Joseph Burr Twiss et Russell Twiss ont fabriqué et vendu des horloges dans le village d’Industrie et à St-Liguori à partir de 1837, leurs horloges sont collectionnées dans des musées et pourtant la seule mention de Joseph Burr Twiss dans le livre Histoire de Joliette est pour dire qu’il y tenait une maison de pension en 1851. Les historiens de Joliette ne sont pas très curieux et les autres affirment que Joseph Burr s’est retiré des affaires en 1837 mais c’est faux.
The Twiss brothers horlogers à Montréal
Les 5 frères Twiss venus du Connecticut se sont installés à Montréal sur le chemin Côte-des-Neiges à partir de 1821. Ils importaient des mécanismes d’horloges manufacturés au Connecticut qu’ils assemblaient dans des coffres de bois fabriqués sur place. Ce seraient les premiers horlogers au Canada à avoir vendu des horloges à un prix abordable et elles ont été très populaires.
En 1837 Russell a ouvert une boutique de réparation d’horloges à Ligouri (St-Liguori) et il a été enterré à Rawdon en 1851. Il n’y a pas d’information à propos de Joseph Burr après 1837. Le Musée Royal d’Ontario possède une horloge signée J. B. & R. Twiss Montreal:
Les horloges Twiss sont recherchées par les collectionneurs et la NAWCC a publié un document PDF montrant tous les mécanismes des horloges 30 heures Twiss; les photos illustrant la suite de l’article viennent du Canadian Clock Museum qui en possède 2.
Un autre texte datant de 1910 donne à peu près les mêmes informations; en 1837 Joseph et Russell auraient fermé leur boutique de Montréal. Joseph Burr aurait arrêté la fabrication d’horloges et Russell se serait installé à St-Ligorui(!).
Mais ce n’est pas vrai que Joseph s’est retiré des affaires en 1837, il a été horloger au Village d’Industrie de 1837 à 1857 et un important commerçant de la ville en transformation.
Documentation sur Joseph Burr Twiss à L’Industrie (Joliette)
La première mention de la présence des frères Twiss dans le village d’Industrie se trouve dans un contrat notarié du 21 janvier 1837. J.B. Twiss et R. Twiss horlogers demeurant en la paroisse de St-Paul ont commandé 5.000 pieds de planche de pin à Michel Boisvert marchand aubergiste de Kildare. La ville de Joliette a d’abord été nommée St-Paul puis village d’Industrie ou paroisse St-Charles-Borromée.
Le même jour ils ont conclu un autre marché avec Antoine Dyonne pour qu’il leur scie 800 planches de pin de 1 pied de large par 8 pieds de long à son moulin de Kildare.
Le 27 mars 1838 Joseph B. Twiss horloger demeurant au village d’Industrie a signé un bail de 2 ans avec Étienne Partenais pour un emplacement dans le village bâti de maison, hangar, écurie et laiterie.
Le 7 mai 1838 Joseph B. Twiss et Russell Twiss horlogers du village d’Industrie ont engagé Léon Godard 17 ans comme apprenti. Le 12 mai 1838 Joseph Burr Twiss et Russell Twiss fabriqueurs d’horloges résidents à St-Paul ont signé une procuration à Alonzo French (tanneur dans le village d’Industrie) pour percevoir les créances qui leur étaient dues pour la vente de leurs horloges.
Le 14 juillet Joseph B. Twiss a engagé Louis Ethier comme compagnon menuisier pour un an. Le 8 septembre il a acheté à Antoine Lacombe et son épouse Sophie Hervieux un emplacement sur la rue du Moulin bâti de maison, grange et autres bâtiments; dame Marguerite Gamelin en avait la jouissance jusqu’à sa mort.
Contrairement à ce qu’on lit dans la documentation Joseph Burr Twiss n’a pas arrêté de fabriquer des horloges en 1837. Au contraire il a été très actif au village d’Industrie et de nombreux actes notariés témoignent de ses activités.
Le 26 avril 1839 J. B. Twiss a acheté une jument, une vache, une génisse et un cochon de Jean-Baptiste Desmarais fils. Le 24 juin Joseph B. Twiss horloger à St-Paul et Russell Twiss horloger à St-Jacques ont acheté une terre de 2 arpents par 30 dans la seigneurie de Lavaltrie vers le ruisseau St-Pierre; Russell avait déménagé à St-Liguori (qui faisait encore partie de St-Jacques). Le 8 avril 1840 Joseph B. Twiss a acheté un cheval à Toussaint Guilbault pour 210 livres. Le 5 septembre Julia W. Francis épouse de Joseph B. Twiss a acheté un emplacement situé sur une rue(?) entre Antoine Lacombe et François Beaudouin, bâti d’une maison et étable, pour 300 livres.
