Catégorie: Histoire
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Immigration building Nominingue 1907

En 1907 le gouvernement fédéral a fait construire un bâtiment à Nominingue pour accueillir les immigrants venus coloniser les cantons du nord des Laurentides. Nominingue était alors le terminus du P’tit Train du Nord, les familles y étaient logées en attendant de trouver une terre. C’est en consultant les archives du Canada que j’ai trouvé cette information. Je connais un peu l’histoire de Nominingue mais je n’en avais jamais entendu parler.

Une information trouvée dans les archives

En cherchant des images anciennes de Nominingue j’ai d’abord trouvé cette photo dans la collection des archives du Canada. Comme je ne connaissais pas ce bâtiment j’ai poursuivi ma recherche et j’ai trouvé dans la collection deux autres documents qui la documentent, ils sont signés par Sir Wilfrid Laurier. Le premier date de 1905 et il indique que le terrain où a été construit le bâtiment d’immigration a été acheté de M. d’Halewyn. Il était situé sur la rue principale près de la gare.

Le baron d’Halewyn était un aristocrate français qui s’était établi à Nominingue, un notable proche du curé Labelle et des autorités.

… du château de Liettres, Pas-de-Calais, un jeune gentilhomme, le baron d’Halewyn, tente l’aventure, désireux de pratiquer la traite des fourrures…

Municipalité de Nominingue

Le baron d’Halewyn a activement participé à la fondation de Nominingue, dans cet article de L’Avenir du Nord du 17 juillet 1902 on apprend qu’il était alors maire du Nominingue.

Le baron d'Halewyn maire du Nominingue
Château d'Halewyn, au Nominingue
BANQ

En septembre 1906 Sir Wilfrid Laurier approuvait les devis des travaux, Zotique Gauthier de Nominingue a été choisi pour les réaliser. La photo date de 1907, la construction du bâtiment s’est faite rapidement.

Pourquoi une maison de l’immigration à Nominingue?

En faisant la recherche immigration building Nominingue sur les moteurs de recherche j’ai trouvé d’autres informations. En 1907 il y en avait 3 au Québec, à Roberval, Péribonka et Nominingue, ils étaient financés par le gouvernement fédéral pour prendre en charge les immigrants à leur arrivée dans les pays de colonisation. En fait les immigrants étaient plutôt des rapatriés des États-Unis déçus par leur expérience ou des familles de canadiens-français désirant s’installer dans les nouveaux territoires du nord. Les hôteliers avaient l’habitude de profiter d’eux en leur faisant payer des prix exorbitants.

Journal des débats 1907
Journal des débats 1907

La maison de Nominingue avait 4 grandes pièces équipées de poêles pour cuisiner, les familles pouvaient y habiter le temps de trouver une terre où s’installer. Elle logeait aussi l’agent des terres du gouvernement du Québec.

J’ai trouvé des mentions de ce bâtiment dans les comptes du gouvernement jusqu’en 1914. En 1907 la ligne de train arrêtait à Nominingue qui était la capitale du nord. Puis la ligne a été prolongée vers Mont-Laurier qui l’a détrônée. Les immigrants allaient alors plus loin vers le nord.

Ancien hôtel de ville «La Rescapée»

Quand j’ai trouvé la photo de ce bâtiment j’ai tout de suite pensé à la maison qui abrite aujourd’hui les activités du club de l’âge d’or de Nominingue. Elle lui ressemble beaucoup, les mêmes dimensions, le même nombre d’ouvertures, la même fondation en pierre…

Vue de Nominingue

Mais ce n’est pas possible, l’historique donné par la MRC pour la maison nommée La Rescapée est trop contradictoire.

Dès 1897, les citoyens de Nominingue discutent de la construction d’un hôtel de ville qui voit le jour en 1906, érigé par Hormidas Lefebvre au montant de 2 200 $. Cette bâtisse abritera au 1er étage un marché public et au 2e étage une salle publique, une salle du conseil et une cour de justice. En 1907, une cour de Circuit y siège trois fois par an pour le district d’Ottawa et la cour du magistrat y vient quatre fois par an. En 1908, une geôle attenante y est construite. On dit qu’il y eut même une autopsie pratiquée à cet endroit.

En 1975, cet ancien bâtiment change de vocation et devient le local du Club de l’Âge d’Or, après des rénovations importantes effectuées par une équipe d’aînés bénévoles nommée « l’équipe volante ». Le local sera baptisé La Rescapée. Il est encore aujourd’hui le lieu dynamique de rencontre des aînés de Nominingue.

Route du Lièvre Rouge

Mais alors où était le bâtiment de l’immigration construit par le gouvernement et qu’est-il devenu? J’ai continué ma recherche. Dans La Presse du 2 janvier 1904 j’ai trouvé cette information:

Une maison de refuge sera construite au village Nominingue sur l’un des terrains de la corporation. À une assemblée des membres du conseil municipal de cette dernière localité, il a été entendu que moyennant une certaine contribution, le conseil se réserve une salle où il tiendra, dans la nouvelle maison, ses séances régulières.

La Presse 2 janvier 1904

Mais il semble bien qu’il s’agisse de 2 maisons presque identiques mais différentes. Voici ce que m’a répondu le Comité de la Gare de Nominingue que j’ai interrogé:

Cette maison était située derrière la gare et était destinée aux colons qui venaient s’établir à Nominingue en attendant la construction de leur maison. Le chef de gare y habitait aussi avec sa famille. Cette maison semble sur le même modèle que celui de l’Hôtel de ville qui fût construite dans les mêmes années.

La maison des colons comme elle était nommée se trouvait derrière la gare, reste à savoir quand et pourquoi elle a été démolie.

Nominingue autrefois

Le Centre d’interprétation et de recherches sur le patrimoine des Laurentides a ouvert une salle d’exposition dans l’ancien hôtel de la Gare de Nominingue l’été passé pour présenter les fouilles archéologiques qui sont faites depuis plusieurs années autour des lacs Nominingue. L’Info du Nord a publié le programme de la nouvelle saison et une exposition sera consacrée au baron d’Halewyn, c’est sûr que je vais aller la voir:

L'Info du Nord 3 janvier 2023
L’Info du Nord 3 janvier 2023

J’avais déjà publié des photos anciennes de Nominingue, en voici quelques autres pour le plaisir:

En 1900-1910 l’industrie forestière a connu un renouveau grâce à l’exploitation du bois de pulpe. Les grands pins avaient tous été coupés, les petits arbres prenaient de la valeur. La Patrie rapporte en 1900 que les habitants de Mominingue ont reçu de l’argent sonnant pour leur bois de pulpe. La rivière Rouge descendra ce printemps au delà d’un million de billots…

La Patrie 21 avril 1900
La Patrie 21 avril 1900

En 1905 un canadien parvenu, M. L. Leblanc devenu M. White, a investi à Nominingue pour exploiter ce bois de pulpe.

La Presse 18 août 1905
La Presse 18 août 1905

Le canadien parvenu n’est pas resté longtemps à Nominingue, ses investissements ont été rachetés par la compagnie Nominingue Pulp-Wood Supply qui n’a pas eu beaucoup plus de succès. La transformation du bois de pulpe nécessitait des installations trop importantes.

C’était la vie économique à Nominingue quand les immigrants venaient s’y installer vers 1907.

Carte du Québec

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