Le gouvernement du Québec veut que les québécois profitent de la révolution écologique: lithium, graphite, hydro-électricité, le Québec a les ressources dont le monde a besoin. Il y a un gisement de graphite à Saint-Michel-des-Saints, en l’exploitant ses propriétaires promettent qu’ils vont participer au développement durable de la planète.
On accuse les gens d’être soupçonneux et d’empêcher le développement industriel: le premier réflexe c’est pas dans ma cour. Et il y a certainement de quoi être sceptique quand on lit en gros titre:
Les fausses promesses de la cimenterie: Ciment McInnis invoque le secret commercial pour éviter de s’expliquer sur les engagements faits aux Québécois
Journal de Montréal 18 mars 2021
Ce n’est donc pas simple de promouvoir un nouveau projet minier sur un territoire appartenant aux Attikameks en zone de villégiature près du Parc du Mont-Tremblant.
La communauté soutient le projet
Pourtant, selon le site de la compagnie Nouveau Monde Graphite, 82% de la communauté soutient le projet. On ne sait pas exactement de quelle communauté il s’agit mais le sondage doit être scientifique, le site internet est très sérieux.
Il faut dire que la compagnie a compris l’importance de bien informer la communauté pour qu’elle en comprenne tous les enjeux. Et en lisant son site internet il faut bien admettre qu’il ne s’agit que d’un petit trou à creuser dans la forêt, un trou bien propre qui apportera beaucoup d’avantages à la communauté et au Québec.
Politique de développement durable
Pour prouver son sérieux la compagnie a pris des engagements publiés sur son site. Voici quelques extraits de la politique de développement durable:
Nous sommes Nouveau Monde; une nouvelle avenue pour promouvoir le développement durable grâce à des matériaux avancés.
Le graphite est un minéral essentiel qui joue un rôle clé dans la transition mondiale vers une société décarbonisée.
Pour décarboniser il faut extraire du carbone (du graphite), c’est quand même étonnant la science!
PORTÉE DE LA POLITIQUE – La présente politique est née d’un désir d’équité envers les générations actuelles et futures et pourrait changer au fil de l’évolution de la société.
Aujourd’hui les compagnies adoptent des politiques comme les gouvernements; elles peuvent les modifier bien sûr, dans un sens ou dans l’autre. Heureusement on nous dit: Nous nous engageons à respecter – et à dépasser lorsque possible – les normes et dispositions de durabilité établies par les normes juridiques, industrielles et ESG en vigueur.
Envoyons d’l’avant, nos gens
François Legault et son gouvernement nous disent qu’au Québec on est aussi intelligents qu’ailleurs et qu’il n’y a aucune raison pour que les québécois soient moins riches que leurs voisins. On est capables nous aussi.
Le graphite est une ressource indispensable pour la révolution écologique proposée et on en a besoin le plus vite possible. Le BAPE a bien fait quelques objections au projet, comme pour la cimenterie de Port-Daniel, mais le projet est déjà tellement avancé que le gouvernement a décidé de ne pas l’arrêter ou le retarder, il veillera à l’améliorer en cours de route.
Ce devait être la première mine entièrement électrique au monde mais il semble que la technologie ne soit pas tout à fait au point. [J’avais publié cette chronique en 2021 et en juillet 2024 voilà ce que rapportait La Presse.]

L’exploitation va donc commencer normalement et puis si tout va bien on modernisera. En attendant le gouvernement va amener une ligne électrique, construire des routes. L’autre problème est la gestion des résidus, 80% de la terre extraite n’est pas utile, il faut l’entreposer pour l’éternité. La compagnie a mis au point un procédé révolutionnaire qui n’a encore jamais été testé mais elle nous assure qu’avec ça on peut dormir tranquille; il n’y aura pas de pollution de la nappe phréatique, c’est garanti.
Il ne reste plus qu’un point à régler: arriver à un accord avec la nation Attikamek qui réclame ce territoire comme son territoire ancestral. Mais il semble que ce ne soit qu’une question d’argent, sans doute autour de 250 millions. La mine est prévue pour durer 25 ans, ça fait 10 millions par année pour un petit bout de terrain, c’est pas si mal. En embauchant quelques autochtones sur la mine les dernières objections devraient tomber.
Au Québec on est du bon monde: à priori on fait confiance aux investisseurs. Ils ne sont pas tous comme Ciment McInnis à faire de vagues promesses orales. Le gouvernement s’est quand même assuré que toutes les promesses soient écrites noir sur blanc.
À la CAQ on n’est pas aussi naïfs qu’au PQ ou au PLQ.
Une mine chez mon voisin
En fait il y a du graphite un peu partout dans les Laurentides. Il a été exploité à Grenville, à Labelle, au Lac-des-Îles. Et il y a d’autres minéraux. À Chertsey j’avais trouvé du cuivre et de l’ocre ferreux sur le bord de la rivière Jean-Venne et il y a des terres rares au lac Chantelle. La demande pour les petits filons encore inexploités va exploser c’est certain.