Le 21 octobre les frères Twiss ont vendu une terre de 2 arpents par 30 bornée par le ruisseau St-Pierre mais les voisins ne sont pas les mêmes que dans le contrat de 1839, il s’agit peut-être d’une autre terre. Le 29 mars 1841 Jacques Desroches menuisier de L’Industrie a signé un engagement pour son fils mineur Olivier comme apprenti de Joseph B. Twiss horloger pour 1 an. Le 14 juin J. Twiss a signé une procuration à Désiré Lemaitre Bellenois huissier de L’Industrie pour recouvrer des créances sur des horloges et des cribles vendus dans le Haut-Canada.
Le 2 juin 1842 Joseph B. Twiss a signé un contrat avec Pierre Majeau menuisier de L’Industrie pour la livraison de 900 boîtes d’horloge. On voit bien que Joseph Twiss était encore très actif comme horloger et qu’il produisait en série.
Le 18 novembre Joseph B. Twiss a acheté à Narcisse Myé la coupe et dépouille de tout le bois à prendre sur une terre de la seigneurie de Lanoraie en échange d’un cheval et d’une vache. Le 4 janvier 1843 Julia Francis épouse de J. B. Twiss a acheté à Louis Beaudouin fils une terre de 2 arpents sur 27 au ruisseau St-Pierre sans bâtiment. Le 11 août 1844 Joseph B. Twiss a acheté à Désiré Lemaitre Bellenois huissier un emplacement dans le village d’Industrie voisin du sien. Le 5 septembre Honoré Robitaille garçon majeur de St-Jacques a cédé et transporté tous ses droits successifs à Russell Twiss horloger de St-Jacques.
Le 16 février 1846 Joseph Burr Twiss a rendu des comptes en tant que tuteur des enfants de David Stansfeld et Margaret Hall. David Stansfeld était sans doute parent avec James marchand à L’Industrie. Le contrat décrit les comptes de la succession avec les marchands du village; un avenant montre que Barthélémy Joliette a racheté la terre vendue par la succession.
La famille Hall semble avoir été importante pour les Twiss. Russell avait épousé Permela Hall juste avant de venir à L’Industrie, Joseph était le tuteur de Margaret Hall et il habitait à côté du médecin Henry Hall. Le 5 janvier 1846 Elie Langlois a vendu à Russell Twiss une terre à St-Jacques bordé par Louis Dupras, H(?) Richard et un terrain qu’il possédait déjà sans bâtiment; le 29 mars 1847 Russell Twiss a acheté à Joseph Ratelle une terre à St-Jacques voisine de celle de Samuel Anderson.
Le 24 mars 1851 Russell Twiss a conclu un marché avec François Bellemare de Yamachiche qui vendait ses horloges et ses cribles. Le contrat précise qu’ils avaient commencé leur association en 1841 et que les horloges se vendaient à partir de 5 livres chaque. Le 17 octobre 1851 Russell Twiss était décédé et sa veuve Permela Hall a réglé les comptes finaux avec F. Bellemare. Le 12 janvier 1852 l’inventaire de la succession de Russell Twiss a été fait, il détenait de nombreuses propriétés.
Le 5 avril 1852 les propriétés de Russell Twiss ont été mises à l’encan pour être vendues.
Le marché des américains à L’Industrie
Le 21 mars 1851 les commerçants du village d’Industrie ont convenu d’un acte de société pour construire un nouveau marché.
300 parts du marché ont été réparties entre les habitants du village et Joseph Burr Twiss en a pris 12. Le marché devait être construit sur les terrains de Alonzo French, Joseph B. Twiss, François Morin, Joseph Myer père, Jean-Baptiste Flamand père, Joseph Peltier maçon de la paroisse L’Assomption et Médard Vézina. Le curé Manseau avait pris 2 parts mais peu après il a changé d’avis et décidé de construire le marché sur ses terres, place Bourget aujourd’hui. Pendant quelques années il y a eu le marché du curé et le marché des américains.
Lire: La construction du marché Bonsecours
Dans l’Histoire de Joliette on lit à la page 120 que Joseph Burr Twiss avait une maison de pension (aubergiste) en 1851, c’est toute l’information qu’on trouve à son propos.
Le 19 mai 1852 Joseph-B. Twiss a vendu une parcelle de terrain pour la construction du train entre L’industrie et Rawdon.
Le 27 mai 1856 Joseph B. Twiss a vendu 3 emplacements situés dans le village d’Industrie. Il semble qu’il liquidait ses affaires. Dans la marge du contrat une annotation précise qu’il y avait sur le terrain de sa boutique un moulin mû par des chevaux avec tous les mécanismes, instruments et outils dans le dit moulin ou boutique.
Finalement le 5 janvier 1857 il a signé une quittance au nom de sa femme décédée. Selon un autre site internet Joseph Burr Twiss serait né en 1803 à Wallingford Connecticut et décédé en 1877 au Canada, sans préciser où exactement. Russell serait né en 1807 à Meriden Connecticut et décédé en 1851 à St-Liguori.
