Bastien importateur au coin des rues St-Laurent et Duluth; Lafleur & Ducharme agents d’immeubles et d’assurances au 17 côte de la Place d’Armes; pharmacie Laporte au 1130 rue Ontario.
Guide de Montréal et de ses environs en 1897
Le Guide de Montréal et de ses environs, orné de plus de trente gravures par A. Leblond de Brumath est moins ambitieux, il contient une trentaine de photographies (et non pas de gravures) représentant les églises et monuments de la ville.
Après un historique de la ville le guide donne la liste des gouverneurs de Montréal et des maires de Montréal depuis Jacques Viger (1833-1840) jusqu’à R. Wilson-Smith (1896-1897). La Société numismatique et archéologique de Montréal avait installé des plaques commémoratives aux endroits historiques importants. La première avait été installée rue Metcalfe près de la rue Sherbrooke à l’emplacement d’un grand village indien nommé Hochelaga par Jacques Cartier en 1535. La seconde concernait John Molson père de la navigation à vapeur! Il y en avait 30 en tout.
Le point d’intersection des 2 races nationales et des 2 classes sociales de la population était au coin des rues Ste-Catherine et St-Laurent. Mais en fait il y avait 3 races: 60.000 anglais dont la majorité étaient écossais, 150.000 canadiens-français et 40.000 irlandais vivant à Griffintown.
Les photographies du guide illustrent pour la plupart les mêmes emplacements que le guide précédent mais il y a quelques nouveaux bâtiments comme l’université Laval sur la rue St-Denis et l’hôpital Royal Victoria devant le Mont-Royal.

Le guide comprend une visite guidée de la ville très romantique avec des citations de poèmes de Louis Fréchette et autres; le style n’est pas du tout le même que dans les guides anglophones. Les faubourgs de Montréal en 1897 étaient Hochelaga, St-Jean-Baptiste, Côteau St-Louis, St-Gabriel, Maisonneuve, St-Louis du Mile End, Outremont, Westmount, St-Henri, Ste-Cunégonde, Montréal Annexe au nord et Montréal Junction à l’ouest. Il y avait aussi le faubourg Québec à l’est et Pointe St-Charles ou Griffintown à l’ouest peuplé par les irlandais: c’est le domaine des fils de la verte Erin, et il présente toutes les particularités propres à cette race expansive et remuante.
Le guide a été publié par Granger Frères qui a inséré une photographie de sa librairie située au 1699 rue Notre-Dame.
Le guide fait ensuite la liste de tous les clubs, associations, sociétés musicales, théâtres, hôtels, restaurants et maisons recommandées et comprend quelques publicités à la fin.
Montréal en 1900
Les photographies sont devenues de plus en plus fréquentes dans les journaux et les guides touristiques, en 1900 l’hôtel Windsor a publié un guide contenant de grandes photos panoramiques de la ville: The Windsor Hotel guide to the City of Montreal.
Le guide décrivait aussi les sites touristiques des environs de Montréal et se terminait par des publicités d’hôtels de prestige au Canada et aux États-Unis.
Les albums de rues de E.Z. Massicotte à la BANQ
Tous ces guides et publications montrent les édifices prestigieux, les commerces et les industries mais ils ne documentent pas la vie des habitants ordinaires de la ville de Montréal. Le site internet de la BANQ présente des milliers d’autres photographies de Montréal à cette époque. Une collection particulièrement intéressante se trouve dans les albums d’illustrations compilés par Edouard-Zotique Massicotte entre 1870 et 1920; j’en ai sélectionné quelques unes pour compléter cette chronique.
Illustrations de Montréal, de 1870 à 1920 – Une mine de renseignements visuels sur une des périodes les plus florissantes de Montréal, les albums de rues Massicotte renferment plus de 6000 illustrations: photographies, cartes postales et dessins glanés dans des journaux.
J’ai sélectionné en priorité les photos montrant la transformation de la ville à la fin du XIXème siècle dans les quartiers populaires. Cette photographie de la rue St-Jacques au coin de la rue St-Jean en 1870 est une des plus anciennes de la collection, beaucoup d’autres ne sont pas datées précisément.
Le Vieux-Montréal a été complètement transformé à cette époque, il y avait des maisons à pignon qui ont été remplacées par des immeubles de style victorien; il ne reste plus que quelques unes de ces maisons anciennes.
Il y avait encore de ces vieilles maisons un peu partout dans les rues de ville qui étaient peu à peu remplacées par des immeubles.
L’ancien hôpital général de Montréal (aussi connu sous le nom de Hôpital général des frères Charon) fut un hôpital de Montréal de 1694 à 1880. Il est situé au sud de la place d’Youville, à l’ouest de la rue Saint-Pierre. Une partie du bâtiment a été démolie pour percer la rue St-Laurent jusqu’au fleuve.
Une partie de l’hôpital général des soeurs grises a été démolie pour élargir la rue St-Laurent et la faire déboucher jusqu’au port. Les vieilles maisons étaient démolies pour laisser la place au progrès.
Au coin des rues Ste-Catherine et St-Denis il y avait encore une belle maison à pignon qui a été remplacée peu après par un immeuble.
Déjà en 1891 on trouvait des immeubles sur les rues périphériques pour loger les travailleurs, ici au coin des rues St-Laurent et Prince Arthur.
Beaucoup de photos des albums Massicotte ne sont pas datées ni situées, les responsables de la BANQ ont simplement relevé les informations visuelles, les noms des commerçants par exemple.

La place Jacques Cartier et le marché Bonsecours étaient au coeur de l’approvisionnement de la ville à partir du port et les photos montrent leur achalandage les jours de marché.
La ville s’étendait vers le nord et l’est, le parc Lafontaine était très fréquenté les belles journées de repos.
Les villes industrielles de la fin du XIXème siècle étaient polluées par les cheminées des usines fonctionnant au charbon, Montréal n’y échappait pas. Ces 2 photos ne sont pas datées mais cette pollution a persisté pendant de longues années.
Les cartes postales suivantes sont plus récentes, elles datent d’après 1900 sans doute. Elles documentent les rues de la ville de Montréal qui se modernisait avec l’arrivée des tramways électriques puis des automobiles.
La BANQ a cartographié les 6.000 photographies des albums de rues de E.-Z. Massicotte ce qui permet de toutes les localiser.
Montréal d’un autre siècle: cartographie des images des albums de rues E.-.Z. Massicotte
Les collections de photos du Musée McCord Stewart
La collection du musée McCord Stewart contient aussi de belles photos de Montréal autrefois, en voici quelques exemples.
En 1866 depuis le Mont-Royal on voyait un réservoir d’eau à flanc de montagne et les terrains de l’université McGill. Au niveau de la rue Sherbrooke il y avait encore de grands espaces verts; au loin l’église Notre-Dame et le pont Victoria.
En 1898 tout le territoire avait été bâti au pied de la montagne et vers l’est de la ville à perte de vue.
Les rues principales vers le port étaient bordées d’immeubles de plusieurs étages en pierres dès la fin des années 1860.
La campagne était encore proche de la ville et les vaches broutaient sur la rue Sherbrooke devant le Séminaire.
Les inondations dans les premières rues du Vieux-Montréal semblent avoir été fréquentes, en 1886, 1888, etc.

Le tramway électrique a été installé dans ces années et il a nécessité des aménagements complexes. Le monument à Sir John A. MacDonald avait été inauguré par une foule nombreuse, aujourd’hui sa statue a été déménagée.
Wow,
un travail gigantesque!
Bravo pour ces documents et tes commentaires dont enrichissants