Les castors ce sont les conservateurs catholiques québécois entre 1875 et 1900. Les francissons ce sont les français de France, ces mangeurs de saucisson qui venaient prêcher leur république laïque en terre chrétienne et semer la zizanie. La relation entre les cousins québécois et français a toujours été un peu problématique, c’est normal et amusant.
Nos ennemis les francissons
Le pamphlet Dans le camp ennemi de Zacharie Lacasse est typique de la propagande castoriste en 1893. La France laïque et républicaine dérangeait beaucoup le parti des Castors.
Il y a français et français. Certains, dès qu’ils mettent le pied sur notre sol, nous sentons qu’ils sont de la famille; aussitôt ils nous aiment, ils nous félicitent de ce que nous sommes.
Les autres ce sont des francissons, ainsi nommés parce qu’ils sont seulement francs aux saucissons qu’ils mangent tous les vendredis de l’année, même le vendredi-saint.
Ces francissons sont les plus grands ennemis du Canada-Français et de la religion catholique.
Aujourd’hui ça ne dérange plus personne que les français mangent du saucisson le vendredi (mais il faut encore que les m… francissons prétendent que le saucisson est bien meilleur en France, c’est vrai qu’ils sont un peu énervants).
Les canadiens français jugés par les français de France
L’abbé Armand Yon était québécois mais il a passé une bonne partie de sa vie en France. Il a publié une critique du Québec de son époque et de ses rapports avec la France républicaine. Il dit rapporter ce qui se dit en France à propos du Québec mais il en profite pour dire ce qu’il pense des Castors.
Les québécois sont sensibles à la critique, A. Yon prend ses précautions, ce n’est pas un francisson. Une critique qui blesse est inutile, il faut savoir être constructif.
L’esprit laïc
À partir de 1789 la France va osciller entre la république laïque et la monarchie chrétienne et en 1880 elle bascule définitivement vers la république. C’est une rupture totale avec l’Ancien Régime. Le Québec de 1880 était encore une colonie cherchant à préserver sa langue et sa religion.
L’interdiction des emblèmes religieux sur le Tricolore
Il y avait d’abord eu les sacrilèges de la révolution de 1789 contre le Roi, l’Église et ses prêtres. Puis tout au long du siècle des lois ont été adoptées pour limiter le pouvoir de l’Église sur l’État. Les journaux du Québec rapportaient ces nouvelles en appelant à prier pour l’Église de France martyrisée.
La loi de séparation de l’Église et de l’État
La loi Combes de 1904 qui interdisait l’enseignement des congrégations religieuses a achevé la séparation définitive de l’Église et de l’État. Les enseignants religieux expulsés des écoles françaises ont dû trouver du travail ailleurs et beaucoup sont venus au Québec. Leurs critiques violentes de la république venaient conforter le parti des Castors et accentuer le conservatisme de la société.
Libéralisme et castorisme
Le parti des Castors de Mgr Laflèche voyait dans les francissons républicains l’ennemi à abattre. Le libéralisme et les rouges du Québec pourtant bien timides dans leurs revendications étaient déjà traités en ennemis de l’Église et pourtant ils respectaient le Roi et l’Église.
L’échec du castorisme
Mais le Québec ne vivait pas dans une bulle et les ultramontains n’ont pas pu empêcher la société d’évoluer. Le Parti Conservateur de Québec s’est retrouvé divisé par la sécession du parti des Castors. Ce sont les libéraux qui ont gouverné mais les rouges n’étaient pas aussi rouges qu’en France, heureusement.
Il n’y a pas eu de révolution sanglante, il a fallu du temps mais aujourd’hui les québécois réclament eux aussi une république laïque séparée de la religion.
Et aujourd’hui c’est le Québec laïc qui offusque le Canada au nom du multiculturalisme et de la liberté de religion. Les cousins francissons étaient quand même un peu en avance mais c’est vrai qu’il faut apprendre à critiquer sans blesser les susceptibilités, ce n’est pas facile.