J. B. Twiss remarié et retraité à Ramsay
Daniel Parkinson (Up to Rawdon) m’a aidé à documenter la suite de l’histoire de Joseph Burr Twiss. En 1858 Joseph Burr Twiss, veuf de Joliette, a épousé Harriet Turner de Daillebout, spinster, ce qui signifie vieille fille. Le mariage a été enregistré à l’église méthodiste de Rawdon. George Gilmour et Sophia (illisible) étaient témoins.
Je suppose qu’il avait pris sa retraite après avoir vendu ses propriétés de joliette. Le 18 mars 1858 il est intervenu dans un contrat notarié affirmant demeurer à St-Liguori. Dans le recensement de Daillebout en 1861 J.B. Twiss 58 ans est recensé avec Robert Turner 88 ans et Henriette Turner 48 ans, ils étaient anglicans et Julie Plante servante est recensée après eux.
Joseph Burr Twiss est décédé le 31 mars 1877 et son acte de décès a été enregistré à St. John’s Anglican Church. Il est nommé Joseph Benjamin Twiss de De Ramsey et il semble qu’il ait été enterré dans le cimetière protestant au nord de St-Félix-de-Valois, la seigneurie de Ramsay autrefois.
Sa veuve Harriet Turner ne lui a pas survécu longtemps, elle est décédée la même année en novembre. Il semble que Joseph Burr n’a jamais eu d’enfant ni avec sa première ni avec sa seconde femme.
Russell Twiss et sa famille à St-Liguori
Je n’ai pas documenté les greffes des notaires de St-Liguori et j’ai moins d’information à donner à son sujet. Dans l’Histoire de St-Liguori on lit que Russell Twiss serait décédé d’un accident de chasse. A.-C. Dugas son auteur précise qu’il était un des fabricants de nos fameuses horloges en bois. Les frères Twiss étaient encore fameux à St-Liguori en 1902.
François Lanoue dans Une nouvelle Acadie a publié la liste des censitaires de St-Jacques en 1861 selon le livre terrier de la seigneurie de St-Sulpice. Samuel Anderson, Russell Twiss et George Gilmour avaient les lots 590 et 591 (commué); Russell Twiss avait aussi des parties des lots 594 et 595 (commué). Ce sont tous des lots situés vers le centre du village de St-Liguori, près du moulin banal.
Lors du recensement de St-Liguori en 1851 Russell Twiss venait de décéder mais sa veuve Pamelia (Permela) Hall et ses enfants, Julius né à L’Industrie et Nelson, Alfred, Octavus, nés à St-Jacques sont recensés; ils étaient de religion baptiste. À la page suivante du recensement on lit que Russell est mort d’un coup de fusil reçu accidentellement.
Le 4 avril 1862 Joseph B. Twiss a été nommé procureur par son neveu Nelson W. Twiss demeurant à Meriden Connecticut pour vendre une propriété appartenant à son père Russell à St-Liguori à George Gilman cardeur au moulin de George Gilmour qui a signé comme témoin.
Le 8 février 1867 Aimé Dugas notaire de St-Liguori et procureur de Permela Twiss, Julius Twiss et Nelson Twiss de Meriden Connecticut a reçu la somme de 368 piastres dans un jugement contre Michel Vézina et autres. Le 31 août 1869 Aimé Dugas procureur de Gustavus Davis Twiss de Newhaven fils de Russell Twiss et Permela Hall a ratifié le contrat de la vente d’un terrain de St-Liguori à George Gilmour maître-meunier et cardeur; le même jour A. Dugas a envoyé une signification de l’acte de vente à G. Gilmour demeurant à Joliette.
Julius Twiss fils de Russell a été un important financier américain. Il est né à Joliette et une page internet qui lui est consacrée raconte l’histoire de ses ancêtres venus du Kerry en Irlande en 1680 en Nouvelle-Angleterre.
Les horloges Twiss fonctionnaient pendant 30 heures grâce à des poids qu’il suffisait de remonter. Le réglage des poids se faisait avec des petits cailloux dans les boîtes suspendues par un système de poulies. J’ai trouvé d’autres belles photos des mécanismes d’une horloge signée J. & R. Twiss Montreal sur un site de commerce en ligne, en voici quelques unes:
Les frères Twiss dans la revue d’histoire du Québec
La revue d’histoire du Québec Cap-aux-Diamants a publié une Brève histoire de l’horlogerie au Québec en 2000. Un paragraphe est consacré à l’histoire des frères Twiss:
L’arrivée de Russell dans la rue Côte-des-Neiges, vers 1832, permettra de poursuivre l’association des frères Twiss dans la vente d’horloges. Le commerce continuera à être prospère pendant encore quelques années. La rébellion de 1837 et probablement la mort de sa femme décideront Joseph à rentrer dans son pays d’origine.
Joseph avait déménagé à Joliette avant la rébellion de novembre 1837; en janvier 1837 il y habitait déjà. Et il a continué à vendre des horloges au Québec jusqu’en 1856 au moins. Si il avait perdu sa première femme en 1837 il a refait sa vie avec deux autres.