Mon conseil aux habitants de la région est d’aller sur le site GESTIM pour vérifier si leur terrain fait déjà partie d’un claim minier. Si ce n’est pas encore le cas ça vaut le coup de prendre une option sur son terrain et quelques terrains voisins, au cas où!
Le territoire est divisé en petites cellules que n’importe qui peut réclamer pour y faire des fouilles de prospection en payant des droits minimes. L’idéal est de trouver les minéraux chez son voisin pour pouvoir les extraire sans en subir directement les conséquences. Le voisin recevra une redevance qui lui permettra de déménager ailleurs.
Entente entre Manawan et Nouveau Monde Graphite
Le Conseil des Atikamekw de Manawan et Nouveau Monde Graphite Inc. (NMG) confirment la signature d’une entente répercussions et avantages couvrant le projet minier Matawinie, situé sur le Nitaskinan. Par cette entente, la communauté de Manawan donne son consentement à la réalisation de la mine dans le respect de l’environnement et avec des bénéfices directs pour la Première Nation… L’entente inclut des dispositions visant la participation des Atikamekw de Manawan à la gestion et la surveillance environnementale, la mise en place de formations et de mesures d’employabilité adaptées et préférentielles, la promotion des opportunités d’affaires pendant la construction et l’opération de la mine, de même que la reconnaissance de la culture atikamekw et l’intégration de mesures de sécurisation culturelle. L’entente prévoit également un partage des bénéfices financiers associés à la valorisation du graphite par NMG.
L’Action – 25 décembre 2024
82% de publicité mensongère. Voyez, c’est comme pour les vaccins. La phase expérimentale no. 3 se terminera seulement en 2023, mais on nous affirme haut et fort jour après jour qu’ils sont sans danger et efficaces à plus de 90%. L’industrie a un pouvoir bien supérieur à celui des gouvernements et le nôtre est vendu à l’industrie depuis trop longtemps. Triste constat mais excellent article. Continuez!!
Naomi Klein a décrit la stratégie du choc qui permet à certains de tirer profit de chaque catastrophe. Crise sanitaire, crise écologique, ce sont des catastrophes pour certains et de bonnes opportunités pour d’autres: en état d’urgence les règlements sont assouplis ou même abandonnés.
82% de soutien c’est peut-être exagéré mais la municipalité de St-Michel-des-Saints et une partie de la population appuient le projet. Le territoire est grand, la plupart des gens ne seront pas trop dérangés par la mine. Comme c’est pour le bien de la communauté il faudrait avoir des raisons graves pour s’y opposer.
Les gouvernements et le fonctionnement en général de notre société dépendent en partie de l’industrie, cette dernière n’en étant que trop consciente, elle en profite goulûment (Bombardier p.ex). Nous sommes dans un monde où l’ultralibéralisation est encore perçue comme la panacée aux maux de la société, croyance qui se répand plus vite que la Covid et pire, qui rend apathiques les cerveaux moins méfiants.
Legault, pas plus que son gouvernement (CAQ) ne sont ni ne seront un gouvernement centré sur la répartition des richesses, l’humanisme et l’écologie. Le premier réflexe, quand il nous parle d’un projet, devrait être la méfiance. D’ailleurs, si ma mémoire est bonne, il faisait partie du PQ quand ce gouvernement a mis sur pied le projet de la cimenterie Mc Innis, lequel a été un projet électoraliste de création d’emplois, tout comme le début des éoliennes à Cap Chat, souvenons-nous.
En parlant d’emploi, quand Legault se targue de créer des emplois payants, il oublie de mentionner que ses visées participent ardemment à l’inflation et certes, à l’accumulation de la richesse, pour certains, mais également et surtout à la perte du pouvoir d’achat des moins bien nantis. Plus Legault parle et plus le fossé entre les « pauvres » et les riches se creuse et s’élargit.
J’appréhende la réponse du BAPE concernant GNL, sachant que même si socialement, le projet n’est pas accepté, la CAQ trouvera une excuse pour aller de l’avant dans ce désastreux dessein, d’autant plus qu’une partie de la population du Saguenay l’appuie.
Et le graphite n’est pas » la solution verte » mais un mal nécessaire, faut-il croire, pour une réforme trop lente et trop modeste.
Le BAPE a publié son rapport le 12 juin 2020 et le gouvernement a décidé d’aller de l’avant malgré les objections du BAPE qui n’était pas convaincu par la méthode révolutionnaire jamais encore testée de traitement des résidus.
Parfois, je trouve que le BAPE ressemble davantage à un voeux pieux qu’à une réelle intention de concilier des enjeux souvent divergeants. Pourquoi cette entité a t-elle été constituée si ses points de vues ne sont pas tenus pour compte par celles et ceux qui l’ont mise en place. De la poudre aux yeux…